La position de juge n’était pas différente. Un procès se terminait toujours par le désespoir, le malheur, l’amertume d’une des deux parties. Le juge n’était consid éré comme un ami que par la partie victorieuse.
— Les règles n’existent pas pour rien…
— Pour que tu puisses les contourner et laisser ce pervers s’en tirer, après ce qu’il a fait à ces gens. Le laisser dans la nature pour qu’il puisse violer et assassiner la famille de quelqu’un d’autre ?
La vie de tous les jours défilait sous ses yeux, songea-t-il. Les gens étaient absorbés par leurs petits drames, ignorant que la femme sur le banc public devant laquelle ils passaient était en réalité l’homme le plus recherché de la ville. Peut-être de tout le pays.
Ce n’était pas la première fois de sa carrière que Carey avait besoin de la protection de la police. Sa vie avait été menacée à plusieurs reprises lorsqu’elle était procureur et s’occupait des meurtres de gangs. On se faisait rarement des amis en affrontant des criminels de gangs et leurs avocats véreux.
L’arrestation la plus importante de sa carrière venait d’être réduite à néant à cause de la bêtise et la négligence de quelques-uns. Le Mal avait été relâché, il se trouvait libre de ses mouvements au sein de la communauté. Les bonnes gens et leurs enfants étaient en danger.
Pour les mecs, la vie ne consistait qu’en un concours permanent de celui qui pissait le plus loin. C’était vraiment à se demander pourquoi les femmes ne prenaient pas le pouvoir sur le monde pendant que les hommes essayaient de se prouver qui avait la plus grosse.
Je déteste les journalistes, remarqua Liska. On a toujours l’impression d’expliquer à un groupe d’enfants de quatre ans pourquoi le ciel est bleu.
Il avait une cellule pour lui tout seul, parmi celles sous surveillance pour prévenir les suicides. Quand bien même, il ne se sentait pas en sécurité. La prison était seulement censée protéger les gens normaux des criminels. À l’intérieur, tout le monde se foutait qu’un homme vive ou meure, surtout quand il s’agissait de quelqu’un comme Karl.
Il avait déjà séjourné en prison. Plusieurs fois. C’était le genre d’endroit où il valait mieux ne pas attirer l’attention. Surtout les hommes avec certains penchants. Après sa première expérience violente, il avait réussi à rester plus ou moins à l’écart du danger la fois suivante, puis encore la suivante. Mais il ne pouvait être anonyme cette fois.
Cette fois, tout le monde dans la prison savait qui il était et ce dont on l’accusait. Tout le monde ici le détestait. Les gardiens comme les criminels endurcis le haïssaient assez pour avoir envie de lui faire du mal, de le tuer. Les autres détenus lui crachaient dessus dès qu’ils en avaient l’occasion. Certains criaient des menaces. On lui avait fait clairement comprendre que, s’il tombait entre les mains de la population carcérale, il n’en ressortirait pas vivant.
Le bien et le mal n’entrent pas en compte. C’est une affaire de règles, d’équité, il faut s’assurer que personne ne fonde son opinion sur le seul bon sens.