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Critique de magalette


C'était LE livre à avoir lu d'Anna Hope dont j'avais précédemment découvert la jolie plume avec « La salle de bal » et « Nos espérances ». Un titre tout à la fois évocateur autant qu'énigmatique et qui va faire entendre à travers trois personnages de femmes les sanglots douloureux infligés par la première guerre mondiale à la dizaine de millions de foyers qui pleureront un fils, un père, un mari. Aucune légèreté dans ce récit, chaque personnage s'y présente engoncé dans son chagrin mêlé de culpabilité et de regrets. Chacune des trois femmes traîne au fil des chapitres ce lourd jupon plombé, trempé dans le sang des innocents morts au combat et imbibé du « chagrin des vivants ». le récit s'ouvre sur les préparatifs militaires liés à l'organisation de la cérémonie d'inhumation officielle du soldat inconnu à Westminster Abbey pour la commémoration de l'Armistice. Peu significative au départ, elle va prendre tout son sens quand elle réunira à Londres autour d'un cercueil drapé dans les couleurs du drapeau, toutes ces familles en deuil qui pour la plupart n'avaient pas encore pu enterrer leurs morts. Anna Hope va raconter les quelques jours précédents cette cérémonie qui va réunir ces trois destinées de femmes. Tout d'abord, Evelyne, vieille fille aigrie, la trentaine, qui semble régler ses comptes avec l'Armée en exerçant un emploi au bureau des pensions attribuées aux invalides. La guerre lui a volé tous ses projets de bonheur en lui prenant son fiancé. Elle tente de survivre, le coeur alourdi par la perte et l'amertume. Ada, la cinquantaine, n'avance plus. Son regard dérive sans cesse vers le passé et les souvenirs d'avant. Quand son fils était encore là et pas étendu quelque part dans un champ en pays inconnu. Quand son mariage avait encore un sens et son foyer une âme. La douleur de la perte est ravivée chez Ada par la visite d'un représentant, ancien soldat qui laisse échapper le prénom du fils disparu. A-t-elle rêvé trop fort encore une fois ? Comment abandonner tout espoir quand on n'a pas pu ensevelir le corps du cher disparu ? Enfin, la jeune Hettie, danseuse de compagnie, va croiser le chemin d'un sombre mais élégant capitaine revenu vivant de l'enfer mais hanté à jamais par le bruit des combats. Comment vivre la naissance d'un amour quand on a vu toute l'humanité broyée et foulée dans la boue d'un champ de bataille ? Un roman étendard comme un écho des milliers de douleurs de chaque mère, soeur, fille ou amoureuse se réveillant pantelante de nuits agitées recouvertes du voile de leur deuil. Un récit habile et finement construit où le fil qui brode ces trois destinées va venir refermer les plaies et tisser son motif. Un roman qui parle d'un sujet mille fois traité mais avec un angle intéressant – celui de la mémoire des femmes impuissantes à guérir et à soigner – qui n'avait – je pense – encore jamais été abordé.
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