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Critique de raton-liseur


J'ai découvert Louis Guilloux au détour d'une note de bas de page dans un autre livre, Besoin de mer, de Hervé Hamon, que je lisais dans ma petite chambre surchauffée alors que je vivais au Burundi, l'essence même du pays enclavé. Un auteur breton dont il est dit tant de bien, ami d'Albert Camus, qui est probablement mon auteur préféré ? Il fallait que je lise cela et, lors de mon passage suivant dans une librairie, j'ai acquis le Sang noir, son roman le plus célèbre. Ce fut une lecture merveilleuse. Sombre, âpre, mais superbe. Un éblouissement de lectrice, à tel point que je n'ose pas le relire, bien que j'en aies envie depuis un bon moment déjà.
Alors quand je suis passée chez Dialogues, la librairie indépendante de Brest aux dernières vacances et que j'ai vu ce livre sur une table discrète dans un petit renfoncement, je n'ai pas pu m'empêcher de le prendre, et j'en ai commencé la lecture sitôt mon livre en cours terminé.
Car L'Indésirable est en quelque sorte le brouillon du Sang noir. C'est le premier roman écrit par Louis Guilloux, mais il n'a pas trouvé d'éditeur et Guilloux, qui en aurait lui-même reconnu les lacunes, n'y est jamais revenu. C'est donc un écrit de jeunesse, jugé inabouti tant par l'auteur que par un éditeur qui est proposé ici. Et c'est pourquoi il ne serait pas judicieux d'aborder Louis Guilloux avec ce texte, dont, même moi lectrice novice, je peux percevoir les insuffisances même si je n'arrive pas toujours à les nommer.
Pourtant, pour qui a lu et a aimé le Sang noir, c'est une oeuvre très intéressante. On y retrouve effectivement les grands thèmes de l'oeuvre et les archétypes des personnages. Si le Sang noir est plus travaillé, plus profond, du moins dans mon souvenir, plus percutant aussi, on retrouve ici, dans un roman écrit dans l'immédiate après-guerre et qui s'inspire d'un fait divers de 1917, toute l'amertume et la désillusion de l'écrivain. Il avait tout juste vingt ans lorsqu'il écrivit L'Indésirable, mais il avait déjà une conscience aigue des bassesses dont l'âme humaine était capable, ces petites mesquineries lourdes de conséquence, ces recherches d'un dérisoire petit pouvoir personnel. A côté de cela, des personnages intègres, simples dans leurs valeurs et dans la façon de les vivre, parce que cela va de soi. Cela semble un peu manichéen lorsque je le dis ainsi, et ce n'est pas faire justice aux talents d'écrivain de Louis Guilloux, mais il faut reconnaître qu'il ne s'attarde guère aux subtilités des motivations de ses personnages. Par contre, il dépeint les états d'esprit et les cas de conscience des personnages qu'il aime avec une plume à la fois belle et précise qui me fait aimer à mon tour ces personnages avec lesquels je me sens toujours une immense empathie. Ses personnages ont les même tourments que moi, que ce soit dans cette oeuvre de jeunesse non aboutie mais qui m'a donné envie de me replonger dans son oeuvre ou dans des oeuvres de sa maturité comme le merveilleux Sang noir ou le très émouvant Coco perdu.
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