Sur fond de jeunesse désabusée, dans la France périphérique, voici un premier roman très prometteur, une autofiction écrite par
Pierre Guénard, un jeune écrivain, également leader du groupe de rock "Radio Elvis".
Le narrateur, cet anti-héros (20 ans) c'est Aurélien Moreau ; mais comme ses lunettes rondes et son visage poupin lui donnent des faux airs du célèbre apprenti sorcier, on l'appelle couramment Harry. Il vit en colocation à Poitiers et travaille pour survivre, le jour dans une entreprise de pompes funèbres et la nuit chez McDo. Depuis l'adolescence, avec ses copains, il rêve de réussir une carrière musicale. Un jour, il le sait, il fuira cet univers médiocre et il deviendra célèbre, sa musique sera diffusée sur les ondes et il sera interviewé à la télévision !
Mais pour le moment, son quotidien se partage entre les morts et la mal bouffe. Seul le costume diffère !
"Selon l'uniforme que je porte, je vends des burgers ou je viens chercher un corps, alors je me dis qu'on devrait inventer le Big Macchabée juste pour moi."
Le récit oscille entre présent et passé, suit ces jeunes pendant 10 années de leurs vies dans le village qu'ils habitaient à une heure de Poitiers, un lieu presqu'à la campagne où il ne se passe pas grand chose et où l'on s'ennuie. L'auteur décrit, avec humour et une certaine nostalgie, les adolescents désoeuvrés, le car scolaire, les bêtises de gosse, les premiers émois, les pulsions sexuelles qui s'affolent. Ils jouent à des jeux dangereux, fument, boivent, prennent des risques inconsidérés, se défoncent... et ça fait peur ! C'est le portrait d'une jeunesse désenchantée, sans grands repères ni ambitions, à un âge où l'on se cherche et où l'on essaie difficilement de se projeter dans l'âge adulte et dans un futur flou et incertain.
J'ai été touchée par le personnage d'Harry, mais j'ai trouvé ce roman sombre et dérangeant avec toutefois, heureusement, quelques lueurs d'espoir.
Pierre Guénard a un style d'écriture bien particulier, simple et familier voire cru et même trash, mais aussi sensible et poétique. J'ai beaucoup aimé son humour noir et sa dérision qui ajoutent au réalisme du récit. Par exemple :
"Autour de Poitiers on a arrêté de faire du colza et du tournesol pour cultiver des lotissements. C'est devenu plus rentable de loger les gens que de les nourrir..."
Quant au travail de croque-mort ou bien de thanatopracteur au funérarium, l'auteur le décrit froidement avec détachement ce qui peut mettre le lecteur mal à l'aise.
Malgré tout je conseille la lecture de roman.
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