Elle chercha au fond d'elle le sentiment de plénitude qu'elle avait ressenti sous l'eau. Puis elle toucha la pierre, et ele éprouva de nouveau la paix. Un calme souverain, doublé d'une volonté farouche. Le massacre de Pomawok lui revint en mémoire. Froide et implacable, la vengeance s'insinua dans son esprit. La Naïme se laissa gagner par ces sensations, jusqu'à sentir son cœur et son âme durcir, jusqu'à ne faire plus qu'un avec la pierre.
Alors elle ordonna.
Le feu ne connaît pas de maître !
La vie est une farce. Les dieux eux-mêmes se moquent de nous. Ils nous appâtent avec leurs étoiles avant de balayer nos rêves d’un revers de la main. Ils nous offrent de l’amour pour mieux nous déchirer, ils nous prennent ce que nous avons de plus cher. Ils nous poussent sur la scène et ils rient de nos infortunes. Les dieux veulent que je tremble ? Eh bien, je leur jouerai un tout ! À coups de pirouettes et de pieds de nez, je rirai plus fort à leur barbe que le tonnerre rugissant dans le ciel.
Elle se sentait de taille à se frotter aux seigneurs. Ils pouvaient bien, tous, la croire faible, elle s’en moquait, à présent. Cette faiblesse, elle allait en faire une force. Elle se conduirait en agneau pour mieux approcher ses proies, et, quand viendrait le temps de conclure, elle mordait en loup.
Tu vois, ce genre de faux-fuyant me hérisse. Je ne suis peut-être pas aussi fin stratège que vous, mais j’ai le nez assez creux pour savoir quand cela sent le roussi. Et là, l’odeur est tellement forte que j’en ai les poils de nez qui brûlent.
Tu dois passer, Perceron. Il faut que tu passes ! songea-t-il en se grignotant l’ongle du pousse, lançant des œillades perdues autour de lui, comme si une idée lumineuse pouvait tout à coup surgir de quelque recoin d’ombre.
[Perceron à son fils Poulo] Les fées, mon garçon, il faudra t’en méfier. Elles sont aux forêts ce que les sirènes sont à l’océan. Elles courent les bois, nues, le corps couverts de peintures sauvages. Elles invitent le voyageur égaré à les suivre au plus profond de la sylve, et leurs manières ensorcellent les femmes comme les hommes. Gare aux voyageurs qui croisent leur chemin ! Ces fées-là n’ont pas d’ailes. Elles ne connaissent ni le bien ni le mal, seules les lois anciennes de la nature.