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Critique de cecilestmartin


Un des romans qui m'a le plus accrochée ces dernières semaines. Julie d'Orsel est un magnifique personnage de roman, intelligent, sensible et sensuel, dont on comprend mal la passion pour un Dominique plutôt falot, emprunté et pas vraiment vif d'esprit…
Jacqueline Harpman – que je découvre à cette occasion – utilise ici un procédé littéraire qui m'a emballée : sa narratrice est un des personnages secondaires du « Dominique » d'Eugène Fromentin. Dès les premières lignes , Julie nous interpelle : « Il se peut que des lecteurs dociles à Dominique qui n'a regardé que ma soeur, Madeleine, ne m'aient pas remarqué : je suis au fond de la scène, toujours présente et toujours en colère. Je continue. Et je vais raconter ce que Dominique n'a pas su ou, s'il le savait, n'a pas dit ».
C'est ainsi qu'elle va nous conter l'histoire d'amour platonique, et fatale, que Madeleine sa soeur a vécu avec le jeune homme. Julie, dès la première rencontre, alors qu'elle n'est qu'une enfant, tombe amoureuse de Dominique, l'ami de son cousin germain Olivier. Dominique, lui, n'a d'yeux que pour Madeleine qui, les premières années, ne voit en lui qu'un adolescent maladroit. Pour son plus grand malheur, elle va accepter un mariage avec le Comte de Nièvre, un homme brutal qui fera son malheur. C'est plus tard qu'elle prendra conscience du trouble que fait naître Dominique chez elle mais, en épouse et femme conforme aux moeurs de son temps, elle luttera pour rester fidèle aux voeux prononcés.
Au-delà de l'histoire assez classique de Madeleine, jeune femme du XIXème siècle, soumise aux codes de la bonne société, le vrai coup de coeur c'est Julie d'Orsel. Celle-ci se rebelle très tôt contre le carcan imposé aux femmes : cela commence par le refus des bigoudis et du fer à friser et se poursuit par celui du mariage. Julie comprend très tôt que son amour restera secret, elle n'entend pas lutter pour ravir le coeur de Dominique à sa soeur, qu'elle aime infiniment. Dominique ne le regarde pas, ne la voit pas et elle fait le deuil d'une vie affective tant elle est sûre qu'aucun homme ne pourra rivaliser avec lui. Pour autant, ce qu'elle ne peut avoir, elle aimerait que Madeleine l'obtienne et elle pousse celle-ci à succomber à sa passion.
Julie d'Orsel, c'est aussi une jeune femme, qui entend bien profiter des plaisirs de la chair. Elle choisit comme amant son cousin Olivier, personnage très attachant lui aussi – orphelin qui trimballe un spleen que seules la fantaisie et la liberté de sa jeune cousine vient distraire. Couple romantique, un peu désespéré, ils incarnent la modernité par la volonté qu'ils ont de vivre selon leurs propres codes.
Un roman que je n'ai pas lâché avant de l'avoir terminé, souriant de la répartie de Julie, de ses audaces, émue par l'amour qu'elle porte à sa soeur et à son père qui l'amène à de gentilles intrigues pour qu'ils trouvent le bonheur alors qu'elle en a banni pour elle toute idée, de l'amitié amoureuse qu'elle entretient avec Olivier.
Harpman réussit une jolie mise en abyme, un roman aux parfums du XIXème mais très contemporain dans le style et qu'on quitte vraiment à grand peine.
Je ne suis pas sûre que ma critique rende hommage au plaisir que m'a procuré cette lecture et ça me désole un peu : dans tous les cas, ne passez pas à côté « Ce que Dominique n'a pas su », ce serait dommage.
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