Citations sur Le dernier jour d'un condamné (533)
Tout d'un coup l'un des valets m'a enlevé ma veste, et l'autre a pris mes deux mains qui pendaient, (...). En même temps, l'autre détachait ma cravate. Ma chemise de batiste, seul lambeau qui me restât du moi d'autrefois, l'a fait en quelque sorte hésiter un moment; puis il s'est mis à m'en couper le col.
A cette précaution horrible, au saisissement de l'acier qui touchait mon cou, mes coudes ont tressailli, et j'ai laissé échapper un rugissement étouffé. La main de l'exécuteur a tremblé.
- Monsieur, m'a-t-il dit, pardon! Est-ce que je vous ai fait mal?
Ces bourreaux sont des hommes très doux.
Les hommes sont tous condamnés a mort avec un sursis indéfini
Chaque quart d'heure qui s'écoule me vieillit d'une année.
L'infâme machine [la guillotine] partira de France, nous y comptons, et, s'il plaît à Dieu, elle partira en boitant, car nous tâcherons de lui porter de rudes coups.
Maintenant je suis captif. Mon corps est aux fers dans un cachot, mon esprit est en prison dans une idée. Une horrible, une sanglante, une implacable idée ! Je n'ai plus qu'une pensée, qu'une conviction, qu'une certitude : condamné à mort !
J'ai fermé les yeux, et j'ai mis les mains dessus, et j'ai tâché d'oublier, d'oublier le présent dans le passé. Tandis que je rêve, les souvenirs de mon enfance et de ma jeunesse me reviennent un à un, doux, calmes, riants, comme des îles de fleurs sur ce gouffre de pensées noires et confuses qui tourbillonnent dans mon cerveau.
Le pourvoi, c'est une corde qui vous tient suspendu au-dessus de l'abîme, et qu'on entend craquer à chaque instant, jusqu'à ce qu'elle casse. C'est comme si le couteau de la guillotine mettait six semaines à tomber.
Le pourvoi, c'est une corde qui vous tient suspendu au-dessus de l'abîme, et qu'on entend craquer à chaque instant, jusqu'à ce qu'elle casse. C'est comme si le couteau de la guillotine mettait six semaines à tomber.
- Asseyez-vous là, me dit elle. Il fait encore grand jour, lisons quelque chose. Avez-vous un livre ?
J'avais sur moi le tome second des Voyages de Spallanzani. J'ouvris au hasard, je me rapprochai d'elle, elle appuya son épaule à mon épaule, et nous nous mîmes à lire chacun de notre côté, tout bas, la même page. Avant de tourner le feuillet, elle était toujours obligée de m'attendre. Mon esprit allait moins vite que le sien.
- Avez-vous fini ? me disait elle, que j'avais à peine commencé.
Cependant nos têtes se touchaient, nos cheveux se mêlaient, nos haleines peu à peu se rapprochèrent, et nos bouches tout à coup.
Quand nous voulûmes continuer notre lecture, le ciel était étoilé.
- Oh ! maman, maman, dit elle en rentrant, si tu savais comme nous avons couru !
Moi , je gardais le silence.
- Tu ne dis rien, me dit ma mère, tu as l'air triste.
J'avais le paradis dans le coeur.
C'est une soirée que je me rappellerai tout ma vie. Toute ma vie !
Et il faudra qu’ici aussi, dans cet archipel, parmi ces falaises, les arbres et les fleurs, sous l’ombre des grandes nuées qui viennent du pôle, l’échafaud se dresse, et domine, et constate son droit, et règne ! ici ! dans le bruit des vents, dans la rumeur éternelle des flots, dans la solitude de l’abîme, dans la majesté de la nature ! Allez-vous-en, vous dis-je ! disparaissez ! Qu’est-ce que vous venez faire, toi, guillotine, au milieu de Paris, toi, gibet, en face de l’océan !
Peuple de pêcheurs, bons et vaillants hommes de la mer, ne laissez pas mourir cet homme. Ne jetez pas l’ombre d’une potence sur votre île charmante et bénie.
L’Affaire Tapner – Aux habitants de Guernesey