AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de migdal


La « Terrasse à Sainte Adresse » (1867) qui orne la couverture de la « Falaise des fous », m'évoque mes arrières grands parents. le siège du Havre en 1870 fut la première tragédie de mon grand père, alors nouveau né, qui connut plus tard les affres de la grande guerre. Mes parents sont nés entre les deux guerres mondiales dans le Pays de Caux et j'ai grandi dans le triangle Rouen, Dieppe, Honfleur où Patrick Grainville nous emmène sur la trace des impressionnistes...

Autant dire que ma critique est forcément biaisée par mon attachement à la Normandie et l'éblouissant talent avec laquelle l'auteur évoque les falaises d'Etretat, Fécamp et Varengeville, les plages de Deauville et Trouville, les pluies et les brumes normandes et nous restitue l'animation du Havre et de Rouen à la charnière entre le XIX et le XX siècle. La peinture qu'il brosse est exacte, détaillée et superbe … les galets ne changent guère au fil des millénaires … renouvelés par la falaise qui recule progressivement.

« Jadis, j'ai embarqué sur la mer un jeune homme qui devint éternel.
J'ai du apercevoir Claude Monet aux extrémités de la grève, au pied de la falaise d'Aval. Mais ce n'était pas le premier peintre que je voyais hanter Etretat ».
Ce génial et mémorable incipit ouvre 643 pages qui couvrent les soixante années 1868-1927 et dessinent ce que la Normandie et Etretat ont apporté au monde des arts, dans un univers bouleversé par la technologie, les moyens de transport et l'évolution des mentalités.

L'invasion et la Commune revivent avec Bazille, Courbet et Victor Hugo. L'affaire Dreyfus avec Zola et Péguy. La grande guerre avec Alain Fournier et Apollinaire. La révolution russe et l'ascension de Hitler. Mais aussi le Titanic, les tragédies minières et les grèves ouvrières. Blériot, Nungesser et Coli puis Lindbergh.
Et, dans ce contexte, nous accompagnons Boudin, Degas, Flaubert, Hugo, Maupassant, mais aussi Paul Durand-Ruel et François Depeaux qui les firent connaitre dans l'ancien et le nouveau monde.

Cette fresque est intéressante, instructive, mais parfois laborieuse avec des chapitres non titrés qui s'étirent et se répètent. Cette oeuvre est plus proche des « choses vues » de Victor Hugo que d'un roman … car il n'y pas d'intrigue et le narrateur Charles Guillemet et les femmes qui l'entourent ne sont guère emphatiques.

Mais ce livre est une véritable mine d'or de citations extraites des correspondances ou des articles d'Aragon, Breton, Cendars, Clémenceau, Courbet, Degas, Hugo, Lorrain, Léger, Monet, Poughon, etc. qui montrent les évolutions de leurs pensées, voir leurs contradictions, au fil des mouvements de l'opinion publique dominante…

Regrettons enfin que l'éditeur n'ait pas relu sérieusement ce texte et laissé passer en page 363 une manifestation à « Barre-le-Duc » … de quoi faire sursauter Michel Bernard dont, à mon humble avis, « Les deux remords de Claude Monet » restent la plus merveilleuse évocation du grand artiste.
Commenter  J’apprécie          1008



Ont apprécié cette critique (95)voir plus




{* *}