Margio a tué Anwar Sandat et pour tout le monde, c'est une nouvelle ahurissante. Margio, c'est un bon gars, certes un peu renfrogné, mais tranquille. Seulement voilà, le jeune homme a un tigre dans son corps - un héritage familial.
J'ai adoré les pages où les légendes s'engouffrent, où l'on bascule dans le réalisme magique. J'ai adoré la beauté de ce tigre blanc comme un cygne, blanc comme un nuage, blanc comme du coton, dont notre héros tombe éperdument amoureux, et on le comprend; j'ai été fasciné par l'énormité de la sauvagerie qui peut s'emparer de celui que ce beau et si poétique félin habite. La conteuse du village de son grand-père, Ma Muah, m'a bien séduite aussi, avec son stock d'histoires qu'elle n'a pas besoin de complètement inventer, « car, disait-elle, tout cela avait réellement eu lieu dans le passé ». Un passé où donc les princesses djinns enlevaient de beaux garçons pour les emmener dans leur palais, et où il y avait des unions matrimoniales entre les hommes et les tigres - ce qui explique que Margio ait pu hériter de l'un d'eux.
Ce qui est dommage, c'est que le reste du roman, bien qu'étant d'une qualité tout à fait estimable, n'est pas aussi captivant. L'évolution, les problèmes de famille, les tiraillements du héros qui vont conduire au meurtre, sont évoqués avec justesse et c'est intéressant d'être dans le quotidien d'un village indonésien. Mais c'est moins vif, moins étonnant, moins drôle que mon autre lecture d'
Eka Kurniawan,
Cash. du coup, j'ai été un petit peu déçue.