Petit roman en trois parties pour trois soeurs, orphelines de mère, frappées par leur père, lequel s'en débarrasse bien vite au STO.
Au retour, chacune choisit/subit un destin qui est le reflet mêlé de sa personnalité et de la prédestination sociale. Clara se place comme bonne à tout faire chez des bourgeois plutôt sympas (seule entrave aux normes du récit misérabiliste), mais est rattrapée par le spectre de son avortement qui lui vaut quelques mois de prison ; Jacqueline, tuberculeuse, heureusement mariée à un homme amoureux, mais apprend à ses dépens que les belles-mères sont des vachardes, et que les jeunes hommes n'aiment pas longtemps les femmes malades, elle perd tout à la fois son mari, son indépendance, et la garde de son enfant. Louison devient fièrement une femme entretenue mais n'en souffre pas moins des affres d'une femme romantique et amoureuse d'un coureur négligent.
En tant que catalogue des misères faites aux femmes, dans ce contexte de précarité d'après la guerre, c'est assez réussi. Même Louison, qui est tentée par un acte de rébellion à découvrir, prend le risque de s'enfermer un peu plus dans l'aliénation.
Raymond Guérin fait le choix de donner la parole à chacune des trois femmes l'une après l'autre, dans son pauvre langage et ses pensées restreintes. le résultat est un ouvrage un peu distant, qui donne à voir sans s'apitoyer. Plus une parole militante qu'une réelle réussite romanesque.