à Maurepas il n’y avait rien
à Maurepas *
il n’y avait rien
il fallait tout
faire
et refaire
en béton caverneux
le nom suffit
pour dire le bruit
qu’il ferait
pour que les paysans
deviennent des ouvriers
en un rien de temps
en mille cinq cent logements
dont trois cents en quatre mois
d’hiver
poussèrent
hors des cimetières
de la guerre
comme une échelle de corde
à l’assaut du soleil
jusqu’en haut des tours
où la lumière
venait des quatre coins
du ciel
…
* Nom d’un quartier de Rennes
je me lève
je me lève
tu te couches
je viens de l’Est
tu es de l’Ouest
et même
à l’ouest
comment faire
pour faire
taire
les fureurs de Babel
dont les sons
ne sont pas toujours
sur le même ton
s’ils viennent
du Nord
du Sud
du soleil
de la pluie
comme avant
avant
avant hier
les paysans
avant
avant hier
les Pieds-Noirs
parmi les blancs
de blancs
avant hier
les Maghrébins
parmi les Noirs
de noirs
aujourd’hui
…
il fallait faire vite
il fallait faire
vite
au moins cher
d’où les cris
plus tard
beaucoup plus tard
dans les escaliers
sur les planchers
l’immeuble ne fait pas de bruit
ce sont les gens qui en font
du sol
au plafond
dit l’architecte qui aime Cyrano
comme son jumeau
des gens qui ne vivent plus
comme ceux d’autrefois
quand furent construites
les tours de Maurepas *
…
* Nom d’un quartier de Rennes
Pourtant le rêve de Maurepas...
Pourtant
le rêve de Maurepas *
était grand
le rêve de nos parents
de nos grands parents
sortis de la guerre
de ses effondrements
sortis de la terre
une terre de vignes
dont le vin était le plus vert
du royaume de France
de mauvaises pâtures
de mauvaises récoltes
de mauvais repas
…
* Nom d’un quartier de Rennes