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Citations sur Demain j'étais folle : Un voyage en schizophrénie (29)

La vérité sans curiosité devient vite un peu sinistre.
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Et pour l’avoir vécu, je sais que j’étais beaucoup plus facile à gérer quand j’avais un peu d’espoir et de respect de moi-même que quand tout avait été balayé. « Freedom is just another word, for nothing left to lose », chante Janis Joplin. Quand on vous a tout pris, quand il ne vous reste plus rien à perdre, qu’il s’agisse d’honneur, de respect de soi, de santé, de métier, d’amis, d’avenir ou de quoi que ce soit d’autre, vous êtes libre, complètement libre. Et épouvantablement dangereux. Car pratiquement plus rien ne vous retient. La contrainte est parfois nécessaire. Je ne serais pas vivante aujourd’hui si la contrainte avait été interdite en milieu psychiatrique. Mais l’humiliation et la violence ne sont pas nécessaires. J’ai été mise au tapis par des gens qui connaissaient leur boulot, qui avaient suivi une formation et savaient comment s’y prendre. C’est désagréable, mais ça ne fait pas mal. Mais d’autres personnes m’ont trainée par terre, en faisant taper ma tête sur les barres de seuil que nous franchissions, elles m’ont écrasée sur un sol en béton, flanqué un genou dans les reins et m’ont appuyé la tête dans des oreillers pour que le manque d’air me contraigne à cesser de résister. Ça, ça fait mal. Des douleurs physiques m’empêchent encore parfois de dormir la nuit, et même s’ils sont beaucoup plus rares maintenant, les cauchemars n’ont pas complètement disparu.
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Il me laissa finir de parler, ce qui m’impressionna beaucoup. Il fit ensuite une chose qui m’impressionna encore plus : il me demanda pardon pour avoir eu recours à la force sans me parler et sans avoir essayé d’autres méthodes au préalable. C’était la première fois qu’un médecin s’excusait auprès de moi, ce fut la seule, et j’ai trouvé ça fantastique. J’étais dans une situation incroyablement humiliante, je me sentais toute petite, mais il faut assez grand pour me relever un petit peu. Je lui en suis toujours reconnaissante. Il me demanda s’il pouvait faire quelque chose pour moi, à cet instant, compte tenu de la situation. Je compris que c’était une véritable offre, et parce qu’il me traitait avec respect, j’eus envie de collaborer et de lui demander une faveur qu’il avait réellement la possibilité de m’offrir, rien d’inaccessible, dangereux ou délirant. Je ne le provoquai pas en demandant à sortir, à « aller bien » ou ce genre de requête.
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J’entendais aussi des voix. C’était parfois un désordre grésillant ou hurlant dans ma tête, comme un baladeur à plein volume que je ne pouvais pas éloigner, quoi que je fasse. Il m’arrivait de me taper la tête contre le mur pour que les coups sourds atténuent un peu ce chaos. Ça aidait parfois, mais pas toujours. D’autres fois, j’essayais de m’arracher les cheveux ou de faire des trous dans ma tête avec mes ongles. ça ne m’était jamais d’aucun secours, mais c’était une espèce de réaction de panique visant à faire un trou dans ma tête pour en laisser échapper un peu de pression avant que tout n’explose. C’est ce que je ressentais. A d’autres occasions, c’était un murmure faible, immonde, ou une voix claire qui livrait des messages sans ambiguïtés. « Tu vas mourir », disait-elle. Ou bien : « Ouvre-toi les poignets et dessine un cercle de sang autour de toi, ou toute ta famille mourra ». Pas facile. Que feriez-vous si vous receviez un message pareil ?
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Ça a commencé doucement, progressivement, presque sans que je le remarque. C’était comme par une belle journée ensoleillée, quand le brouillard s’installe petit à petit. D’abord comme un voile mince devant le soleil, puis de plus en plus dense, mais le soleil brille toujours, et ce n’est que quand il ne brille plus, quand tout est froid et que les oiseaux ne chantent plus, que vous remarquez ce qui se passe. Mais à ce moment là, le brouillard est tombé, le soleil a disparu, les points de repère se fondent dans le paysage et vous n’avez plus assez de temps pour retrouver votre chemin avant que le brouillard ne soit si épais que tous les chemins deviennent invisibles. Alors vous avez peur. Car vous ne savez pas ce qui se passe, ni pourquoi, ni combien de temps ça va durer ; vous comprenez que vous êtes seul et sur le point de vous perdre, et vous avez peur de ne jamais retrouver le chemin pour rentrer chez vous.
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Se voir établir un diagnostic en psychiatrie peut être ressenti comme une condamnation, quelque chose d'inconnu, et si on ne se sentait pas encore malade, la situation change à ce moment là. Je me rappelle que pour ma part j'avais du mal à comprendre que ces expressions et ces descriptions aussi étranges qu'effrayantes s'appliquaient à moi. C'était très bizarre, très grave. C'est ce que l'on disait des gens mais moi je n'étais pas comme ça. Un diagnostic peut aussi avoir un effet positif. On peut enfin mettre un nom sur ce qui ne va pas, on a la confirmation qu'on est malade, pas méchant ou paresseux.
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La bonté n'est pas si facile à reconnaître quand le monde a été mauvais si longtemps. Et il n'est pas évident de croire en soi quand plus personne ne le fait depuis belle lurette.
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je me permets de rajouter un petit mot à ma première critique...
je découvre ce matin, un intéressant article dans le figaro santé sur les maladies mentales où l'on parle entre autres, de ce livre "Demain j'étais folle"...
Il s'appelle "Les langues se délient sur les maladies mentales"
voici le lien
http://sante.lefigaro.fr/actualite/2014/02/21/22022-langues-se-delient-sur-maladies-mentales
et un extrait où l'on parle spécifiquement de ce livre... aide à une maman...
"Parmi tous les livres qu'elle a dévorés, c'est celui de Arnhild Lauveng, schizophrène devenue psychologue, qui l'a le plus aidée. «Tout au long du récit, on voit l'importance capitale des regards qui sont portés sur elle, explique Bénédicte. Ainsi, quand sa mère lui dit qu'elle lui garde un service en porcelaine pour le jour où elle aura son appartement personnel, la jeune malade se sent regonflée de confiance et d'espoir. Avec mon fils, je me dis souvent: “Suis-je en train de lui témoigner ma confiance ou pas?” Ce critère est devenu important pour moi.»"
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Les symptômes m’intriguent toujours, dans une certaine mesure. Il y a si peu de réponses toutes faites et tant de points de vue différents, le même symptôme peut avoir des significations très diverses en fonction de la personne et de la situation. Voilà ce qui fonde la bonne curiosité. Et l’humilité. Car même si ce n’est pas toujours nécessaire de comprendre la raison d’un symptôme, il vaut souvent mieux réfléchir un peu sur sa fonction pour le traiter comme il faut. A ce moment-là, il n’est pas idiot d’oublier les nomenclatures et les descriptions des pathologies, et de se concentrer plutôt sur l’individu et sa situation. Qui es-tu ? Dans quel contexte vis-tu ? Car ce ne sont jamais des personnes complètement isolées. Elles appartiennent à un système, quel qu’il soit. Elles peuvent modifier ces systèmes, mais l’inverse est aussi vrai. Alors, si nous voulons comprendre l’individu, nous devons non seulement le prendre en compte, lui, mais aussi l’ensemble dans lequel il s’inscrit. Nous en comprendrons sans doute pas tout à ce moment-là non plus, mais quand même peut-être un peu plus que si nous nous en tenons aux diagnostics. Car ces derniers ne font que décrire. Si nous voulons comprendre, il faut regarder les individus.
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Ce besoin d’attention que nous manifestons tous au quotidien est évidemment beaucoup plus intense quand nous nous sentons menacés ou en danger. Si quelqu’un tombait d’un quai dans l’eau et se mettait à appeler au secours, il ne viendrait à l’idée de personne de passer devant lui en disant calmement : « Il fait juste ça pour attirer l’attention ». Bien sûr qu’il cherche à l’attirer ! Il est en danger de mort, incapable de se tirer d’affaire, son unique espoir de préserver son intégrité physique et de continuer à vivre est d’attirer l’attention de ceux qui peuvent le secourir. Ceux qui entendent ses cris le comprendront sur-le-champ et feront tout ce qui est en leur pouvoir pour l’aider. Bien entendu. Voilà pourquoi j’ai peur quand je vois que, dans le domaine des soins psychologiques, on continue à rédiger des dossiers qui identifient des appels au secours, souvent très directement, sans que suivent des réflexions professionnelles sur le type d’aide à apporter ou sur l’attitude que le travailleur social ou les services de santé doivent apporter.
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