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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
°°° Rentrée littéraire 2023 # 40 °°°

« Nous sommes le sol, le territoire. La langue qui se délie et trébuche sur les noms des morts en osant raconter les histoires de la lignée d'une femme. Son peuple et ses souillures, ses arbres, son eau. Nous connaissions cette femme avant qu'elle ne devienne femme. Nous la connaissions avant sa naissance : nous avons chanté pour elle lorsqu'elle était encore dans le ventre de sa mère. Nous avons chanté alors et nous chantons encore. »

Ce sont les magnifiques premières phrases de cet ambitieux roman. Cette « femme » dont il est question, c'est Ailey dont on suivra la quête intime – dilemme : trouver comment se créer une vie belle et accomplie quand on est une femme, noire, qu'on vit en Georgie dans un ancien Etat sudiste, ancrée dans une terre familiale qui est une ancienne plantation, champ de mines de tragédies passées mais où il est possible de dénicher des trésors.

Ce « nous », c'est le choeur antique de Georgie qui va chanter l'histoire des ancêtres d'Ailey, remontant au XVIIIème siècle. L'ascendance est au coeur du roman d'Honorée Fanonne Jeffers. Elle ouvre son roman sur les arbres généalogiques de cette lignée, puis transforme son récit en oscillation entre le passé et le présent, les chants des ancêtres entrecoupant le parcours d'Ailey et des femmes qui l'entourent, sa mère, ses deux soeurs, ses grands-mères notamment.

Le roman est intimidant avec ses 900 pages. S'il y a bien des surplus de détails ou répétitions qui auraient pu être évités, la lecture emporte le lecteur par son énergie et son engagement. le récit offre une vision panoramique de l'histoire américaine à travers le prisme des minorités : arrivée forcée des premiers Africains, violences subies en parallèle par les Amérindiens, esclavage dans les plantations, ségrégation raciale, mouvements des droits civiques et changements culturels qui en découlent. le tout sous le patronage de l'historien sociologue W.E.B du Bois ( 1868-1963 ), dont les très pertinentes citations en tête de chapitre jouent leurs lignes de basses.

L'autrice inspecte les chaînes explicatives d'événements à différentes échelles ( nationale, sudiste, communautaire, individuelle ) à partir de la famille d'Ailey, issue d'une ascendance mêlée composée de Noirs libres, de Noirs asservis, d'Indiens Creeks et de planteurs blancs. Les thématiques sont nombreuses : les abus sexuels sur des femmes et enfants, la lutte des classes, le colorisme, la cupidité.

Et j'ai particulièrement apprécié leur traitement intersectionnel au plus près des nouveaux concepts sociologiques et psychologiques. Par exemple, il est question de la « misogynoire » ( double discrimination à la fois sexiste et raciste vécue uniquement par les femmes noires ) ou le syndrome post-traumatique de honte héréditaire ( l'épigénétique a démontré la transmission de séquelles subies par les descendants d'esclaves ). Honorée Fanonne Jeffers le fait avec une sensibilité superbe qui laisse voir toute la vie intérieure de ces Afro-américains afin d'illustrer comment ils ont traversé et survécu à une histoire douloureuses.

Ainsi nous voyons grandir Ailey - personnage peu sympathique pendant une grande partie du roman, de par son arrogance – et se développer en elle la double conscience d'être femme et noire lorsqu'elle se connecte à son arbre généalogique en se rendant en Georgie, sur les terres familiales de l'ancienne plantation. le personnage évolue énormément à mesure qu'Ailey découvre le passé familial et son cortège de secrets, mensonges, talents, trahisons, ambition, accomplissement dont elle est le creuset.

Honorée Fanonne Jeffers a créé un monde en mouvement qui continue à vivre une fois le livre refermé. Une lecture ambitieuse, riche et profondément humaine.

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Après l'arrivée des Anglais et des Écossais sur le territoire du peuple Creeks, dès 1733 des traités sont signés qui sont tous rompus, les terres sont saisies et saisies encore. Ainsi récupérées ces terres vont servir à la culture du coton par des noirs ramenés d'Afrique et transformés en esclaves. Une histoire commune qui est un peu celle des ancêtres d'Ailey.

La jeune fille passe ses étés dans la petite ville de Chicasetta, en Géorgie, là où sa famille maternelle vit depuis l'arrivée de leurs ancêtres esclaves. L'occasion pour Ailey d'interroger les siens pour connaître quel sang mêlé coule dans leurs veines et les traumatismes qu'ils ont vécu, les femmes plus encore que les hommes, qui font qu'aujourd'hui elle n'est prête à aucune concession ; sur son identité de femme mais aussi de métisse descendante d'Indiens, d'Africains et d'Européens qui veut être et accomplir ce qui leur a toujours été refusé.

Parfois parfois cruel et émouvant, parfois trop bavard mais jamais ennuyeux et souvent prenant, un roman féministe noir, mais aussi une fresque intime sur l'oppression et la résistance des amérindiens et des afro-américains, indissociables de la construction et de l'identité même des États-Unis.
Merci à Babelio et aux Éditions Les Escales.
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Honorée Fanon Jeffers trace sur 250 ans la généalogie des ancêtres de la jeune Ailey, étudiante afro américaine qui a passé toutes ses vacances sur l'ancienne plantation où ses ancêtres étaient esclaves. C'est une fresque incroyable du sud des Etats-Unis, la Georgie plus particulièrement, à travers la vie du tout premier, Micco, fils d'un colon écossais et d'une mère creek dont le père était noir, de ses descendants et des descendants de Samuel Pinchard, colon installé sur le site vers 1800.
A partir de leur rencontre, les deux lignées ne cessent de s'entrechevêtrer, de mêler leur sang par le mariage mais aussi les viols répétés. Ailey descend de la branche noire et illégitime. Cordelia, de la branche blanche et légitime, ne soupçonnant pas à quel point elle est proche, finalement, d'Ailey.
Par cette fresque de 900 pages, l'auteure nous dessine le parcours du peuple afro-américain de l'époque de l'escalavage à nos jours, révélant comme je ne l'avais jamais lu à quel point ce passé fait de souffrances et d'humiliations est encore présent dans le moindre recoin de la vie actuelle, des universités où ils doivent se battre toujours deux fois plus, au risque accru de tomber dans la drogue et la violence, sans parler d'un sexisme à peine caché au sein de la population.
Les problèmes actuels entre populations noire et blanche dans le sud s'explique clairement par ce passé encore très frais, cette animosité venue de deux siècles d'histoire contre laquelle aucune remediation n'a jamais été proposée, aucun vrai plan de paix.
Ailey est une fille de caractère, petite dernière et enfant gâtée, forte et brillante avec ça. Et malgré tout, elle finit à un moment par tomber sous le poids du passé, avant de décider d'en fouiller les secrets.
Ce n'est pourtant pas sa vie qui m'a le plus intéressée même si je pense avoir mieux compris, plus en profondeur, le quotidien d'une famille afro américaine dans le sud, mais les récits de de ses ancêtres au fil des décennies, chacun ou plutôt chacune se voyant réserver un chapitre en alternance: cette période avant l'arrivée des colons, dans un paysage encore très sauvage, jusqu'à l'horreur insoutenable des violences subies dans les plantations, la fin de l'esclavage auquel succède les lynchages et la fondation du Ku Klux Klan. et la place de la femme, doublement opprimées, doublement moins égale.
J'ai littéralement dévoré ce gros pavé que je n'arrivais pas à lâcher, m'attachant au grand-oncle Root qui traverse le siècle et est la dernière connexion entre les derniers esclaves et Ailey. J'ai trouvé celle-ci parfois cruelle, égoïste, et j'ai regretté que dans toute la famille, la seule qui finalement s'en sort absolument toute seule, devenant médecin et vivant discrètement son homosexualité, la soeur intermédiaire Coco, soit si violemment mise de côté à la fin du récit. J'aurais espéré qu'un chapitre lui soit accordée à elle aussi, il y aurait eu beaucoup à dire...
L'autrice, connue pour ses poésies, dit ne pas vouloir réitérer l'exploit. Mais sans doute y a t'elle absolument tout mis, tant c'est dense!
Merci Babelio et Les escales, je conseille vivement ce roman bouleversant.
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Pendant son enfance et son adolescence, Ailey est très proche de sa soeur Lydia, qu'elle considère comme sa meilleure amie. Au début du livre, elle déroule les années et chaque souvenir est rattaché à son aînée. Tous les étés, Ailey séjourne à Chicasetta, près de sa famille maternelle. Elle s'approprie l'histoire de ses ancêtres. Hélas, ses soeurs et elle portent non seulement le poids du passé, lié à l'esclavage, mais aussi celui du présent, en raison du traumatisme qu'elles ont subi, chacune de leur côté. le silence les détruit et elles cherchent chacune une manière de survivre.

En grandissant, Ailey choisit d'affronter et d'étudier son héritage familial. Issue d'une famille africaine-américaine, elle consacre des années à reconstituer l'histoire des États-Unis, à travers le prisme des anciens esclaves, des autochtones et de leurs descendants. En effet, le roman s'attache à montrer la ségrégation invisible perpétuée dans l'époque contemporaine. Elle montre les difficultés d'être femme et noire. Malgré elle, Ailey est forcée de surveiller ses attitudes, elle est entravée par le regard de la société. Pourtant, elle est agitée par un souffle de liberté. Son travail de recherche la bouleverse, cependant, il est le seul à pouvoir réconcilier son identité et le poids des destins terribles de ses ancêtres. Elle sombre, se rattache aux parois, remonte. Ses découvertes dans les centres de documentation s'entremêlent avec les secrets de sa famille. Ainsi, le récit de son existence est entrecoupé par celui des siècles précédents. Ces parties, intitulées « chant », sont introduites par des citations De W.E.B. du Bois, un sociologue, historien, militant pour les droits civiques.

Lorsque j'ai ouvert le roman, j'ai été un peu effrayée par le nombre de pages (900) et la longueur de l'arbre généalogique. Je me suis référée à celui-ci, pendant les premiers chapitres, puis, je n'en ai plus eu besoin. Au départ, j'ai été impressionnée par la densité du texte et par sa très grande richesse historique et sociétale. Cependant, Honorée Fanonne Jeffers est parvenue à me prendre par la main et elle me l'a soufflé à l‘oreille. C'était parfois un murmure, puis lors des passages très difficiles, la voix prenait de la puissance. Elle était, par moments, entravée par les sanglots, assourdie par les pleurs ou emplie de colère. Elle était, aussi, teintée de respect et d'amour.

Les Chants d'amour de Wood Place est une magnifique fresque historique sur l'esclavage et sur la société américaine contemporaine. Pendant ma lecture, ma peau a pris toutes les nuances de celles des personnages. J'ai ressenti les douleurs et les espoirs de chacun. J'ai aimé être interpellée sur les difficultés, sans être accusée, comme l'ont fait certains ouvrages à ce sujet. C'est un livre enrichissant, qui fait réfléchir et qui en appelle à notre empathie. Il se lit lentement (je l'ai lu en plusieurs semaines, en alternance avec d'autres livres), en raison de sa très grande documentation, ce qui laisse la possibilité aux messages de s'imprégner en nous. J'ai été éblouie et émue.

Lien : https://valmyvoyoulit.com/20..
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Elle est venue d'Afrique, volée à sa famille, pour se retrouver esclave dans une plantation de Georgie sur une terre volée aux indiens. Elle, c'est Aggie. Elle ne le sait pas mais deux cents plus tard, Ailey, une de ses descendantes, retournera sur ses traces.

Honorée Fanonne Jeffers, pour son premier roman, propose une fresque imposante (presque 900 pages) qui raconte l'Amérique, du côté des afro-américains. Rien de vraiment inédit dans ce roman pour ceux qui ont déjà lu sur le sujet mais la construction narrative présente au lecteur un effet miroir entre plusieurs générations.
Le roman se partage donc entre des périodes modernes (à partir des années 80) et des "chants" qui remontent jusqu'à la fin du 18e siècle. Au fur et à mesure de la lecture, d'abord chronologiquement linéaire, l'autrice a inséré des ruptures temporelles, créant des retours en arrière. Ceux-ci peuvent parfois être un peu perturbants, mais très vite, ils apportent un certain rythme à l'intrigue tout en réveillant l'intérêt du lecteur. On sent bien qu'il aurait été compliqué de balayer autant d'événements et autant de points de vue sans recourir à ce procédé.

L'autrice se revendique d'un roman résolument féministe. Et c'est vrai que ces personnages féminins sont généralement des personnalités fortes qui ont eu un impact sur leur communauté. Et pourtant, je n'ai pas aimé le personnage d'Ailey et je n'ai pas aimé l'image du féminisme moderne qu'elle renvoie.

J'ai regretté aussi le choix des traducteurs de traduire littéralement l'expression "old man" que les afro-américains utilisent régulièrement dans les échanges avec leurs aînés. Si dans leur bouche, l'expression contient tout le respect et la bienveillance qu'ils veulent y mettre, par écrit, en français, "le vieux", ça ne le fait pas. Je pense que ce choix malheureux n'a pas aidé à apprécié Ailey qui prononce cette expression des dizaines et des dizaines de fois.

Une grande fresque de l'Amérique, qui montre à nouveau toute la complexité des questions ethniques dans ce pays qui s'est construit sur le sang et les larmes. Et surtout, qui confirme qu'en ce début de 21e siècle, rien n'est réglé.
Malgré quelques longueurs, ce premier roman est assez remarquable dans son approche. Je remercie Babelio et les éditions Les Escales pour la confiance.
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"Les chants d'amour de Wood Place", récompensé par le National book critiques cercle award et reconnu comme un des cinq meilleurs romans de l'année par le New York Times est en effet un grand roman, peut-être un peu trop long tout de même.
Un roman compliqué comme la vie. Un roman à la fois historique, social, familial, témoignage, aboutissement d'un long parcours d'une voix noire qui sait se faire entendre. Un roman de résilience également à travers une saga familiale des origines à l'époque moderne, entre esclavage, métissage, racisme, reniements et acceptations, douleurs, colères et rancoeurs légitimes avant l'apaisement qu'apporte le temps et les changements de generations, apaisement qui n'est pas oubli, bien au contraire, puisque la jeune Ailey, brillante étudiante fait son doctorat sur l'histoire douloureuse de sa famille. Doucette comme l'appelle affectueusement son grand-père historien et professeur à l'université dans laquelle elle étudie, qui a un caractère bien trempé, explore avec perspicacité et dans le moindre détail toutes les pistes qui remontent aux origines de cette famille, où le viol des femmes noires par leurs maîtres blancs étaient monnaie courante, même parfois des enfants, sans que personne n'y trouve à redire, vu la violence ordinaire de cette époque où l'homme blanc avait tous les droits sur ses esclaves, violence qui a duré bien au-delà de la libération des esclaves notamment avec le Ku kux klan. le pire était pour les enfants métisses nés de ces viols qui n'avaient et n'ont eu longtemps aucune place, ni du côté des blancs ni du côté des noirs.
A travers la servitude, la négation des droits les plus élémentaires et le déni d'humanité c'est l'histoire de femmes maltraitées mais fortes qui ont permis aux leurs de survivre face à des hommes violents ou lâches.
C'est aussi l'histoire de l'Amérique telle qu'elle s'est constituée à travers ses rapports de force et ses exactions, un monde où chacun, de particulier les victimes, doit apprendre à vivre avec un passé plutôt sombre.
Mais c'est aussi l'histoire d'Ailey, dans sa vie quotidienne d'étudiante, de fille, de nièce, d'amoureuse et d'amie, quelque peu exigeante mais cherchant toujours à être juste. Sans pathos mais sans rien dissimuler, elle s'affirme et prend conscience de sa valeur à travers son travail grâce à ceux qui l'aident et l'encouragent, décrivant les situations au scalpel, laissant jaillir les mots des documents retrouvés et des témoignages oraux des siens comme de la lave. Ailey, pour pouvoir vivre en femme libre affronte volontairement tout ce qu'ont vécu les femmes et les hommes qui l'ont précédée. Avec objectivité mais souvent au bord des larmes et il y a de quoi.
Quel texte ! Je me suis demandée si j'en serai à la hauteur. Ne serait-ce que parce que en tant que blanche et moderne, même révoltée contre ce qui s'est passé, je demeure forcément extérieure à ce qui a été vécue . Mais la puissance de ce texte, qui est d'abord et avant tout une belle reconquête de vérité et d'identité est de faire comprendre justement que pour les noirs et les métisses seule la connaissance et la conscience du passé, la vérité dite aussi dure soit-elle, permet de créer ce chemin pour avancer. Se dégager des conséquences psychologiques et durables de l'esclavage non seulement n'est pas simple, mais implique la responsabilité et l'implication de tous.
Un très beau texte, parfois un peu confus tant il est riche et fourmille de personnages et de descriptions et dans lequel je me suis perdue par moments. Mais la généalogie du début et la construction, un peu en entonnoir, qui s'achève sur une récapitulation de toutes les histoires familiales diverses m'a permis d'en suivre tout de même la trame. Ceci dit la volonté d'enfoncer le clou provoque des repetitions qui meriteraient d'être supprimées. Honorée Fanonne Jeffers adopte avec brio deux styles, le premier, lyrique à la manière des griots et sous forme de chants dans lesquels elle évoque ses ancêtres, et un second, narratif, qui déroule de façon très fluide le récit des recherches et de la vie d'Ailey.
J'avoue m'être demandée à la fin si, en dépit des progrès lents mais réels de la reconnaissance du mal fait aux noirs une véritable réconciliation est véritablement possible face à tant de souffrances et d'injustices longtemps légitimés par la violence.
Le chemin est long tant une question en suscite une autre : " Je sais que l'histoire sera bientôt terminée. Que je me reveillerai avec une question. Et puis une autre, mais la question correspond à ce que je voulais. La question est le but. La question est mon souffle."
Merci à Babelio et aux éditions Les Escales pour ce livre lu dans le cadre d'une masse critique et auquel je souhaite le meilleur accueil en France.
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Un énième livre sur les noirs Américains, me direz vous ? Pas tout à fait ! L'histoire d'une famille de Géorgie en prise avec ses traumatismes transgénérationnels. Dans cette longue fresque couvrant près de 400 ans de l'histoire américaine, Honorée Fanonne Jeffers, l'auteure, retrace le parcours d'une famille dont les sangs mêlés font toute la richesse...Et pourtant, leur histoire ne sera pas toujours heureuse ! loin s'en faut !
D'ailleurs, avec le commerce d'êtres humains qui fit la fortune de fermiers devenus propriétaires en expulsant les indiens, on perçoit clairement les bases viciées de la naissance de la nation.
Le récit alterne donc périodes actuelles et passées : on fait la connaissance d'Ailey, enfant curieuse puis étudiante brillante qui, malgré les injonctions familiales de poursuivre la lignée familiale en devenant médecin, préfère se passionner pour l'histoire de son pays. L'étude de sa propre histoire lui réservera de sacrées surprises d'ailleurs ...
Les chants d'amour, qui rythment les chapitres plus contemporains, font référence au passé et aux siècles qui ont vu la conquête de ces territoires convoités. Cela peut déstabiliser le lecteur au début.
Une fois cette surprise passée, le roman est littéralement passionnant, il nous plonge dans un monde pas si lointain où le racisme et l'oppression avaient pleinement leurs places. On admire surtout le courage d'Ailey, une héroïne à la vie difficile.
C'est malgré tout un peu long ! Il faut le reconnaitre ! Certains passages mériteraient peut être d'être revus. Cela n'enlève en rien la qualité de ce récit. On le referme avec beaucoup de difficultés et avec beaucoup d'émotion. Un coup de chapeau à la couverture des plus voyante; elle détone parmi les couvertures neutres de cet automne. A découvrir chez votre libraire ! Merci aux éditions les Escales pour le choix littéraire, merci aux éditions Netgalley pour le prêt de ce livre surprenant.
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Je remercie Babelio et les éditions Les Escales pour ce livre reçu via une opération Masse Critique spéciale.

Voilà. Je ne peux pas "critiquer" ce livre, ce roman (pas) historique. En tout cas pas sur le fond, qui est ce qu'il est, et ô combien éloquent ! Toutes ces monstruosités... Qui n'ont aucun sens. 
Le livre a la force et l'intérêt de montrer à quel point les lignées sont liées, s'intriquent, s'imbriquent, que les relations forcées ou non, la passion parfois, fait dévier des rails et font que tout le monde tout le monde tout le monde peut trouver liens à un autre. Plus ou moins proche. Et donc ces violences, ces outrages, des siècles précédents, et (encore) actuels n'ont en fait aucun sens. Aucun. Mais elles sont. Et il faut les dénoncer encore et encore. C'est à cela que participe ce livre.
Bah, finalement j'ai quand même un peu évoqué le fond. 
Sur la forme, le livre est très long. Je le trouve trop long. Car il est construit en différents morceaux qui alternent, des morceaux d'un passé lointain, avec des familles qui s'entrecroisent, s'entrevivent, sans se comprendre, sans comprendre la marche des choses. Ce que réalise petit à petit le personnage principal. Trop long car il y a une certaine répétition, puisque les nombreux personnages racontent ou sont racontés et s'entrecroisant on a parfois des doublons. Mais soit. Sans doute ils participent de la compréhension ou de l'intégration de ces informations complexes.
Car le livre est complexe.
Je trouve que certains passages sont plus faibles ou moins "écrits", des passages concernant certains des personnages plus anciens, un peu bâclés, comme un ventre mou. les morceaux "contemporains" sont écrits de façon assez vive et redonnent l'énergie au lecteur et des émotions peut-être plus légères pour respirer entre les morceaux plus durs.
J'ai adoré ce personnage de Root. Si rempli de contradictions, ou de signes intérieurs ingérables, plein de pertes et qui mènent sa barque de façon si digne et qui transmet...
Beaucoup de rebondissements qui permettent de tenir la distance des 900 pages.
Le titre original parle des chants De W.E.B. du Bois et pas de Wood Place. L'auteure a utilisé des citations du penseur pour démarrer les différents chapitres nommés Chants, qui n'en sont pas vraiment. J'ai trouvé cette construction relativement artificielle et pas très convaincante. Pas une plus-value à mes yeux. L'histoire en elle-même étant suffisamment puissante.

Bref, livre qui rentre avec force dans la vague indispensable de la voix de ceux qu'on a muselé et méprisé. 

Mon coup de coeur dans ce livre est la mise en avant de cet enchevêtrement entre Indiens Creeks balayés de leur terre, Noirs exploités sur ces terres volées, et les Blancs majoritairement dégueulasses. Ces enchevêtrements qui ont fait ce que sont ces Etats-Unis si dingues.
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Avis mitigé sur ce long récit de 900 pages :l'auteure a choisi d'alterner les événements du passé esclavagiste de la Géorgie et le présent, il en résulte souvent des confusions, or de mon point de vue dans ce livre l'ordre chronologique pouvait être respecté tout en montrant le poids de la transmission de génération en génération et un certain déterminisme.
D'autre part, des personnages accumulent les malheurs dont Lydia, Samuel est un monstre+++, le résultat est qu'ils apparaissent plus comme des caricatures que comme des personnages crédibles capables de susciter empathie ou haine.
Trop nuit…
L'auteure déroule dans une fiction historique ce qu'est l'esclavage à travers l'histoire d'une famille afro-américaine du 18ème siècle à aujourd'hui,la fiction permet de rendre plus concrètes par les portraits et la généalogie des personnages la complexité des origines et la barbarie de l'esclavage.
Comme l'écrit l'auteure,Les chants d'amour de Wood Place , est une oeuvre féministe noire également.Elle développe de façon récurrente le combat des femmes meme esclaves contre les hommes ou pour elles-mêmes.
La narratrice est Ailey , elle a deux soeurs Lydia et Coco.Lydia est l'élément fragile plombée par son passé quand ses deux soeurs sont des battantes.
Et l'histoire?
Nous faisons la connaissance d'Ailey et de sa famille qui vivent dans la petite ville de Chicasetta , berceau de la famille de sa mère Belle depuis l'arrivée de leurs ancêtres africains devenus esclaves. Ailey est en 3 Eme cycle d'histoire quand elle se lance dans des recherches sur la famille Pinchard. Elle étudie les journaux intimes de Samuel Pinchard , des photographies également et découvre ainsi qu'Eliza Two Pinchard échappe à l'incendie de 1859 et deviendra son aïeule maternelle directe.

Merci aux éditions Les Escales et à Babelio.
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Fresque familiale incroyable qui nous fait remonter l'histoire des Etats-Unis jusqu'en Afrique.
On suit l'histoire d'Ailey, installée avec sa famille en Géordie, à partir de l'adolescence vers nos jours et de sa famille proche. Mais, avec des chants, on remonte l'histoire de sa famille bien loin vers le commerce d'être humain, l'esclavage, l'oppression et la résistance. On a plusieurs histoires de personnages bouleversants qui subissent le racisme, la violence et voient souvent leur destin prendre une tournure qu'ils ne contrôlent pas. Ailey a l'air de le contrôler mais si son histoire familiale passée est cabossée, celle de sa famille actuelle est aussi mouvementée.
On traite de la condition des noirs et plus particulièrement de la condition des femmes noires. La construction est originale et incroyablement maîtrisée pour nous faire voyager dans le temps. On rencontre une multitude de personnages. Ce que j'ai craint au début mais chacune de leur histoire se suit de manière addictive.
L'autrice est une formidable conteuse, on ne peut qu'être agréablement entraînée à travers ces 900 pages dans un roman avec une dimension impressionnante.
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