Comme il est dur de constater que tu es vide, que ton ombre pèse sur la terre, que l'air qui t'entoure est âcre et que tes rêves se noient. (p.121)
Je lui avais dit alors que le takfirisme, sentence jetant l'anathème sur ceux qui ne pensent pas comme nous, de plus en plus répandu dans le monde musulman, était la cause de notre désastre.
Je considérais le fait d'être débarrassée de ceux que j'aimais comme un nécessaire dessèchement qui me rendrait plus forte. (p.104)
J'étais seule, les pieds posés sur la margelle du bassin, je savourais la douce brise de septembre. Je sirotais un jus de fruits tout en préparant la rentrée scolaire et ma vengeance sur celles qui me faisaient sentir que j'étais banale et inapte à profiter des plaisirs de la vie. Les gouttelettes d'eau qui giclaient de la fontaine chatouillaient mes orteils. J'avais besoin de la haine pour arriver à l'amour, pour laisser derrière moi toute la cendre, le brouillard des choses et des visages. (p.92)
Oui, ce lieu possédait une âme, que j'allais longtemps chercher à reconstituer, ballottée entre Mariam, de plus en plus austère et silencieuse, et Safâ' et Marwa, qui conspiraient pour me sauver et me ramener vers la lignée ds femmes qui assument joyeusement leur féminité. Moi, j'avais l'impression que mon corps était une cave obscure, humide, où les araignées tissaient leurs toiles dans des relents de putréfaction. J'attendais le jour du hammam avec impatience. (p.40)