Nine est née de l'amour entre une femme française et un Algérien. Rien de si original aujourd'hui mais en 1962 (date de naissance de l'auteure également), il y avait risque à être amoureuse d'un « Arabe », risque à être épris d'une « colon » (pas de féminin à ce mot, bizarrement) mais les deux amoureux ont mis un route un bébé que le papa ne connaîtra jamais, exécuté comme traître à la patrie par les soldats du cru,
Alors, Madame Plume, la maman, est partie avec sa fillette vers un pays de froid et de mélancolie, une ville du nord de la France où elle s'applique à faire de Nine une petite fille épanouie, entre leçons de piano, école et vie quasi fusionnelle entre les deux exilées, l'une accrochée à la hanche de l'autre,
Pourtant, Nine n'est pas heureuse, elle est amputée vive d'un père idéalisé parce que jamais connu, Alors le jour du concours de piano, elle s'effondre en un vertige qui va la laisser inerte plusieurs jours, Sa mère « se demandait si Nine ne souffrait pas d'un mauvais sort que lui auraient jeté les soldats, le choc provoqué par le bruit des kalachnikovs avait-il fait tomber sur son ventre arrondi tout le poids des ténèbres ? »
Roman de l'enfance abîmée, roman de l'exil, de la quête d'un passé enfoui dans la mémoire d'une mère mutique. Je crois que les mots « rapatriés » ou « Pieds-Noirs » ne sortent jamais sous la plume de l'auteure, comme s'ils étaient douloureux, réducteurs. Plume et Nine ont juste volé d'un continent à l'autre, dans un monde rêvé et poétique, parcouru d' un amour tendre et fort mais si désespérant du fait de l'Absent, Et l'on sait bien que Nine, dès qu'elle le pourra, ira chercher sur le sable chaud et dans l'air brûlant de l'Algérie le souvenir d'un père – fantôme. Elle renouera avec Fatma la douce qui a pris soin de sa mère, Il n'empêche qu'elle ne connaîtra jamais l'homme dans sa cabane en bois, jeté là par ses assassins,
Une belle plume, douce et poétique, sans aucun pathos, sans rancoeur, sans complaisance larmoyante pour le sort de tous ceux qui ont été victimes de cette guerre qu'on qualifiait à l'époque d'« événements », et de toutes les guerres, Seulement quelques mots qui sonnent juste et beau,
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Un récit intime sur l'exil d'une mère, Mme Plume et de sa fille Nine, parties d'Algérie après la mort du père. La vie en France qui s'écoule lentement et sans soubresauts, les questions de l'enfant qui restent sans réponse et qui la font soufrir. Beaucoup de choses sont évoquées dans ce court récit bien mené, dont j'ai apprécié la lecture. La relation entre la mère et la fille est complexe et intéressante. On comprend au fur et à mesure le fonds du problème, tout est amené avec justesse et douceur. L'écriture est très plaisante, j'espère pouvoir lire d'autres romans de l'auteur, peut-être dans un style plus "fictionnel". Merci aux éditions Buchet-Chastel et à Babelio pour l'envoi de ce livre dans le cadre de l'opération Masse Critique.
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