Citations sur Je suis déjà venue ici (8)
Debout dans la cuisine, elle coupe les légumes sur la planche pour les faire sauter ou cuire à la vapeur, grille la viande, plonge le poisson dans un court-bouillon, prépare un assaisonnement avec de fines lamelles de bonite fumée et des petites sardines séchées au soleil et cuites à l’eau, confectionne un potage de miso au tôfu et aux minces tranches de pate de soja fermenté frit, puis des haricots adoucis par du sésame, se lance dans un zôsui, en faisant cuire du riz dans un bouillon à base d’œufs et de légumes ou de poissons de saison…
Cette voix sensuelle l’enivra. Il ressentit un chatouillement au niveau du pénis, et cela se transforma d’un coup en un violent flux sanguin qui parcourut tout son corps.
L’adolescent était assis sur le matelas, bas du corps dénudé, les fesses à même la partie supérieure du pantalon de pyjama.
Dans ses mains il tenait quelque chose de dur, dressé, qu’il frottait frénétiquement de bas en haut, avec une expression de plaisir paroxystique, bouche bée, les yeux révulsés sous l’extase. […]
La chose dans sa main ressemblait à une belle plante, resplendissante, de la teinte pâle d’une fleur de cerisier. Turgescente, sur le point de gicler.
Quelle fertilité… Quelle éros… Quelle vitalité…
Elle ne savait pas très bien quels sentiments il lui portait. En la caressant, il murmurait parfois : « Je t’aime. » Elle aussi, dans ses bras, lâchait un « Je t’aime. »
Mais elle ne croyait pas à ces mots-là. Ni lui non plus, sûrement.
Le cas contraire ne l’aurait pas attristée pour autant. Dès lors qu’il répondait à son besoin de caresses, ici et maintenant, les mots « Je t’aime », « Moi aussi » ne pouvaient pas être totalement feints.
Malgré tous ses efforts, elle ne ressentait qu'un grand vide, avec l'impression d’être aspirée vers les entrailles de la terre. Comment faire pour échapper à cette sensation? Ses questions restaient sans réponse, puisqu'elle était incapable de se représenter l'avenir. Et cela l'effrayait d'autant plus.
Continuer à écouter dans ce wagon une histoire d'insectes racontée par un vieil homme lui parut soudain insupportable.
"Kantan et Haïkus"
Si une femme perd parfois le contrôle de son corps, il arrive que l'homme perde celui de l'esprit;
(Pourquoi si triste, p161)
Mais soudain, elle décida de ne plus y penser.
"C'est bon. Ça finira par s'arranger. Sinon, tant pis, ça m'est égal! Advienne que pourra ... Je n'ai qu'à m'imaginer en train de traverser un pont dangereux. Je mets un pied dessus, j'avance, je poursuis ma traversée, et puis, je me retrouve de l'autre côté."
Depuis quand tenait-elle intérieurement ce genre de raisonnement? Elle n'en avait aucune idée.
"Je suis déjà venue ici"
Car Tokyo, elle en était certaine, était une mégalopole qui lui offrirait encore beaucoup de buprestes. Elle les dépouillerait de leurs ailes l'une après l'autre, et en tirerait satisfaction, comblée. Ainsi passeraient les années et, un jour, l'autel portatif serait entièrement décoré d'élytres. Son autel intime, bien à elle.
Gainées d'un collant noir, ses jambes qu"on ne pouvait décidément qualifier de superbes continuaient de pédaler. Vigoureusement, courageusement, dans une nuée de flocons.