Addictif mais pernicieux, ce roman hérité de la Masse Critique de mars est resté confiné un trimestre chez mon concierge … je prie l'écrivain et l'éditeur d'excuser le retard de ce commentaire et les remercie de leur générosité.
Addictif, cet ouvrage l'est incontestablement et l'auteur, notaire de métier, sait nous guider dans les arcanes d'une succession et nous mener dans les zones d'ombres de « l'affaire Ranucci » … difficile d'en dire plus sans dévoiler l'intrigue ou plutôt les intrigues puisque les chapitres nous baladent des années Giscard aux années noires de l'occupation à Nice. Impossible une fois ouvert de refermer ce livre avant la postface.
Lecture d'autant plus agréable que Franck KER possède une plume truculente, imagée, humoristique, qui tranche avec le style compassé généralement dévolu à la corporation notariale dont est issu
François KERESTEDJIAN.
Mais
L'affaire Codréanis est un ouvrage pernicieux. Car la fin justifie-t-elle les moyens ? La noblesse d'une cause autorise-t-elle l'emploi de méthodes illicites ? La défense d'un accusé permet-elle de diffamer un mort et de harceler un innocent héritier ?
Moralement ces pages sont scandaleuses, et qu'un notaire commette un faux, crache sur la mémoire d'un retraité décédé, terrorise un client, harcèle un avocat et diffame la police n'est pas, à mes yeux, acceptable.
Ce roman méritait une conclusion différente … puisse l'auteur en relisant Crime et Châtiment y trouver la distinction entre le bien et le mal.
Pernicieuse l'est également l'écriture, inspirée de Céline plus que d'Audiard, qui multiplie allusions antisémites, paragraphes misogynes et caricatures du vulgum pecus. le « mannequin de chez Emmaus » (page 180) est aussi choquant que les propos d'un ex président sur les « sans dent ».
Comme il est regrettable que Franck KER n'ait pas écouté sa belle mère (p 149) et n'ait pas profité de son appréciation sur son « style » et « l'histoire en général » !
Cela aurait gommé ces imperfections, amélioré les trop longs chapitres 3 (42 pages) et 4 (52 pages) et évité le loupé du troisième paragraphe de la page 31 où, dans mon exemplaire, les apostrophes sont devenues de basses virgules.
Ce premier roman, imparfait mais prometteur, annonce une suite que j'attends impatiemment en espérant qu'elle effacera les faiblesses qui tachent ces feuilles.
Je parierai que Francis KER se dirigera vers les Ardennes sur les traces d'une R16 ?