AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de SalondeStephanie


Une lecture transgénérationnelle pour rêver et réfléchir

Avec ce premier ouvrage très en harmonie avec le célèbre classique d'Andersen, Jean-Philippe Goulet nous entraîne dans les profondeurs des océans à la découverte du monde sirénien. Les amateurs de fantasy seront conquis par le suspense et l'héroïsme des protagonistes. Contrairement à bien des contes, les héroïnes jouent ici un rôle tout aussi captivant que leurs homologues masculins. Ce texte révèle aussi de véritables connaissances de l'océan qui sont transmises de manière ludique et qui sont sans doute le fruit d'une étude minutieuse. D'ailleurs, l'illustratrice de cette épopée, Emma Transon, a très bien cerné l'essence de ce mystérieux univers marin en réalisant la splendide couverture.

D'autre part, cet opus peut être perçu comme un conte philosophique, par la transmission des valeurs de respect, de justice, de tolérance, de confiance et de solidarité qui y sont véhiculées et qui s'avèrent absolument nécessaires aujourd'hui. En ce sens, on y aborde le sexisme, le racisme, le nationalisme, l'extrémisme avec des métaphores éclairées et empreintes d'une certaine légèreté adaptées pour un jeune lectorat.

Cet ouvrage rappelle aussi « l'Entretien d'un père avec ses enfants » de Denis Diderot où l'auteur parle à ses enfants, mais s'adresse surtout à la société. Il est bon de souligner qu'il arrive parfois que des obscurantistes diffusent des messages haineux dans la sphère publique. C'est le rôle des auteurs d'éclairer l'époque et de mettre en garde contre ces dérives sombres. L'écriture devient alors une arme de combat pour la justice sociale. Tout comme Émile Zola en son temps, les mots volent ici au secours des plus vulnérables et convoquent l'action.

On y propose également une réflexion sur la relation entre l'Homme et la nature et sur les changements climatiques. Il y a une interpellation et une remise en question avec un jugement parfois assez sévère de notre comportement envers l'environnement. En ce sens, nous devenons des acteurs invités à participer au changement, plutôt que de simples spectateurs face aux défis environnementaux. La recherche de l'harmonie avec l'environnement, avec les autres et avec soi-même est présente en filigrane dans toutes les pages de cet ouvrage.

Dans un autre ordre d'idées, ce roman peut aussi être vu comme un récit initiatique où les héros sont appelés à transcender leurs épreuves. À ce propos, nous sommes également invités à répondre à cette question : « Que sommes-nous prêts à faire pour réaliser nos rêves ? » Comme dans « l'Odyssée » d'Homère, on est encouragé à larguer les amarres et à vivre pleinement au quotidien.

La question de la communication est également traitée. Dans le monde actuel, tout le monde parle et personne n'écoute. L'individualisme triomphe de manière dérangeante. Dans ce récit, on présente différents moyens de communication pour souder cette communauté sirénienne qui sait agir sous le signe de la solidarité. Il y a une certaine contemporanéité à aborder cet aspect de la connectivité qui rappelle la modernité et l'avant-gardisme de « Vingt mille lieues sous les mers » de Jules Verne.

Puisque le livre offre différents degrés de lecture et une écriture fluide et accessible, il peut très bien être lu en famille et favoriser le dialogue parents-enfants. À tout âge, on peut se laisser bercer par sa magie et sa poésie et se laisser émouvoir par ce récit. Comme des bouteilles à la mer, plusieurs des messages envoyés aux lecteurs caressent tout doucement le coeur.

Finalement, le livre peut suggérer la mélodie des vagues de « Deux étés » d'Érik Orsenna et fait résonner l'appel de la liberté de « Salut au Grand Sud » d'Isabelle Autissier et d'Érik Orsenna. le roman évoque également la douleur du deuil décrite dans « Boomerang » de Tatiana de Rosnay. Il y a la mer, les bateaux qui disparaissent au loin. Les êtres chers qui ne sont plus là. Or, comme le disait William Blake : « Il n'y a pas de morts. Il y a des vivants sur les deux rives ».

En espérant la suite de cette aventure, je recommande vivement la lecture de ce conte lumineux et généreux gorgé de mots qui veulent prendre le large. C'est un très beau voyage.

Commenter  J’apprécie          31



Ont apprécié cette critique (2)voir plus




{* *}