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Critique de lebelier


Spécialiste de Huysmans, François est un universitaire reconnu dans la France de 2022, France dans laquelle le pouvoir pourrait bien basculer. Les élections de mai 2022 laissent le choix entre le Front National et la « Fraternité Musulmane ». On entre dès lors dans un roman de politique-fiction.
Tout au long du roman, notre héros se pose des questions métaphysiques sur lui et le monde, ses relations avec les autres, et notamment son amie juive qui part avec ses parents en Israël, fuyant un régime qui leur est apriori hostile et qui est une des solutions possibles. Car le narrateur est un homme solitaire, brillant mais seul et nous retrouvons ce thème cher à Houellebecq de l'ultra moderne solitude. Ses relations avec les femmes sont plus qu'éphémères, étudiantes qui admirent le grand maître. Mais elles mûrissent et :
« À l'issue des vacances d'été, au début donc de la nouvelle année universitaire, la relation prenait fin, presque toujours à l'initiative des filles. Elles avaient « vécu quelque chose » au cours de l'été, telle était l'explication qu'elles me donnaient, le plus souvent sans précision complémentaire ; certaines, moins soucieuses sans doute de me ménager, me précisaient qu'elles avaient « rencontré quelqu'un ». Oui, et alors ? Moi aussi j'étais « quelqu'un ».
Tout ça pour montrer que les femmes étant un problème, elles partent ou le quittent, le régime à venir va y mettre bon ordre. Car les idées exprimées sont ce qu'il est convenu d'appeler ultra réactionnaires : tout en en vantant les mérites, le narrateur expose le régime proposé par le nouveau Président de la République : il est autoritaire vis-à-vis des femmes qui sont les premières à subir la soumission : voiles, confinement au foyer avec interdiction de travailler, mariages arrangés avec des hommes ayant plusieurs épouses. François se pose des questions lorsqu'il s'agit pour de réintégrer le système : soit il reste en retraite avec un traitement confortable, soit il continue à la Sorbonne à dispenser ses cours mais en se convertissant à l'Islam avec un salaire trois fois plus élevé et permission d'avoir trois épouses. Pour un grand solitaire dépressif, c'est tentant. On ne dira pas la fin mais le mode utilisé par l'auteur élargit le champ des possibles.
Avec Houellebecq, c'est un peu comme avec Céline : la tentation est grande de confondre auteur et narrateur. Pour ma part, le fait que Houellebecq, frappé par la mort de son ami Bernard Maris ait refusé de faire la promo de son livre, ne me laisse pas de doutes. En revanche, l'auteur est un grand sujet de discussions et de polémiques au sein même du cercle de famille. Encore une fois, il faudrait préciser que c'est une fiction. Certes on sent très bien par exemple, dans les films de Clint Eastwood que l'homme est un vieux républicain de l'auto-défense. À la fin du livre, l'auteur remercie l'aide qu'une amie lui a apporté sur les arcanes du milieu universitaire qu'il n'a jamais fréquenté. Si besoin était, voilà un avertissement.
Quant au style, c'est un bon style narratif quand il s'agit de raconter les aventures et pensées du héros avec juste ce qu'il faut de quotidien et de sexe mais les démonstrations sociologiques de l'ami des services secrets, sont parfois indigestes, ami qui reconnait dans le roman lui-même, d'avoir parlé « un peu longtemps.» Les démonstrations politiques et sociétales sont en général, assez lourdes et, Dieu merci (si j'ose dire), peu convaincantes pour le lecteur. Un assez bon cru néanmoins.
Plus intéressants sont les informations et parallèles avec Huysmans et notamment le fameux « À rebours » que le narrateur spécialiste insèrent puisqu'il a l'air de l'avoir choisi pour mentor au-delà du temps et ce qui lui permet de comparer deux époques bien distinctes et d'insérer quelques visions poétiques.
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