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Citations sur Farémido : Le cinquième voyage de Gulliver (4)

Il me demanda l'usage que nous faisions de notre esprit, à quoi nous réfléchissions ; or de ma réponse il déduisit que nous ne faisions que poser et reposer cette même question de l'utilité du cerveau, autrement dit que nous nous cassions la tête pour savoir à propos de quoi nous nous cassions la tête.
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Jusqu’à arriver à un stade où non seulement les machines soutenaient l’homme dans ses activités, elles multipliaient ses forces, mais elles finirent par exécuter d’elles-mêmes le travail avec infiniment plus de perfection que cela aurait pu l’être par notre faillible corps humain. Il en va de même pour les arts : tableaux, sculptures, œuvres écrites ou musicales exprimaient avec une telle perfection les manifestations et aspects de la vie, forme, couleur, récit, sentiment que la réalité de la vie est restée loin derrière quant aux finesses, à la beauté et à la force d’expression.
Qu’en est-il résulté ? Machines et œuvres ont surpassé l’homme : elles sont devenues plus achevées, et bientôt quand l’homme voulut être parfait, il fut contraint d’imiter les machines et les œuvres qui jadis ne faisaient que l’imiter lui-même. C’est notre civilisation, les œuvres de la littérature épique, dramatique ou autres qui ont exercé la plus grande influence sur la formation de notre caractère. C’est l’art qui a dicté nos formes. Un jour, me promenant à Budapest, j’ai vu une confiserie qui se faisait appeler « automate », en haut on mettait une pièce dans une fente et cela faisait sortir un bonbon. À l’intérieur de cet automate un homme était assis, c’est lui qui recevait la pièce dans sa main, et c’est lui qui faisait sortir le bonbon par un orifice. Cet homme avait spontanément compris que ses congénères avaient davantage confiance dans la machine que les uns dans les autres, et par une ruse il voulait faire croire qu’il était une machine.
Les hommes en sont arrivés à débourser dix mille fois plus pour un tableau représentant une femme que pour la femme qui avait servi de modèle au peintre ; on n’accordait plus le même respect à la femme que celui qu’on accordait à son imitation, sa copie reconstruite. Je me souviens de la sincère révolte éveillée en moi, peu avant mon départ pour Farémido, quand les barbares Allemands se mirent à bombarder la cathédrale de Reims, alors qu’au même moment je n’ai que superficiellement pris note du nombre de victimes de cette même bataille.
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Savez-vous ce qui s'est passé ? L'organe de la conscience, issu de l'instinct, et dont le rôle aurait été, une fois complètement développé, de prendre la place de l'instinct, cet organe donc, par un hasard stupide a échappé à l'instinct pour commencer à grandir dans la partie proéminente du cerveau, tandis que, face à lui, dans la partie postérieure du cerveau; l'instinct a poursuivi tranquillement et imperturbablement son évolution de son côté. Savez-vous ce que c'est ? Les médecins l'appellent grossesse extra-utérine, elle tue la mère et l'enfant. Deux organes donc, au service de deux objectifs frontalement opposés, l'un recherche la vie, l'autre recherche la mort. A cause de ce défaut tout homme désormais est un monstre à deux têtes qui doit périr dès lors que les deux hémisphères, celui de l'instinct et celui de la conscience, à un certain stade de leur développement, se trouvent top comprimés et étouffent comme deux grains tombés dans un sillon commun. Deux mains, l'une construit, l'autre détruit ; l'une s'accroche pour ne pas être emportée par la tempête, l'autre déchire le filin de l'ancre ; l'une protège le corps contre le gel, l'autre le découvre !
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Je ne sais pas pourquoi mais toute cette mécanique, malgré sa complexité, donnait une impression de grande simplicité et d’évidente nécessité, on sentait que tout était à sa place et fonctionnait dans une merveilleuse harmonie, mais par-dessus tout, elle inspirait aussi dès le premier instant une sorte d’inexprimable sentiment agréable, sans rapport avec l’impression que la machine était indubitablement un chef-d’œuvre économe et parfait de mécanique. Mais l’objet avait un rayonnement propre : je suis incapable de m’exprimer autrement qu’en utilisant un terme approché, disant que cette machine était belle, entendant par ce mot non seulement ce qu’il exprime mais bien plus, comme nous l’utiliserions par exemple à propos d’une peinture, ou mieux encore d’une femme. Je ne suis qu’un simple chirurgien, je ne suis pas rompu à l’art du langage, mais je me souviens que des épithètes dithyrambiques me vinrent alors à l’esprit, telles que de jeunes amoureux ont coutume de trouver dans les moments d’extase. Peut-être n’étais-je pas encore dans mon état normal, d’abord je gardais dans l’oreille le tintement des accords précédents, et aussi la machine elle-même semblait générer une puissance, un état intermédiaire entre la chaleur et le courant électrique, un faisceau invisible d’électricité thermique qui tenait tous mes nerfs dans un engourdissement tendu. Un bourdonnement constant et agréable émanait de son intérieur, les ailes se replièrent lentement. Je ressentis un chatouillement sur mon visage, et levant les yeux je vis deux lentilles de verre qui me fixaient. Au même moment un des bras se souleva jusqu’à me toucher puis se retira. Pendant que j’essayais de deviner qui pouvait être l’homme qui manipulait cette mécanique de l’intérieur, un clapet remua sur le haut du fuselage et la musique que j’avais entendue auparavant retentit de nouveau avec une douceur indicible, mais non cette fois dans les notes fa-ré-mi-do mais plutôt en une mélodie hélicoïdale selon les notes de la gamme chromatique que je ne connais pas suffisamment mais que je noterais à peu près comme ceci : sol, la, la, sol#, sol, sol#.
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