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Critique de Alfaric


Ambitieux et original, c'est le moins que l'on puisse dire. Oubliez le 1er chapitre, une succession de scènes de culs hétéro, homo, gay et lesbiennes. Fort heureusement, cela se calme par la suite même si cela revient assez régulièrement. A la limite oubliez carrément la 1ère partie qui surfe allègrement sur le bashing anti-catholique. Fort heureusement, cela se calme là aussi par la suite même si l'auteur ne perd pas une occasion de cracher son venin sur, je cite, « l'Eglise catholique corrompue de Rome » (donnant l'occasion de deviner trop facilement ses opinons pro-protestantes sur le sujet).

Car autant le dire de suite, Thorn le prédateur ressemble très fortement à un "Sans Famille" d'Hector Malot au crépuscule de l'Empire romain. On pioche allègrement dans les feuilletons dramatiques du XIXe siècle pour nourrir les péripéties de ce roman fleuve : Thorn reprend le rôle de Rémi, Wyrd celui de Vitalis, Thuida celui de Mattia et tandis qu'on traverse l'Europe médiane le Danube remplace le Canal du Midi... Si on ajoute Juika-bloth en remplacement de la troupe animalière et les nombreux adolescents handicapés par le destin en remplacement du jeune Arthur, il ne manque plus que Madame Milligan pour que le tableau soit complet ! Bref, attendez-vous à pleurer car les occasions ne manqueront pas de le faire.

Gary Jennings ne s'est pas facilité la tâche en voulant rédiger la chronique d'une époque aussi trouble que très peu connue : les tentatives de résurrection de l'Empire romain à l'aube des âges sombres. L'auteur se présente comme le simple traducteur de l'autobiographie de « Th », traduit en Thorn, mais cette dernière n'est que prétexte à la biographie de l'autre « Th ». Avec "La Mosaïque de Sarance", Guy Gavriel Kay s'était lancé dans une grande fresque fantasmée sur Justinien le byzantin à travers les yeux d'un artiste italien. Avec "L'Empire barbare", Gary Jennings s'est lancé dans une grande fresque réaliste sur Théodoric l'Ostrogoth à travers les yeux d'un vagabond sans attache, speculator en puissance.
C'est truffé de tirades en latin, en gothique, en grec et l'ensemble s'avère très documenté sinon très érudit : politique, économie, religion, société… c'est très instructif sinon très pédagogique. Les lecteurs sont donc très bien immergés dans l'Europe de la fin du Ve siècle après J.-C. La prose est plutôt assez facile d'accès : cela se lit très bien et on avance vite dans ce qui apparaît au fur et à mesure des pages qui défilent comme un road movie antique.
Malgré les 850 pages peu de lenteurs, de langueurs ou de longueurs.

Pour accéder aux nombreuses qualités du roman Gary Jennings il faut accepter ses postulats :
- le héros narrateur est hermaphrodite (ce n'est pas un spoiler car c'est expliqué à la 1ère ligne du 1er chapitre), et c'est donc tout naturellement que de nombreux passages sont consacrés à l'exploration de sa double nature qui sont ou très crus, ou très zarbi, ou les 2 à la fois…
- le héros narrateur est doté de réflexions morales d'une modernité anachronique (si l'auteur voulait dénoncer tels ou tels traits des sociétés anciennes, ou tels ou tels traits de nos sociétés modernes, il y avait des manières un chouia plus subtiles de le faire)
- le héros narrateur est surdoué : j'ai eu peine à accepter qu'un adolescent de 12-13 ans qui n'a jamais franchi les limites d'un monastère jurassien puisse être un mix entre Alain Decaux, Alain Bentolila, Maître Capello, Clausewitz et Mac Guyver… entre autres choses ! Suspension d'incrédulité donc pour un récit qui se veut résolument réaliste...

Dommage aussi que quelques clichés viennent un peu ternir l'ensemble : les Huns sont très très cruels, les Orientaux sont très très fourbes, les nordiques sont très très fiers, les méridionaux sont très très prétentieux, les Goths sont très très courageux, les Britons sont très très loyaux, les Juifs sont très très radins et les Helvètes sont très très neutres…
Rien qui ne viennent tirer le roman vers le bas, mais cela fait tiquer au vu de la qualité.

1ère partie : le Cirque de Baume
Thorn nous conte ses origines et son enfance, masculine d'abord, féminine ensuite. Entre premiers émois adolescents et viols pédophiles, Thorn fait l'apprentissage de la vie.

2e partie : Wyrd
Après avoir traversé la Franche-Comté, Thorn rencontre son Vitalis sous les traits du coureur des bois Wyrd, un Briton de Cornouilles retraité de la Legio XI Claudia. Les affrontements entre Romains et Huns autour de la ville de Bâle font vraiment western !

3e partie : au Lac Brigantinus
Thorn explore sa partie féminine auprès d'un gentil adolescent maudit par le destin. Une partie truffée de scènes de cul, des plus innocentes aux plus cruels. Et tout se finit par une bien triste ordalie au centre d'une arène. Heureusement la justice immanente veille au grain !

4e partie : la vallée aux échos
Tandis que Thorn se lie d'amitié avec la très jeune Livia, fille du patron d'une mine de sel bavaroise, Wyrd rencontre son destin prédit par un étrange devin germain.

5e partie : Vindona
Thorn rencontre son Mattia sous les traits du dynamique Thiuda. Nous explorons des points de vue masculin et féminin la face claire et la face obscure de l'establishment provincial et là encore on nous offre une collection de scènes de cul allant du plus soft ou plus crade.

6e partie : parmi les Goths
Au bout de 600 pages nous entrons enfin dans le vif du sujet avec le siège de Singidunum. La bataille entre les Goths de Théodoric et les Sarmates de Babai nous rappelle aux plus belles heures du peplum !

7e partie : Constantinople
Accompagnée par la résolue princesse Amalamena et par le déterminé optio Daila, Thorn est confronté pour la 1ère fois aux subtilités et aux cruautés des intrigues byzantines. Difficile de ne pas penser au roman de Guy Gavriel Gay sur le sujet. Evidemment un énorme cliffhanger oblige d'enchaîner avec la suite : "Théodoric le Grand".

J'ai découvert un super auteur : le reste de sa bibliographie intègre donc mes tablettes.
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