L'odeur d'une mer à la voix de fausset flottait parmi les cocotiers.
En haletant, il leur apprit que Margio avait tué Anwar Sadat. Il le leur dit sous le coup de l’émotion, pour que Kyai Jahro se dépêche de réciter la prière des morts, cela faisait partie de ses prérogatives ces dernières années. « Mon Dieu ! », dit le major Sadrah après un court moment d’affolement. Ils se dévisagèrent un instant, comme s’il s’agissait d’une blague dont ils n’avaient pas compris le sens. « Je l’ai vu ce midi brandissant un vieux sabre japonais tout rouillé datant de la guerre. Maudit garnement, j’espère qu’il n’a pas repris cette arme de malheur que je lui ai confisquée. – pas du tout, dit Ma Soma. Le gamin lui a mordu à mort la veine jugulaire. »
Il regardait la scène comme une pièce de théâtre qu'on aurait jouée à domicile, vérifiant que personne ne sortît de son rôle.
Le vent qui soufflait lui faisait savoir que Maharani avait pris la décision de s'en aller. Il espérait avoir l'occasion de la revoir, de faire la paix avec elle, de lui dire qu'il n'était pas à l'origine de cette funeste affaire, mais que tout avait été déterminé par le destin.
C'est alors que le tigre qui siégeait dans le corps de Margio en sortit. Il avait la blancheur d'un cygne.