Qui n’a point connu la faiblesse ne peut acquérir la force, n’est-ce pas ?
La bonne voie est celle du milieu.
Face à vous qui avez atteint un degré de force inconnu de moi, je me sens inférieur. Si je peux le cacher, c’est grâce à mon âge. Ce sentiment d’infériorité n’est en soi qu’une vaguelette se soulevant au fond de moi. Mais que l’inquiétude gagne, que le cœur se referme, et dans une âme close par désir de ne pas voir, cette inquiétude se mue aisément en peur, puis en hostilité. L’inverse est aussi fâcheux. Versé dans la vénération, on désire imiter, on croit se rapprocher, on se cramponne, et tout ce temps on croit garder les yeux ouverts. Mais c’est comme s’ils restaient clos. La force justifie-t-elle n’importe quel acte ? Non, n’est-ce pas ?
Le sabre est confectionné uniquement pour tuer, mais il porte aussi en lui une indéniable beauté. Paradoxe : en ce qu’il peut occire le sabre est beau, celui qui ne le peut est dépourvu de grâce. Plus cet instrument de mort tue, et plus il est admirable. En ce sens, si l’on peut atteindre à la quintessence de cette beauté, naît une sublimité à vous donner le frisson qui va jusqu’à empreindre celui qui le porte. Si pareille beauté était de ce monde, le sabre n’aurait plus à tuer. Force et beauté sont des choses identiques.
Musashi et Kojiro, les enfants terribles de notre époque, l’un et l’autre, constituent la même paire d’ailes. – Tout à fait, ou bien, si tant est que tous deux soient une lame nue, chacun peut aussi servir de fourreau à l’autre.
Que signifie ce sans rival ? Ce sont des mots, rien que des mots. […] C’est quelque chose comme un mirage. Je m’en suis approché et il s’est dissipé.
Les temps ont changé, mais pas la façon de se rendre célèbre. On terrasse quiconque s’est fait un nom, tous les moyens sont bons.
Jusqu’où peut-on monter en vivant pour son seul sabre, à l’époque qui est la nôtre ?
Vouloir prouver qu’on est le meilleur sous le ciel implique d’en apporter la démonstration… en éliminant tous les autres. C’est demeurer le seul, le dernier sur cette terre. Encore en a-t-on le titre au terme de tout cela, qu’on n’a plus personne devant qui s’en glorifier.
S’il existe des degrés à la force, je suppose que plus on approche du sommet, plus on ressent clairement sa propre différence.