On ne pouvait se soustraire aux merveilleux chants des oiseaux. Tout un monde sauvage, joyeux et vibrant, qui se moquait bien de la folie des hommes et du désespoir inhérent à leurs vies encombrées d'ambitions insensées et de préjugés néfastes.
La beauté des Thaïlandaises séduisait la plupart des Occidentaux. Mais ils ne les prenaient jamais pour épouses et répétaient à qui voulait l'entendre une légende selon laquelle ces belles jeunes filles n'avaient en tête que de plumer leurs conquêtes. Ils se trompaient en tout. Sans même parler d'argent, ces jeunes filles intelligentes savaient qu'il était préférable d'avoir plusieurs amants. Le modèle judéo-chrétien n'avait pas corrompu la société siamoise. Les dieux ici n'avaient pas été cloués sur la croix. On préférait les voir danser, rire et bander, entourés de joyeuses concubines avec de gros seins. Il n'y avait que les Occidentaux, et leur terrible assurance de ce qu'ils ne sont pas, pour imaginer qu'un mariage, ou tout du moins une vie de couple officiellement établie, représentait pour ces femmes un avenir acceptable.
"Il s'agit d'une histoire vraie, dont certains passages ont été romancés. Car la vie, dans ce qu'elle a de plus brutal, doit pouvoir, pour rester supportable, accepter de faire appel à la fiction et à l'imaginaire."
Rien n'était plus puéril qu'une guerre.
La démocratie américaine ne fonctionnait plus que sur le cours du dollar et l'opinion publique, qu'il fallait savoir contrôler. Jim l'avait compris lui aussi et ils partageaient tous deux cette même vision des choses. Une de leurs dernières conversations avait porté sur les chars M41, alors qu'ils étaient inadaptés à la jungle du Vietnam, l'état-major en commandait. Chacun savait que cela dopait l'économie et permettait la réélection des sénateurs, qui voulaient maintenir l'emploi dans leur région. On envoyait des enfants à peine sortis du lycée se faire tuer ou tuer d'autres enfants au bout du monde afin que leurs pères aux États-Unis conservent leur boulot et continuent à payer les traites d'une maison qui n'appartiendrait jamais qu'à leur banque.