Une fois, Brynjolfur le psychiatre a essayé de me faire aller aux travaux manuels.
« Vous croyez vraiment, lui ai-je dit, que je me serais coupé l’oreille dans une vie antérieure, pour finir comme tricoteur de chaussettes à Kleppur ? […] Si j’étais une femme, dis-je, vous ne pourriez pas m’obliger à adhérer à une association féminine. Aux travaux manuels, j’ai l’impression d’être à une réunion d’association féminine. Et pourtant je ne suis pas une femme.
-Ce sont des conneries, dit Brynjolfur. Donnez-moi des raisons valables. »
[…] Je réfléchis un instant avant de dire : « L’homme a sept vies, autant que de jours dans la semaine. »
Brynjolfur : « Même si c’était vrai, est-ce une raison ?
-Oui, dans cette vie-ci, c’est dimanche. »
A présent, les signaux envoyés par les voisins m’atteignent.
Ils se servent d’un code et de tables d’écoute que mon frère Halli les a aidés à introduire dans la maison.
Non, je ne suis pas mort.
Je suis parti en mer. Je navigue sur la mer bleue dans les demeures du père. Le père relève les filets.
Non, cette tombe n’est pas assez profonde pour contenir nos sentiments à tous.
Vous, hommes et femmes qui avez sauté dans l’abîme.
Vous, jours pluvieux dont les pleurs ont ruisselé sur les vitres.
Dieu, quelle misère que ce chemin de croix ; comme il y a peu qui reste et comme ce qu’il y a est peu
Nous roulons par les nouveaux quartiers où il y a beaucoup de grandes maisons individuelles.
Maman montre du doigt l’une des maisons.
« Quelle drôle de couleur pour une maison, dit-elle.
-Oui, ça fait un drôle d’effet », dit papa.
Et moi, de la banquette arrière, je demande : « Vous êtes en train de vous foutre de moi, ou quoi ? »
Maman et papa se retournent, étonnés.
« Cette maison est de la même couleur que ma veste », dis-je, en guise d’explication.
Papa et maman se regardent.
C’est le silence.
J'impute l’intérêt pour la généalogie à l'absence d'arbre en Islande. Du fait de la rareté de la végétation, les gens s'adossent aux arbres généalogiques et se retrouvent des forêts d'ancêtres ...
Mais pendant que Dagný appartenait encore à la réalité où les gens mènent une vie saine et heureuse, je l'aimais tellement qu'elle est passée sur mon cœur comme une gomme et en a effacé toutes les autres filles.
Il est certain que je comprends aussi peu la réalité qu'elle ne me comprend. À cet égard, nous sommes quitte. Mais elle ne me doit aucune explication sur quoi que ce soit, tandis que moi, je suis censé lui rendre des comptes.
Je ne sais toujours pas pourquoi je n'ai pas réussi à progresser d'un pas plus assuré le long de cette pente glissante qu'on appelle la vie, ni pourquoi certains la traversent par une grand-rue en ligne droite, tandis que d'autres errent sans fin par des ruelles obscures.
Je ne sais toujours pas pourquoi je n'ai pas réussi à progresser d'un pas plus assuré le long de cette pente glissante qu'on appelle la vie, ni pourquoi certains la traversent par une grand-rue en ligne droite, tandis que d'autres errent sans fin par des ruelles obscures.