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Critique de Meps


Quatre mois sans critique Babelio publiée, quatre mois sans quasiment passer sur le site. La dernière critique donne en elle-même une explication de cette traversée de désert littéraire. Étant arrivé à l'oasis, je vous fais donc un point d'étape… qui j'espère sera un nouveau départ.

Je vais arrêter de dire que je rechigne à parler de ma vie personnelle, puisque je vais encore un peu m'égarer, mais toujours parce que le contexte de lecture a ici aussi toute son importance. Ce livre de Victor Hugo est le dernier livre que j'ai offert à ma mère et qu'elle n'aura que si peu commencé (à en croire le marque-page), sa maladie étant celle qui est le frein le plus important pour la lecture. Il était malgré tout longtemps resté sur sa table de chevet, preuve que l'envie ne manquait pas. C'est aussi (logiquement ?) le livre que j'ai choisi de lui lire dans ses derniers instants, lien tout particulier qui m'a (nous a ?) permis de traverser ces moments, bien balloté comme l'ourque du début du roman, mais, tout comme l'équipage, ensemble. Je me devais bien évidemment de finir cette lecture pour continuer ce lien, physiquement rompu, mais, la littérature ayant ce pouvoir magique, malgré tout maintenu, quelles que soient nos croyances. Me voilà donc ici pour vous en parler, après un voyage de plus de 700 pages.

Le contexte de lecture a une importance, mais pour ce livre le contexte d'écriture en a tout autant sinon plus. Vécu comme le premier tome d'une trilogie qui n'aura jamais de tome deux…. mais bien un tome trois (Quatre-vingt treize), ce roman est celui où Hugo se propose d'étudier la Seigneurie, en s'intéressant à celle des Anglais. Pensez-vous que le fait qu'il vive en exil depuis le coup d'état de 1851 de Napoléon III, que ce soit les îles anglo-normandes qui lui aient offert un refuge si proche et si lointain de sa terre française ait eu un effet sur la rédaction de cet Homme qui rit (jaune…), commencée en 1866 ? La réponse est évidemment dans la question. Après l'achèvement du projet des Misérables (déjà en ébauche depuis 1845), en 1861, après un roman nourri de sa situation d'ilien (Les Travailleurs de la Mer), Hugo se lance dans un projet qu'il veut au départ historique.

Le projet deviendra ensuite polymorphe, philosophico-dramatico-lyrico-onirico… (ajoutez tous les mots en -co qui vous passent par la tête), bref un objet littéraire assez fou, très hugolien car éminemment poétique et politique. A la lecture, je me suis parfois dit qu'Hugo avait voulu aller plus loin dans l'horreur que dans les Misérables, poussant le curseur plus loin, de façon plus désabusée, la vieillesse et la sagesse étant venues contrebalancer les idéaux de la jeunesse. Certaines scènes sont vraiment éprouvantes, on souffre avec les protagonistes. Un vrai monument littéraire en tout cas, dont l'abord plus compliqué a sans doute nui à la notoriété.

Ou alors, est-ce un autre contexte, celui de sortie du livre qui a joué ici un rôle déterminant. Hugo est loin de France, son éditeur profite de cet éloignement pour échafauder des combines de vente afin de profiter au mieux de la notoriété de l'exilé pour faire du profit. Les critiques pleuvent après des fuites de premières pages avant même la publication, Hugo semble pour certains un homme à abattre. Malgré toutes ces difficultés, l'oeuvre connait une postérité impressionnante…. Notamment quand on sait que le fameux Joker, ennemi de Batman, trouve sa source dans l'adaptation cinématographique de l'oeuvre en 1928.

Je terminerais avec une évocation de la fin du roman, sans volonté de divulgachage. le regard porté sur la mort y est très particulier, rempli de spiritualité.Quand on sait qu'Hugo a hésité longtemps entre plusieurs fins possibles, qu'il a connu une succession de deuils familiaux dans ces années d'écriture (son petit-fils en avril 1869, son épouse en août 1868), je ne peux que voir dans cette fin une réflexion sur la deuil et sur la façon dont nous transigeons sans cesse avec la mort des nôtres.
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