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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Au coeur d'une actualité littéraire en constant déséquilibre où l'on évoque sans grande surprise et avec une belle constance les romans destinés à cartonner comme c'est le cas actuellement avec la reine du polar français, il serait pourtant dommage de passer à côté d'un indéfinissable et brillant roman tel que Bagdad, La Grande Evasion, de Saad Z. Hossain. Un récit qui se déroule à Bagdad durant la guerre du Golfe, un auteur originaire du Bangladesh, une fois encore, c'est la maison d'édition Agullo qui nous propose une texte qui sort résolument de l'ordinaire en poursuivant ainsi sa démarche visant à nous faire entendre la voix d'auteurs provenant d'autres horizons afin de nous faire partager leurs cultures et leurs perceptions du monde qui nous entoure.

En 2004, on survit comme on peut à Bagdad. La ville, occupée par les forces de la Coalition, est également aux mains des différentes factions qui se partagent les quartiers dans un équilibre précaire. Tirs de missiles, ripostes à l'arme automatique, engins explosifs, la cité devient un véritable piège pour Dagr et Kinza qui sont désormais en quête d'un trésor enterré dans le désert comme le prétend Hamid. Mais peut-on faire confiance à cet ancien tortionnaire du régime qui veut sauver sa peau? Peu importe, les trois compères doivent prendre la route en comptant sur l'aide d'un GI un peu barré. Mais rien n'est simple à Bagdad, d'autant plus qu'il faut se soustraire à la vengeance d'une imam sanguinaire tout en s'extirpant d'un conflit millénaire ayant pour origine une antique légende druze dont les secrets sont peut-être dissimulés dans les rouages de cette montre étrange qui ne donne pas l'heure. Pourtant le temps est compté.

Pamphlet visant à dénoncer une guerre aussi vaine qu'absurde avec ces forces US en quête d'armes de destruction massive qui paraissent inexistantes, Saad Z. Hossain emploie un ton emprunt d'un humour corrosif qui permet d'appréhender toute l'aberration d'un système qui s'effondre dans une succession de combats meurtriers qu'il dépeint dans des scènes d'un réalisme extrêmement violent. Précis, documenté, l'auteur parvient également à vulgariser la complexité des différentes milices et factions qui composent la diaspora occupant la capitale irakienne en mettant en exergue ce gigantesque entrelacs de rues et de ruelles qui deviennent une véritable toile d'araignée où sont piégés les différents personnages d'un roman qui oscille entre le récit de guerre et d'aventure. Qu'ils soient irakiens ou américains les protagonistes se croisent dans une succession d'événements trépidants, parfois burlesques qui donnent à l'histoire un rythme effréné qui ne manque jamais de souffle.

Mais Saad Z. Hossain, ne se contente pas de dépeindre une ville ravagée par les multiples affrontements pour souligner, au travers d'une vieille légende issue de la communauté druze, tous les aspects culturels que dissimulent les stigmates de cette cité de la Mésopotamie qui porte en elle plusieurs siècles d'histoires. le récit devient ainsi un magnifique conte érudit où les légendes côtoient des quêtes éternelles qui trouveront quelques épilogues burlesques dans une série de confrontations explosives où les comptes se règlent sur une somme d'actions époustouflantes et originales.

Opérant ainsi sur des registres variés, Bagdad, La Grande Evasion emporte le lecteur dans une atmosphère surchauffée et survoltée pour croiser les destins d'une galerie de personnages hauts en couleur qui portent en eux tous les antagonismes d'une ville livrée à elle-même qui s'est débarrassée des carcans d'une dictature oppressante pour décompenser dans la fureur de conflits quotidiens où les alliances les plus surréalistes prennent le pas sur la raison. D'ailleurs il n'y a rien de raisonnable dans ce récit riche en excès où l'émotion côtoie l'humour grinçant et les considérations philosophiques s'enchaînant sur des scènes d'actions déjantées. Bagdad, La Grande Evasion est roman que l'on peut considérer comme un ovni littéraire tout simplement extraordinaire. Une grande réussite. Indispensable.



Saad Z. Hossain : Bagdad, La Grande Evasion (Escape From Baghdad). Editions Agullo 2017. Traduit de l'anglais (Bangladesh) par Jean-François le Ruyet.

A lire en écoutant : Good Thing de Fine Young Cannibals. Album : The Raw & The Cooked. 1989 London/Sire Records.
Lien : http://monromannoiretbienser..
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Disons-le tout de suite, cela faisait longtemps que l'on n'avait pas lu un livre aussi échevelé, tordant et, par-dessus le marché, intelligent.
Cela commence pourtant comme une grosse farce s'ouvrant dans le Bagdad post-invasion américaine de 2003. Une ville dans laquelle règne l'anarchie la plus totale comme le montre la scène d'ouverture qui voit les deux anti-héros du roman, Dagr et Kinza, discuter du sort de leur prisonnier en énumérant les multiples milices auxquelles ils pourraient le livrer et celles qu'ils feraient mieux d'éviter. C'est d'ailleurs l'occasion de mieux faire la connaissance de Dagr, professeur d'économie au chômage technique reconverti dans le marché noir avec les soldats américains, et Kinza, brûlant de haine pour tout le monde, y compris pour lui-même, comme le lui rappelle son partenaire :
« Tu es un pur produit de ton espèce. Un défaitiste qui n'a besoin de personne pour se haïr (…). Tu détestes tout le monde : les sunnites pour le meurtre d'Hassan, les chiites pour avoir brisé la communauté des croyants, les Américains pour leur côté indécrottable, les Palestiniens parce qu'ils font la manche, les Saoudiens pour leur lâcheté. Et au final, tu pisses sur ce que te dicte ta raison, à savoir ton intérêt personnel ».
De l'autre côté, il y a Hoffman, soldat américain bête à manger du foin mais porté malgré tout par une sorte d'intelligence situationnelle qui l'aide à se tirer des pires situations – au détriment toutefois de ceux qui ont le malheur de l'accompagner.
Convaincus par leur prisonnier, Hamid, tortionnaire émargeant auprès de la Garde républicaine de Saddam avant que celui-ci ne se fasse la malle, qu'ils pourraient mettre la main sur un trésor dissimulé à Mossoul, Dagr et Kinza comptent bien, avec l'aide d'un Hoffman en quête d'armes de destruction massive, mettre les voiles et quitter l'asile à ciel ouvert qu'est devenue leur ville.
C'est à partir de là que leur histoire va prendre petit à petit la forme d'un étrange cocktail de roman d'aventures, d'épopée homérique ou de roman arthurien et de conte philosophique. Amenés à tenter de neutraliser pour le compte de la communauté d'un quartier dans lequel ils sont réfugiés, un tueur en série auquel la rumeur populaire prête des pouvoirs fantastiques, ces pieds nickelés vont se trouver aux prises avec des miliciens intégristes, des savants fous, une secte islamique secrète, des alchimistes et peut-être même des djinns et des divinités grecques.
Car si l'on est dans les années 2000 et que le monde est singulièrement agité, Bagdad est assise sur plus de mille ans d'histoire ; une histoire qui n'a pas dit son dernier mot mais qui commence à singulièrement désespérer des humains.
Difficile d'en dire plus sur l'intrigue sans raconter le livre. Mais on peut saluer la manière dont Saad Z. Hussain arrive à conjuguer humour noir, érudition et réflexion sur le sens de l'histoire, mais aussi son art consommé du contrepied, qui le voit couper les moments les plus tragiques à l'aide de dialogues délirants ou grossiers, les scènes d'actions par d'inattendus moments de tendresse ou les envolées philosophiques par des retours brutaux à une réalité on ne peut plus prosaïque.
Tout cela fait de Bagdad, la grande évasion ! un roman unique, totalement fou et pourtant d'une rare lucidité.
« C'est la guerre. On vous tue. Vous nous tuez. Qui ça dérange ? L'important, c'est de le prendre avec le sens de l'humour. »

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Ce roman est un vrai régal ! Rien qu'en lisant la quatrième de couverture, j'ai su que ce serait un coup de coeur – et la recommandation de mon libraire n'a fait que renforcer cette conviction. Transportée dans le Bagdad des années 2000, au coeur d'un conflit que je n'ai jamais vraiment compris, j'ai savouré avec délectation les aventures de Kinza, Dagr, Hamid et Hoffman, anti-héros de haut vol qui n'ont pas arrêté de me surprendre. Repérés par l'armée américaine pour leurs trafics d'armes et autres objets indispensables en temps de guerre, ils sont forcés de fuir la capitale, emportant dans leurs bagages leur dernière trouvaille : un ancien tortionnaire somme toute assez sympathique. Ce qui ne s'annonçait déjà pas comme une promenade de santé part complètement en cacahuète – pour notre plus grand plaisir !

Quelle découverte que ce Saad Z. Hossain, qui signe ici son premier roman ! Cet auteur réussi l'exploit formidable d'arriver à nous rendre plus ou moins intelligible ce conflit d'une complexité rare, tout en nous offrant un spectacle digne des meilleurs westerns d'Hollywood. On y retrouve aussi une once de secrets historico-scientifico-religieux dans une quête qui n'est pas sans rappeler celle du Da Vinci Code, ce qui apporte une dimension universelle à ce roman déjà suffisamment riche pour plaire au plus grand nombre. Ajoutez-y une petite dose de philosophie sur la vie, la fraternité et la religion, et vous aurez le combo gagnant proposé ici par Saad Z. Hossain !

Pourquoi l'avoir classé dans la catégorie SF ? C'est un mystère que je ne m'explique pas, il faut croire que ce livre était trop inclassable pour être mis dans une seule case. C'est en tout cas un des meilleurs romans que j'ai lu récemment, à la fois drôle, édifiant et palpitant – que demander de plus d'un livre ? Il va sans dire que je vais suivre cet auteur de très près et que je me ferais une joie de lire prochainement son second roman, Djinn City.
Lien : https://theunamedbookshelf.c..
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"Prenez une ville ravagée par la guerre : Bagdad, 2004. Prenez deux types ordinaires qui tentent de survivre ; ajoutez un ex-tortionnaire qui veut sauver sa peau, un trésor enfoui dans le désert, un GI bouffon mais pas si con.

Incorporez un fanatique religieux psychopathe, un alchimiste mégalo, une Furie et le gardien d'un secret druze.

Versez une enquête millénaire dans un chaos meurtrier chauffé à blanc ; relevez avec sunnites, chiites, mercenaires divers et armée américaine. Assaisonnez de dialogues sarcastiques et servez avec une bonne dose d'absurde." (4ème de couverture)

Pourquoi se priver d'un tel résumé pour écrire le mien qui ne serait pas à la hauteur ? Et puis, franchement, c'est parfois tellement délirant que se raccrocher à un résumé fait maison permet de revenir sur terre. En effet, pour être totalement honnête, je me dois de dire que je n'ai pas toujours tout compris dans ce bouquin. Il y a beaucoup de personnages qui se poursuivent se cherchent, se combattent, s'entraident ; ils sont tous ennemis, mais parfois alliés dans la lutte contre l'un d'entre eux... Et pour couronner le tout, Saad Z. Hossain distille les informations qui nous permettent de bien comprendre son intrigue au fil des pages, petit à petit. Au départ, je fus donc un peu perdu, puis les explications arrivent partiellement mais sûrement. C'est diablement futé de la part du romancier qui nous embarque gentiment et furieusement dans son univers. Car, malgré tout ce que je viens de dire, jamais l'envie de quitter Bagdad et ce roman ne m'a effleurée. le rythme est tellement enlevé, les dialogues tellement frappants, drôles et décalés, les personnages tellement énervés, désespérés, prêts à tout pour défendre leur cause, le contexte tellement fort et puissant, l'ensemble frôlant l'absurde, que pour rien au monde je n'aurais abandonné ce livre. Au contraire, une prodigieuse envie de connaître l'issue de toute l'aventure s'est introduite en moi -rien de sale, ni de pornographique, je rassure mes lecteurs- dès le début sans me lâcher. J'ai pris une claque tout du long. L'auteur ne se refuse rien ni de parler d'amitié, d'amour, de mort, de vengeance, de croyance mystérieuse, de religion, d'intolérance, de peur, de haine, de l'envie du pouvoir qui amène à toutes les compromissions (cf. certains de nos candidats) à toutes les veuleries, ni de délirer totalement, ou de placer dans cette guerre des personnages très étonnants voire surnaturels.

C'est un roman violent qui se déroule dans une ville en guerre et en ruines. Tous les protagonistes sont devenus durs mais pas insensibles, violents. Il y a de grandes scènes assez terribles, toujours contrebalancées par des situations comiques, absurdes, des dialogues drôles, parmi eux, le suivant :

"T'es gay Tommy ?

- Pas du tout Hoff. J'aime les femmes. Tu te souviens de ce bar de danseuses où on est allés, là où j'ai descendu la stripteaseuse dans son habit de bonne soeur ?

- Euh, fit Hoffman. Ce n'était pas un bar à danseuses, Tommy. Loin de là. Comment je le sais ? Il n'y a pas un seul club de strip dans tout Bagdad. Et il ne s'agissait pas non plus d'un costume de nonne. Mais d'un hijab. Et, pour finir, Tommy, ce n'était pas une stripteaseuse. Mais alors, pas du tout." (p.73)

Un grand moment de littérature, un de ceux qui restent en mémoire longtemps pour tout ce qui y est excessif. Un roman fou, foisonnant, des idées à chaque page. Un premier roman d'un auteur et journaliste bengali (du Bangladesh) dont je me demande bien d'abord s'il a l'esprit sain mais surtout si son second roman -et les autres- sera aussi barré. Merci aux éditions Agullo pour cette découverte -une de plus à leur actif- et pour la traduction de JF le Ruyet, du travail d'orfèvre !
Lien : http://www.lyvres.fr/
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Un ton à part pour un livre qui se révèle très vite à part lui aussi !
L'auteur se joue des genres et des conventions pour mieux entrainer les lecteurs sur des fausses pistes et lorsqu'on raccroche les wagons... C'est une franche réussite !
Agullo avait eu le nez creux en misant sur cette découverte.
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Quelle merveilleuse découverte !!
On m'avait dit « ça va devenir un roman culte », on m'avait dit « faut lire celui-là ».
La 4ème de couverture m'avait déjà séduite…
Ce roman est un superbe roman d'aventure et cette course au trésor est passionnante.
On apprend une multitude de choses concernant les croyances de ce peuple Irakien, concernant les sciences (génétique, mathématiques, alchimie).
C'est aussi une très belle aventure humaine. L'auteur nous parle de cette époque pas si lointaine et dont les cicatrices saignent encore. de ces familles rayées de la surface de la terre. de la guerre interne aussi avec son lot de trahison, délation ou petites vengeances personnelles.
C'est également un roman très drôle. Certains passages sont vraiment jubilatoires.
Sans parler des personnages, tous tellement atypiques !
Dagr, ancien professeur, dont la femme et la fille ont été tuées et qui n'a plus rien à perdre. Un homme loyal envers ses amis.
Kinza, une brute assoiffée de vengeance qui ne jure que par la torture et l'exécution.
Hoffman, le Marines, pas très futé mais courageux qui n'hésitera pas à aider son ami Dagr, aidé de Tommy, encore moins futé que son chef.
Hassan Salemi qui lance ses hommes contre la fine équipe pour venger son fils, tué par Kinza.
Et encore pléthore de personnages tous passionnants.
L'écriture est savoureuse et totalement addictive.
En bref, un roman jubilatoire, passionnant, que j'ai dévoré et qui, j'en suis sûre vous plaira.
Plus qu'une pépite, un diamant à l'état brut et, sans conteste possible, un roman culte !

Lien : http://www.evadez-moi.com/ar..
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