[...] l'art est logé à la même enseigne que l'amour.
" Cher monsieur, comme il est rare que l'homme soit satisfait de l'état dans lequel il se trouve ! Il convoite toujours celui de son voisin, qui lui-même n'a que le désir d'en sortir. "
[Johann Wolfgang GOETHE, "Les Années d'apprentissage de Wilhelm Meister" (1795-1796) - traduction de Blaise Briod (1954) revue par Bernard Lortholary (1999), Livre I, chapitre XIV page 88 - collection "folio Classique ", éd. Gallimard, 1999]
L'art est long, la vie est brève, le jugement malaisé, l'occasion fugitive.
L'amour-propre donne à nos qualités aussi bien qu'à nos défauts plus de relief qu'ils n'en ont.
Les premiers pas qui vous conduisent vers les labyrinthes de l'amour ont tant d'agréments, les premières perspectives tant de charmes, que l'on n'a que trop de plaisir à s'y reporter. [...]
Wilhelm répéta à Marianne ce qu'elle avait déjà si souvent entendu de sa bouche : combien vite elle avait attiré sur elle toute son attention, le détournant du spectacle lui-même ; combien sa présence, son jeu, sa voix l'avaient fasciné ; comment il en était arrivé à ne plus assister qu'aux pièces où elle paraissait [...]
[Johann Wolfgang GOETHE, "Les Années d'apprentissage de Wilhelm Meister" (1795-1796) - traduction de Blaise Briod (1954) revue par Bernard Lortholary (1999), Livre I, chapitre XV pages 99-100 - collection "folio Classique ", éd. Gallimard, 1999]
«Puisque nous ne pouvons rattraper le temps quand il s'est enfui, sachons au moins gaiement et gentiment l'honorer au passage comme une belle divinité.»
je trouve très simples les moyens de guérir la folie : ce sont les mêmes par lesquels on empêche les hommes de bon sens de devenir fous. Que l’on excite leur activité personnelle, qu’on les accoutume à l’ordre, qu’on leur fasse voir que leur existence et leur sort sont les mêmes que ceux de beaucoup d’autres ; qu’un talent extraordinaire, que le plus grand bonheur et le plus grand malheur, ne sont que de légères déviations du cours ordinaire des choses : alors la folie ne trouvera chez eux aucun accès, et, si elle existe, elle disparaîtra insensiblement. J’ai réglé les heures du vieillard ; il donne à quelques enfants des leçons de harpe ; il aide à travailler au jardin, et il a déjà beaucoup plus de sérénité. Il désire manger du chou qu’il plante, il veut que mon fils, à qui, en cas de mort, il a donné sa harpe, devienne un bon musicien, afin d’être en état de s’en servir à son tour. (...) Si je puis obtenir encore qu’il renonce à sa barbe et à sa longue robe, j’aurai beaucoup gagné, car il n’est rien qui nous dispose plus à la folie que de nous distinguer des autres, et rien ne maintient plus sûrement le sens commun que de vivre, avec beaucoup de gens, selon la règle commune. Et combien de choses, hélas ! dans notre éducation et nos institutions civiles, ne sont-elles pas faites pour nous prédisposer, nous et nos enfants, à la folie !
Le monde est si vide si l'on n'y imagine que montagnes, fleuves et villes, mais d'y savoir quelqu'un avec qui l'on s'entend, avec qui l'on peut vivre en silence, c'est ce qui fait de ce globe un jardin habité.
Quel acteur, quel écrivain, quel homme enfin ne serait au comble de ses vœux, si, par une noble parole ou par une bonne action, il produisait une impression aussi générale ? Quelle délicieuse jouissance n’éprouverait-on pas, si l’on pouvait répandre aussi rapidement, par une commotion électrique, des sentiments honnêtes, nobles, dignes de l’humanité (p122)
il est bien rare que l’homme soit content de la position où il se trouve ; il désire toujours celle de son voisin, qui, de son côté, n’aspire qu’à la quitter. (p62)