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Citations sur La chambre de la Stella (11)

On le regardait comme un Parisien, vaguement éméché (son oeil brillait un peu, il fallait le savoir), il évoquait son enfance avec un cousin Georges dont je ne sais rien d'autre, des chevauchées à cru sur de lourds percherons, un grand lit partagé, plus haut que large, étouffé d'édredons, des parties de pêche sans le moindre adulte à l'horizon, une moto Norton à transmission par courroie, comme la batteuse. Tout le monde autour de lui avait l'air d'en savoir plus long que lui mais on le laissait dire. Il semblait heureux, il semblait ailleurs.
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le lavoir était une fierté de Dun, on le vendait en cartes postales, alimenté par deux sources pures, l’une s’attardait de l’autre côté du chemin de terre dans une auge monolithique en forme de trèfle où s’abreuvaient les chevaux … avant de ruisseler vers le bassin du lavoir, l’autre jaillissait d ‘une fontaine sculptée en deux tombées d’eau parallèles qui crachaient la nuit, disait-on, des serpents monstrueux…
A l’année longue restait sur le talus une automobile immobile, une Renault beige au museau anguleux, une sorte de fourgonnette dont la partie utilitaire avait été consolidée de bois récupéré, ces croisillons épars dessinaient sur un côté une sorte de fenêtre, les pneus à plat se laissaient gagner par la végétation…
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Une barbiche,et peut-être une moustache, empêche d’y reconnaître tout ce qu’on cherche malgré soi dans les traits qu’il nous offre. Tête nue, le front haut, sans le moindre soupçon de calvitie, le cheveu blanc et court brossé vers l’arrière. Les paupières lourdes reposent sur un regard que la mauvaise définition de l’image n’autorise qu’à supposer doux et scrutant avec application un horizon lointain où il se voit déjà. Sa pommette est tendue par le plissement de l‘œil comme on regarde au travers de trop de lumière…
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Ce premier chapitre ne fait pas partie du livre. Les mots étaient déjà là, à cette place exacte sur la pile des pages blanches. Le papier libre n'existe pas, il est occupé, sous le joug d'une armée de fourmis noires, indomptables, increvables, elles roulent sous le talon comme de la grenaille, elles percent la page et reviennent s'y vautrer et vous dénoncent.
C'est de la mémoire morte, du vent monté du centre de la terre, et ses rejets de cendre. De lourdes cicatrices de douleurs anciennes. Ce ne sont pas des fourmis noires, de la mémoire morte, non, ce sont des fourmis rouges, de la mémoire vive, elles grouillent sur mes mains depuis le soir où mon père a dépendu le mort, le suicidé de l'avenue. Cela aussi, je voudrais l'effacer.
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Je ne me souviens pas si une photographie illustrait le livret militaire de mon grand-père. Mais cette image, qu'elle y fût ou non, je la vois. Dans la chambre de mes grands-parents, juste au-dessus de cette salle à manger, est encadré un portrait de ce grand-père jeune homme et déjà moustachu en uniforme de dragon, la poitrine luisante d'un corset d'acier invulnérable, et coiffé d'un casque brillant sous l'aigrette noire. Il pose pour une photo retouchée, l'air niais et serein de la joie enfantine du déguisement, trop vieux pour un Mardi gras costumé, trop jeune pour mourir à la Grande Guerre qui l'appelle.
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J'ai toujours connu la maison de Dun, et, aujourd'hui que mon père est mort, j'en suis devenu copropriétaire en indivision avec ma soeur Noëlle et ne la fréquente plus guère.
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passons sur les deux sandwiches à l'omelette ou je retrouvai le peu d'amour dont ma mère fut capable du temps que le papier d'aluminium était d'une modernité inaccessible, elle les enveloppait dans des torchons perdus d'avance. Le pain fendu fuyait et imbibait le tissu d'oeuf tiède et baveux..., et pourtant, si j'avais pu, ces sandwiches, je les aurais fait durer un trimestre comme uniques témoins d'une tendresse maternelle que j'espérais retrouver, que j'espérais qu'elle retrouve.
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on a dit que je faisais trop la comédie. On appelait comédie à peu près tout ce qui déplaisait, tout ce qui met les nerfs à nu, les cris, les refus, les désobéissances, les résistances, les appels au secours d'être né dans un monde invivable. Par délicatesse, on m'expédia donc dans une pension
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Mes parents m'ont mis en pension lorsque j'avais neuf ans. Ma mère surtout. Mon père rentrait bien trop tard de son travail pour s'occuper de ces choses. Cinq étages, il pleuvait parfois, il n'usait ni d'ascenseur, ni de parapluie, imperméable trempé, le front lavé de pluie, il essayait ses pieds longuement sur le paillasson, toussait, ouvrait la porte sans frapper, posait sa sacoche juste derrière la porte. Je n'ai jamais su exactement ce qu'il rapportait de l'usine, de vieux rapports ronéotés pour que nous dessinions derrière, et des morceaux de métaux légers, de ces métaux qui volent et dont on fait des avions. Il fumait la pipe, ça l'aidait à se taire. Lisait un journal de la veille que lui passait une voisine, il vivait sur une autre planète et n'était pas à un jour près pour prendre des nouvelles de la nôtre.
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Chaque maison cache un secret
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