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Critique de myrtigal


Voilà la biographie la plus touchante que j'ai jamais lue. Je ne m'attendais pas à être aussi bouleversée et émue lorsque j'ai ouvert ce livre.
Je voulais découvrir Vincent, le grand Vincent van Gogh, si proche et pourtant si loin, dont l'art m'a récemment beaucoup plu mais dont je ne connaissais de la vie que les grandes "lignes" que l'on connait tous et si souvent clichés ; "peintre maudits" "fou à l'oreille coupée" etc. David Haziot nous fait découvrir la vraie vie de Vincent. Une vie tumultueuse, au sens propre du terme : agitée, bruyante, compliquée. Car ici on a affaire à un être complexe, aux multiples facettes et au parcours de vie totalement singulier.

Vincent van Gogh nait en 1853 dans un petit village de Hollande au sein d'une famille très imprégnée de religion mais aussi de culture. C'est une famille plutôt unie et aimante, mais cela n'a pas empêché Vincent de se sentir toujours un peu décalé. Car Vincent, contrairement aux autres membres de la famille, va avoir le plus grand mal à trouver sa place et sa voie.
Comme le résume très bien un historien spécialiste de Vincent : "il a eu 37 adresses en 37 ans". Il aura vogué un nombre incalculable de fois. Son père et ses oncles l'ont longtemps aidé à chercher une carrière en le plaçant dans diverses écoles ou divers postes à travers la Hollande, l'Angleterre, la Belgique ou la France. Vincent aura été tantôt instituteur dans le Kent, tantôt prédicateur à Londres, tantôt galériste à La Haye, libraire à Dordrecht, évangéliste dans le Borinage…Bref il serait vain d'essayer d'être exhaustif tant il a parcouru de lieux (et de lieues) et tant il a fait d'allers-retours entre ses quatre pays. Ces errances et ces « échecs » répétitifs contribueront à l'isoler un peu plus de sa famille, mais aussi à le renfermer intérieurement. Mais malgré toute cette instabilité, il y a une chose, ou plutôt une personne dont la présence sera une constante sa vie durant : Théo, son frère. Aujourd'hui presque aussi connu que Vincent, Théo aura été le pilier de sa vie. Leur relation est l'une des plus bouleversantes que l'on puisse lire.
C'est d'ailleurs avec son aide qu'il trouvera enfin sa voie: la peinture. Et c'est aussi avec son aide, financière et morale, qu'il pourra la pratiquer. Et comme Théo a lui un emploi stable de galeriste à Paris, il baigne dans la sphère artistique de la capitale et permettra à Vincent de faire la rencontre de tous les peintres du moment. Mais même là tout ne se passera pas forcément bien; Vincent encore une fois, de part sa nature, est en décalage avec beaucoup d'entre eux. Lui qui avait caressé l'idée de créer une sorte d'association d'artiste il se heurtera aux égos et à la méfiance régnant dans ce milieu. Hormis quelques uns comme Bernard, Signac ou Pissaro avec qui il liera amitié et confiance.

Mais la rencontre artistique la plus tragiquement décisive sera bien évidemment celle avec Paul Gauguin. David Haziot en fera une véritable analyse chirurgicale passionnante et sidérante à la fois. La relation est si complexe que là aussi je ne pourrais la résumer ici. On dira simplement que Vincent vouait une admiration sans bornes, frisant la fixation, pour Gauguin, se plaçant volontairement dans une position d'infériorité, voire s'autoflagellant. Gauguin se montrera dur, froid, insensible et surtout extrêmement dédaigneux de l'art de Vincent. En lisant on comprend mal comment Vincent a pu persister dans une relation qui dès le départ était déséquilibrée et toxique, mais encore une fois sa fragilité mentale et son gigantesque manque de confiance en lui expliquent beaucoup. le mois qu'il passeront ensemble à Arles aura des conséquences psychologiques dramatiques sur Vincent. Ce sera en quelque sorte le point de rupture d'une fragilité mentale déjà prépondérante.
La crise qui s'en suivra l'amènera à se faire interner pendant plus d'un mois… Après cela Théo voudra le rapprocher de lui et lui trouvera un joli village proche de Paris du nom d'Auvers-sur-oise…

David Haziot livre ici une biographie que j'ai trouvé excellente et passionnante, mais aussi singulière. Avant de lire j'ai vu que David Haziot était d'abord philosophe de formation, ce qui explique beaucoup de la forte acuité à la fois psychologique et philosophie du livre. Au début j'en ai été un peu déboussolée puis peu à peu j'ai compris que c'était effectivement nécéssaire pour comprendre une personnalité telle que Vincent. Et aussi pour donner une idée, au plus proche du réel possible, de sa maladie mentale. D'ailleurs celle-ci a durant longtemps, nous apprend l'auteur, été l'objet d'études et d'analyse par d'éminents psychiatres ou spécialistes, mais que sans la présence du patient le diagnostic est nécessairement imprécis... Vincent souffrait, il est certain, de dépressions, de crises, de névroses, et selon l'auteur fortement accentués par l'état de tension physique et psychologique dans lequel il se trouvait la plupart du temps (de part l'exigence de son art et la rudesse de son mode de vie).
À côté de l'analyse psychologique, l'auteur nous livre aussi une analyse picturale des oeuvres de Vincent, car c'est là aussi une facette capitale de la compréhension de sa personne.

Mais s'il faut retenir quelque chose de Vincent c'est qu'il avait de la joie. Qu'il aimait les couleurs vives (surtout le jaune), il aimait le grand air, il avait une grande volonté de vie. C'était un être qui luttait en permanence avec sa maladie et qui avait énormément de courage de le faire. le courage de tenir bon, le courage de trouver comment aller mieux, le courage de « travailler » comme il le disait de sa peinture. Un homme qui s'est battu pour essayer de vivre de sa passion, de vivre tout court. Vincent est exactement comme une palette de peinture: de toutes les couleurs et de toutes les nuances. Coloré.
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