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Citations sur Les Intouchables d'État (28)

À part l’ancien ministre de l’Intérieur de François Mitterrand, Pierre Joxe, devenu avocat pour mineurs, il ne s’agit pas, pour ces énarques, de défendre la veuve et l’orphelin. Mais d’entrer dans le monde des affaires. En monnayant leur connaissance intime de l’État.
Pourtant, certains rechignent à franchir le pas. À la même époque que ses amis Hollande et Royal, Michel Sapin, lui aussi « voltairien », se pose des questions sur son avenir. « En 1993, j’avais 41 ans, j’étais ministre de l’Économie de François Mitterrand, raconte-t-il. Quand la droite a gagné les élections, je me suis dit : pourquoi pas le privé ? Comme je suis magistrat, je pourrais devenir avocat. »
L’ancien patron de Bercy prend contact avec un grand cabinet français. Les associés l’invitent dans un restaurant ultrachic. « À la fin du repas, se souvient Michel Sapin, je leur demande naïvement : ‘‘Que ferais-je chez vous ?’’ »
La suite du dialogue est savoureuse. Et ô combien révélatrice :
« Vous venez de faire adopter une loi sur la prévention de la corruption. Vous pourriez aider nos clients à ce sujet.
— Comment ? En leur montrant les failles de cette loi que j’ai imaginée ?
— Ben oui.
— Non, ça je ne peux pas. Ce ne serait pas déontologique.
— Mais alors, à quoi d’autre pourriez-vous bien nous servir ? »

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Emmanuel Macron déteste les privilèges des grands commis de la République. Leur entre-soi mortifère aussi. C’est ce qu’il dit, en tout cas. Dans son livre de campagne, Révolution, il fulmine contre « les hauts fonctionnaires [qui] se sont constitués en caste ». « Il n’est plus acceptable, ajoute-t-il, qu’ils continuent à jouir de protections hors du temps. » Fort bien.
Seulement voilà : son univers – la Macronie – est peuplé de ces intouchables d’État.

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L'inspecteur des Finances Jean-Pierre Lieb a fait toute sa carrière à la DGFiP dont il a dirigé la branche "fiscalité des entreprises". A 52 ans, il décide de changer de vie. Et d'employeur. En 2014, il se retrouve chez EY Société d'avocats. Où ? Dans le département "Business tax services", pardi !
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Ah, un conseil d'administration ! Pour un haut fonctionnaire c'est fromage, dessert et pousse-café. Prenez Jean-Claude Trichet, ancien gouverneur de la Banque de France et de la BCE (banque centrale européenne). Cet inspecteur des Finances de 75 ans (qui) début 2013 a été désigné administrateur d'Airbus, comme représentant de l'Etat qui détient 11% du capital. En 2016, le conseil d'administration s'est réuni six fois. A chaque reprise il était présent. Il a donc encaissé le maximum de jetons de présence: 160 000 euros. Depuis 4 ans, 585 000 euros, de quoi arrondir sa pension. Mais au fait, pourquoi se retrouve-t-il là, lui qui a fait sa carrière dans la banque, pas dans l'aéronautique ? "Détrompez-vous, lance-t-il en fronçant ses épais sourcils, j'ai été conseillé aéronautique d'un président français." Lequel ? "Giscard." C'était en 1974, il y a plus de quarante ans. Oui, immuable France.
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Prenez Alain Juppé. Oui, même Alain Juppé, aujourd’hui statue du commandeur de la politique française. En novembre 2002, il est élu président du nouveau parti chiraquien, l’UMP, juste après Renaud Dutreil… Il a 57 ans et demi. Il décide de liquider ses droits à la retraite d’inspecteur des Finance. Cela fait 38 ans qu’il cotise, alors que, de fait, il n’en a travaillé que quatre à l’inspection, de 1972 à 1976.
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C'est un ambassadeur réputé, brillant et affable. Seulement voilà : sa femme est un tyran domestique. Elle harcèle le petit personnel. Dans les pays où il est nommé, la presse locale en parle. Début 2016, un employé de leur résidence décide de porter plainte pour harcèlement contre cette maîtresse de maison insupportable. Mais l'ambassadeur est une importante personnalité. Le ministère des Affaires étrangères ne veut pas qu'il soit contraint de quitter son poste, à cause de cette affaire. Alors, le Quai décide de passer un accord confidentiel avec le plaignant qui sera signé le 1er avril 2016. En échange de son silence sur les méfaits de la dame, l'Etat français lui verse près de 40 000 euros. Avec l'argent du contribuable, évidemment.
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Prenez aussi Muriel Pénicaud, désormais ministre du Travail. C'est une admirable négociatrice. Surtout lorsqu'elle défend son propre beefsteak. Début 2015, Laurent Fabius et Emmanuel Macron décident de la nommer à la tête de Business France, l'agence chargée de promouvoir les PME françaises à l'étranger. A quel salaire ? Le poste est nouveau, il faut palabrer. Après des aller et retours, l'impétrante, auteur d'un rapport opportunément intitulé Bien-être et efficacité au travail..., obtient 225 000 euros bruts par an. Près de 19 000 euros par mois. Chapeau l'artiste !
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Un membre du Conseil D’état, ça nous est très utile, explique un associé de l'une de ces firmes juridiques (...) pour défendre des clients face aux autorités de régulation, on ne peut pas trouver mieux qu'un conseiller d’État.
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Bientôt donc arriveront en masse à l’ENA des élèves dont les deux parents, voire les grands-parents, seront énarques. La haute administration risque alors d’être confisquée par ces familles d’État toutes-puissantes.
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Dorothée Pineau est une femme du centre, donc de droite, diront certains. Dans sa jeunesse, elle a milité pour Raymond Barre. En 2007, elle a dirigé la campagne de François Bayrou. « Mais je l’ai quitté quand il a refusé de soutenir Nicolas Sarkozy », raconte-t-elle. Après la défaite de son poulain, elle retourne au Conseil d’État le temps de souffler. Puis elle prend la direction des chambres de commerce.
En 2013, des chefs d’entreprise lui proposent de s’occuper d’un autre poulain : l’industriel Pierre Gattaz, qui brigue la succession de Laurence Parisot à la présidence du patronat. Avec lui, « cela a été le coup de foudre », lance-t-elle, toute chose. Enthousiasmée par son programme ultralibéral, elle accepte. Mais elle aimerait bien mêler l’aventure du privé et le confort de l’État. « J’ai demandé au vice-président du Conseil d’État de me mettre en détachement au Medef, et non en disponibilité, afin que mon ancienneté et mes droits à la retraite continuent à s’accumuler, dit-elle en toute franchise. C’est ce que l’on fait quand on va dans un établissement public. » Elle ajoute, le plus sérieusement du monde : « Je lui ai expliqué que c’était un peu pareil, qu’au Medef j’allais travailler pour l’intérêt général » ! Un peu comme à la Fondation de France, quoi. Elle ne comprend toujours pas bien pourquoi cela lui a été refusé.
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