L’ombre des platanes héberge quelques îlots de tables. Le bleu tentateur d’une terrasse m’attire. Par chance, pratiquement toutes les places sont libres. Un mur de pierres où s’effrange un rosier grimpant préserve du vent. Passer commande et apprécier une exquise salade. Savourer les rayons de soleil aussi suaves que mon café gourmand. J’étends les jambes, je ferme les yeux à demi. Le délicat parfum des roses anciennes s’insinue entre les parasols colorés. Encore noués, ils laissent vagabonder la lumière.
Je l’accompagne jusqu’au quai de départ de la navette. Là, sans se soucier le moins du monde des sourires de connivence des passagers, il m’entoure de ses bras et m’embrasse. Le temps ondule, nous saupoudre d’une ribambelle d’éclats de joie. Les lignes du sillage du bateau nous relient encore tandis qu’il s’éloigne. Lorsqu’elles se diluent dans la tiédeur du soir, s’attardent ces filaments d’écume que j’enroule autour de mon cou.
Le vent a forci. Les vagues mousseuses fardent les roches du bord de mer. Puis se dilapident, ne laissant que des écharpes scintillantes de leur passage. Les goélands cendrés, avec de grands cris effarés, suivent la courbe des nuées d’écume. Cette palette de blancs purifiés, de rouges brossés, de bleus délavés, fascine mon regard.
Avril avait débuté. Les giboulées aux gouttelettes vivifiantes cinglèrent enfin ma raison, ranimèrent mon esprit et mes pas. Après des fins de semaines à sillonner la forêt avoisinante, à humer le parfum entêtant des jacinthes sauvages, à traquer les pétales veloutés des anémones sous les replis herbeux, à m’émerveiller devant les teintes lumineuses et changeantes s’infiltrant dans le creux des feuilles vert tendre, je sus que je pouvais de nouveau me regarder dans un miroir et me reconnaître.
Commence à aimer maintenant, à ce moment même. Ouvre ton coeur et laisse-le te guider.