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Critique de Pecosa


« Le monde entier est un théâtre, Et tous, hommes et femmes, n'en sont que les acteurs. Et notre vie durant nous jouons plusieurs rôles. » Ce n'est pas Graham Greene qui contredira son compatriote Shakespeare avec cette « comédie de moeurs » tragique qui a pour cadre l'Haïti de Papa Doc.

Une poignée d'Occidentaux qui ont lié connaissance durant la traversée jusqu'à Port-au-Prince se retrouvent à leur corps défendant acteurs d'un projet de coup d'état contre Duvalier père et sa cohorte de Macoutes sanguinaires.
Brown, propriétaire d'un hôtel jadis fréquenté par les expatriés (et calqué sur l'Hotel Oloffson, toujours existant, à l'architecture superbe) souhaiterait faire revivre son bien et surtout renouer avec sa maîtresse Martha Pineda, l'épouse allemande d'un ambassadeur uruguayen. Il rencontre les Smith, qui veulent créer un centre végétarien sur l'île afin de lutter à leur manière contre la violence endémique , ainsi que le Major Jones, un Britannique vétéran de la Birmanie.
Hélas pour Brown, le corps du ministre Philipot est découvert dans sa piscine. C'est alors que les trois coups sont donnés par Greene pour l'entrée en scène du neveu de Philipot, qui souhaite rejoindre les rebelles et qui convie Smith à une authentique et très politique cérémonie vaudou. Les dés sont jetés.

Etrange roman que ce récit apparemment désinvolte de la tragédie haïtienne, toile de fond et fond sonore qui pourtant finira par happer les personnages apparemment passifs, et qui jongle entre humour et passion amoureuse. Etrange stratagème que ce coup d'éclat révolutionnaire qui ressemblerait presque à une attaque au pistolet à eau contre les machettes des Macoutes, et les rebelles à des bravaches complètement inconscients.

Ecrit en 1966, Les Comédiens offre pourtant une vision lucide de la sanglante dictature du bon docteur Duvalier, dont le slogan, maintes fois aperçu par le narrateur dans les rues de la capitale assène « Je suis le drapeau haïtien, uni et indivisible. François Duvalier. » Smith, Jones, Brown, patronymes banals pour une sanglante pièce de théâtre dans laquelle Greene ne manque pas de critiquer au passage la mise sous tutelle de l'île par les Etats-Unis qui laissent pourrir Haïti, et qui n'interviendraient que si la rébellion prenait un tournant « cubain ».
Détesté par Duvalier, preuve qu'avec son humour et son élégance, Greene a fait mouche, le roman a été adapté par Peter Glenville en 1967 avec les amants terribles Liz Taylor et Richard Burton.
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