Citations sur Le Divin dans l'homme : Lettres sur les religions (185)
Ce qu'il y a au fond de l'âme, l'inconscient, n'est pas le fait des hommes, mais partie de la nature créée par Dieu et que l'homme n'a en aucun cas le droit d'insulter, même si elle nous cause les pires difficultés. (...)
La sagesse n'est pas faite pour la foule et ne l’a jamais été, car c’est toujours à la folie que les hommes aspirent le plus. Sinon, dès l'époque du vieux Pythagore, le monde aurait été guéri de sa propre existence. Pour vous-même, il se peut que la sagesse soit bénéfique, mais la distribuer à d'autres serait vraiment dénaturer la vérité. La sagesse est une chose dont l'individu jouit solitairement et, s'il garde le silence là-dessus, on le croit ; mais s’il en parle, il n'a aucune action
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Si je comprends tant soit peu le Yi King, je dois dire que c'est le livre qui enseigne à l'homme sa propre voie et la grande valeur de celle-ci. Ce n'est pas pour rien que ce livre a été le trésor caché des sages.
Mon seul désir est que les théologiens s'intéressent également à la kabbale, à l'Inde et à la Chine pour décrire encore plus précisément la révélation de Dieu et pouvoir la proclamer. Si cela conduisait à relativiser en un certain sens le christianisme, cela se ferait in maiorem dei gloriam et ne porterait pas atteinte eu sens de la doctrine chrétienne. Car c'est une chose vraie, comme bien d'autres encore.
Toute la prédication théologique est un mythologème, une série d'images archétypiques supposées donner une description plus ou moins exacte de la transcendance inimaginable. (...) Le total de ces archétypes correspond à ce que j'ai appelé l'inconscient collectif. Il s'agit là de faits empiriques, comme je l'ai prouvé.
Sans une connaissance très approfondie du "Bien" et du "Mal", du moi et de l'Ombre, il n'y a pas de connaissance possible du Soi, mais tout au plus une identification involontaire et donc dangereuse avec lui.
Le taoisme formule, comme vous le savez, des principes psychologiques d'un intérêt universel. Principes d'une portée si vaste que leur validité s'étend à l'humanité tout entière. Cependant, en raison même de leur universalité, ils ont besoin d'être réinterprétés et mis en forme différenciée pour pouvoir être appliqués dans la pratique. Assurément, ces vues sont du plus grand intérêt dans leur universalité elle-même, mais tout aussi importante est la connaissance, poussée jusque dans le moindre détail, du chemin qui mène à leur véritable compréhension. Pour l'esprit occidental, le risque est de manier simplement des mots au lieu de s'appuyer sur des faits. Ce dont l'homme occidental a besoin, c'est d'avoir réellement l'expérience de faits qui ne puissent pas être remplacés par des mots.
Vous écrivez en effet, apparemment sans hésiter, que pour moi Dieu et le Soi sont une seule et même chose. Vous n'avez pas sans doute prêté attention au fait que je parle de l'image de Dieu et non de Dieu lui-même, parce que de Lui je ne suis tout simplement pas en mesure de parler. Que vous n'ayez pas perçu cette distinction fondamentale, c'est plus qu'étonnant, c'est bouleversant ! (...)
Je n'ai jamais pensé, en vérité, que quand je manie la structure psychique de l'image de Dieu, je tiendrais en main Dieu lui-même. Je ne suis pourtant pas un fétichiste du verbe, et je ne pratique pas cette magie verbale qui consiste à croire que l'on pose, que l'on produit une réalité métaphysique par des incantations. (...)
Dans mon Job comme ailleurs, je perle toujours expressément de l'image de Dieu. Si donc la critique théologique se plaît à l'ignorer, c'est elle qu'il faut blâmer et non pas moi; car elle pense, c'est évident, qu'en prononçant le petit mot "Dieu" elle peut l'évoquer.
Nous ne devons nous représenter l'inconscient collectif ni comme ordre ni comme désordre. L'expérience montre l'existence des deux. C'est pourquoi, en présence d'une conscience désordonnée, l'ordre peut venir de l'inconscient, et inversement avec un cosmos de conscience trop étriqué, on assiste à une irruption du chaos inconscient.
(...) Un symbole est pour moi l'expression sensible d'une expérience intérieure intensément vécue. L'expérience religieuse aspire à s'exprimer et ne peut y parvenir que de manière "symbolique", car elle dépasse l'entendement. D'une manière ou d'une autre, elle doit être exprimée, car c'est dans l'expression qu'elle manifeste la vitalité intérieure qui l'habite. Elle veut, dira-t-on, accéder à l'existence visible, acquérir une forme concrète. (L'esprit ne démontre sa force agissante que dans la refonte du matériau.)
Tout compte fait, l'homme est un fou et il le reste. Mais il semble indispensable de croire en un avenir meilleur. Il n'y a pourtant jamais eu d'amélioration; mais seulement l'apparition de choses nouvelles qui n'étaient bien sûr pas comparables à l'état antérieur, si bien que les hommes ne pouvaient jamais être sûrs qu'il ne s'agissait pas là de cet avenir meilleur, attendu depuis si longtemps.