Merci aux éditions Les Escales et à Babelio pour l'opportunité de recevoir ce livre.
Honorée Fanonne Jeffers y retrace 250 ans du passé des États-Unis au travers d'une histoire familiale, de l'histoire d'un lieu, en Géorgie, et de ses multiples strates : indienne, noire et blanche. La spoliation des terres indiennes, puis l'esclavage et la ségrégation y sont explorés.
On y aborde aussi, vite fait, le mouvement des droits civiques et l'intersectionnalité.
Le récit alterne donc des passages historiques, appelés "Chants", et le vécu de trois soeurs, dernières descendantes de la famille, notamment Ailey la narratrice.
Le roman est inégal : les parties historiques sont de loin les meilleures. Les personnages y sont plus attachants, l'écriture moins plate et plus poétique, on y trouve une pointe de réalisme magique (que j'aurais aimé plus approfondie.)
La vie des soeurs est inégale aussi. Autant la partie "Lydia" est poignante, autant la partie "Ailey" est inintéressante.
Hélas, elle occupe la plus grande partie de l'oeuvre.
Ailey est un personnage auquel il est impossible de s'attacher. Son unique centre d'intérêt sur de très (trop) nombreuses pages est de réussir à être acceptée dans la bonne sororité, un truc très américain qui ne résonne en rien chez la lectrice européenne.
Une très grande importance est accordée à la couleur de peau, ce que je trouve légitime, comme dans cette anecdote révoltante où la mère des trois soeurs est prise pour la nounou... car l'une de ses filles passe pour blanche. On a ainsi l'évocation d'un racisme de la part de Blancs, mais aussi de Noirs qui n'apprécient pas les personnes trop foncées, ou encore de Noirs qui n'apprécient pas les personnes trop claires. (Et on a du mal à se souvenir de la couleur de chacun, vu l'affluence… !)
"Quand elle avait décidé d'arrêter de se lisser les cheveux, la présidente de la sororité lui avait interdit de participer à toute fonction officielle, parce que ses cheveux hirsutes faisaient honte à leur communauté."
Mon intérêt s'est enfin éveillé vers la page 750 (sur 880) lorsqu'Ailey commence une thèse en Histoire, qui noue ensemble tous les fils du roman.
Un dernier mot sur la traduction par Emmanuelle et
Philippe Aronson, très inégale elle aussi ; voire totalement bâclée pour certains chapitres. Elle aurait clairement mérité une relecture, afin d'éviter les fautes de français, l'orthographe qui varie d'une page à l'autre et les choix incongrus.