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Citations sur Louis XI : L'universelle araigne (45)

Le samedi 19 novembre 1468, des hérauts royaux publièrent sur les places de la capitale la paix qu'avaient signée le roi et le duc de Bourgogne. Le même jour, il fut proclamé que personne ne devait dire quoi que ce fût "à l'opprobre dudit seigneur, fût de bouche, par écrit, signes, peintures, rondeaux, ballades, virelais, libelles diffamatoires, chansons de geste ni autrement". Le 19 toujours, des commissaires royaux s'occupèrent de rassembler tout ce que Paris comptait de "pies, geais, chouettes étant en cage ou autrement" et de les apporter au roi, qui fit enregistrer les noms de leurs propriétaires et consigner par écrit les paroles qu'on leur avait appris à prononcer (dans le genre : "Larron! Paillard! Fils de putain! Va dehors, va! Perrette, donne-moi à boire!"). Peut-être Louis espérait-il découvrir une pie qui fût capable de dire : "Bourguignon, fils de putain!"
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A la grande surprise de ses auditeurs, qui s'attendaient à entendre le chancelier, ce fut Louis qui prit la parole. Avec conviction, il s'efforça de leur inculquer sa vision d'une France unie et prospère où chacun aurait la même chance de succès. Il désirait, expliqua-t-il "trois choses principales pour le bien du royaume tout entier" : que chacun puisse commercer sans entrave, selon son bon plaisir ; que la justice soit réformée de façon à éliminer atermoiements et corruption ; que la France enfin soit soumise à une loi unique et ne connaisse plus désormais qu'un seul poids, une seule mesure et une seule monnaie. Il admettait que "son royaume était si grand qu'on ne pourrait y parvenir qu'au prix de grandes difficultés". C'était la dernière fois que ses sujets et lui auraient l'occasion de se voir.
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Cette expansion des services gouvernementaux ne pouvait qu'entraîner un accroissement des impôts. Louis XI introduisit donc des réformes fiscales et autorisa notamment certaines localités à collecter elles-mêmes les aides, tandis qu'il allégeait les charges des grandes villes en échange de diverses contributions, financières ou autres. Toutefois, le roi ne s'intéressait guère à l'administration des finances ; aussi laissait-il à ses officiers le soin de trouver l'argent nécessaire, au besoin même dans "la boite à l'enchanteur".
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Nous qui avons donné à la mort et à la destruction une efficacité sans précédent, nous qui lui avons conféré un caractère infiniment plus terrible qu'aucune des générations qui nous ont précédés, nous qui, le soir venu, fuyons sur des routes ensanglantées la confuse épouvante que nous inspirent les grandes villes, nous tenons pour certains que ce sont là des gages de "progrès", et nous considérons les horreurs du passé comme bien pires que celles que nous connaissons aujourd'hui. En réalité, nous nous sommes simplement habitués aux maux de notre temps, tandis que ceux de nos ancêtres ont acquis au travers des siècles un aspect terrifiant.
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Louis XI était beaucoup plus accessible qu'un président actuel. Alors qu'aujourd'hui il nous est difficile de voir un chef d'Etat, une proportion appréciable de la population avait l'occasion de l'approcher. Par souci de punir ou de récompenser, il s'intéressait davantage à ses sujets en tant qu'individus et connaissait nominalement un pourcentage plus élevé d'entre eux (bourgeois ou gentilshommes) que de nos jours le Premier Ministre, le président ou le secrétaire d'un parti n'en ont le goût ou le loisir.
Si la vie était alors plus difficile, elle était aussi moins exigeante, et l'homme était d'autant plus reconnaissant de ce qu'elle lui offrait qu'il en attendait peu. Contrairement à nos gouvernants actuels, Louis XI, comme Charlemagne, pardonnait la trahison et la perfidie avec une miséricorde qu'ignore notre justice impersonnelle. En tant qu'homme, lui aussi aurait un jour besoin d’être absous, et il espérait tirer avantage de la gratitude que pourrait lui valoir sa générosité. Cette dernière dépendait, il est vrai, de son état d'esprit : aujourd'hui, le traître sait qu'aucun mouvement d'humeur ne viendra modifier la sentence que les tribunaux aveugles prononceront contre lui.
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Saturé de richesses, le duc de Bourgogne tentait d'exprimer sa grandeur au travers d'un ensemble d'attitudes et d'images où les splendeurs traditionnelles du Moyen Âge se mêlaient curieusement aux manières raffinées d'une vie de cour qui annonçait la Renaissance. Au sein du brillant édifice que sa richesse et son imagination avaient érigé à la gloire de la chevalerie, Philippe s'adonnait à toute une gamme de plaisirs raffinés. Il entretenait une troupe d'excellents musiciens ; sa bibliothèque contenait nombre de précieux manuscrits richement enluminés, aux reliures incrustées de pierreries. A proximité de Calais, son château de Hesdin lui offrait la possibilité de satisfaire les caprices que lui inspirait son humeur : dans les jardins, de petits ponts s'effondraient, précipitant dans l'eau le visiteur imprudent; des souffles d'air inattendus soulevaient soudain les jupes des dames… En dépit de son âge, le duc continuait à chasser et à jouer au tennis. Toutefois l'amour restait son divertissement favori. Lorsqu'un troisième mariage l'unit à Isabelle du Portugal, il prit pour devise "Autre n'aurai", mais chacun comprît aussitôt qu'il entendait par là renoncer aux épouses et non aux femmes en général. Ses quelques trente maîtresses avouées lui avaient valu une jolie moisson de bâtards qui s'épanouissaient à la cour ou dans le sein généreux de l'Eglise.
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Tandis que Louis remontait la vallée de la Loire pour retrouver ses châteaux favoris, un profond silence descendait sur le royaume : le silence des princes. Pour aucun d'eux, son père n'avait fait davantage que lui. Cependant, les nobles du royaume voyaient maintenant le règne de Charles VII comme un âge d'or, tandis qu'ils voyaient celui de son fils comme un cauchemar. Louis exerçait ses droits avec une autorité que n'avait pas son père, et tous les nobles du royaume, du plus petit au plus puissant, étaient désormais soumis à une pression qu'ils n'avaient jamais ressentie auparavant. Mais le mécontentement avait des racines plus profondes. Louis en avait trop fait : il avait balayé trop de préjugés, bousculé trop de conventions, il était allé trop vite et dans trop de directions à la fois. Les craintes qu'avait fait naître la tumultueuse carrière du dauphin s'étaient trouvées confirmées par les agissements du roi. En somme, il ne répondait pas à l'image qu'on peut se faire d'un souverain.
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Dans son parcours sinueux, la Loire glisse comme une flèche d'argent au centre de la France. Passé le Bourbonnais, son cours se fait plus large et plus serein, et, vers Orléans, elle décrit une large courbe pour rejoindre Blois, traverser la Touraine puis l'Anjou et retrouver la mer dans la région de Nantes. Sous les cieux calmes de l'Orléanais et de la Touraine, le fleuve roule ses flots majestueux à travers un merveilleux paysage de roches abandonnées et de collines couvertes de vignobles. C'est là le cœur même du royaume ; c'est dans la beauté de cette contrée, dans la douceur de son climat, dans le charme de ses villes et l'élégance de ses châteaux, dans la langue claire que parlent ses habitants qu'il faut chercher aussi l'essence même de la France. Le ciel, l'eau et les forêts s'y marient avec tant de grâce qu'on ne peut rêver cadre plus parfait pour mener une existence paisible.
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Dans les temps primitifs, il était d'usage que le vainqueur mangeât, pour s'en approprier la force, l'ennemi qu'il venait d'abattre. De même, Louis XI semblait avoir fait siennes la précipitation et la cruauté de Charles de Bourgogne. Peut-être, dans les régions les plus secrètes de sa psyché, se vengeait-il de sa personnalité de diplomate - dont le triomphe, en scellant son génie, marquait aussi la fin de la grande expérience de sa vie - en adoptant l'opiniâtreté de l'homme qu'avait détruit cette même personnalité. Quoi qu'il en soit, à cinquante-quatre ans, Louis était encore suffisamment souple pour s'interroger et pour répondre objectivement aux questions les moins complaisantes. Durant l'hiver 1477-1478, il reconnut qu'il avait abandonné la ruse pour l'action et les bénéfices durables pour des avantages immédiats, et que l'ivresse du succès avait gâté sa juste appréciation des réalités et amolli la discipline qui convenait à sa véritable nature. Il se passa alors en lui un rajustement du moi, retrouvé, et du non-moi, ré-étudié, un travail d'autant plus difficile qu'il était gêné chez lui et par l'âge et par le pouvoir. Il comprit que sa mission consistait à redonner au royaume ses anciennes frontières et non pas à conquérir des territoires nouveaux.
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A la fin de 1475, Louis XI voyait sa politique porter les fruits qu'il escomptait. A court d'argent pour payer ses mercenaires, le duc de Bourgogne, qui refusait hautainement de le reconnaître, sentait le moral de ses troupes se détériorer chaque jour davantage. Ses sujets, voyant leurs intérêts méprisés, leurs ressources menacées, leur négoce et leur ravitaillement compromis, commençaient à se montrer récalcitrants et ne votaient plus de subsides à leur maître qu'à moins d'y être contraints par la force. Dans sa campagne contre la Bourgogne, Louis utilisa en outre la plus subtile des armes, c'est-à-dire la propagande. Les cruautés dont le duc s'était rendu coupable à Dinant et à Liège, le mépris qu'il affichait à l'égard de la population de ces villes, la brutalité avec laquelle il traitait les places fortes dont il s'emparait, tout cela donnait au roi la possibilité de dépeindre Charles comme l'adversaire de la bourgeoisie et de la paix, cette paix sans laquelle ne pouvaient prospérer ni le commerce, ni l'agriculture, ni rien de ce qui fait la vie agréable. En décembre 1475, Louis XI avait fini de tisser la toile dans laquelle il comptait prendre son ennemi. Au fil de son travail, il avait élaboré de que nous appelons aujourd'hui "guerre froide", une guerre subtile et complexe dont seules sont exclues les hostilités militaires.
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