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Critique de aa67


Quelle poésie pour raconter une maison.
Quel talent pour transcrire ce que nous faisons bien trop souvent subir aux objets. C'est eux qui donnent densité à nos vies et nous n'y pensons que rarement.
Dans "Je suis la maman du bourreau", David Lelait-Helo m'avait fasciné par sa capacité à mettre en mots ce que des humains un peu hors normes éprouvaient. Et de fait je suis entrain de lire plusieurs de ses oeuvres aux thèmes très différents. Tous nous font entrer dans un monde que l'on croit un peu onirique en début de livre, mais qui très vite dévoilent la face obscure des êtres.
Dans celui-ci, si on ne lit pas la 4ème de couv., on est persuadé que c'est un être humain qui s'exprime. Puis on réalise que ces perceptions sont celles d'une maison qui va être démolie. Au lieu de gémir, elle dit simplement avoir besoin de dire ce qui s'y est joué, de dévoiler le drame de son passé. Ses souffrances, sa vie sont comme un conte, conte à double face.
Ses confidences sont touchantes à tel point que, sans la connaitre, j'en ai été quasi culpabilisée moi-même. Culpabilisée de la savoir maltraitée, négligée, sous-estimée et blessée. Pourtant elle ne nous blâme pas ; elle a tant aimé sa ville Buenos Aires, son pays l'Argentine, sa langue l'espagnol.
Son chemin de vie l'a grandie. Ses souvenirs remontent à la surface d'une "ville assommée de tourments", comme dit l'auteur. "Soledad Salvador, au 38 de la Colle del Primer Dias, était reine en son château".
Cette maison rugit littéralement à la vie.
Depuis la "mode" de l'écologie à l'échelle planétaire, bien des auteurs devraient lire cette ode à la vie, cette leçon que l'on se prend en pleine figure de la part d'un objet.
David Lelait-Helo a écrit des contes, des biographies, des récits, ce qui explique certainement qu'il écrive aussi, et si merveilleusement, des romans.
Juste une citation pour mettre l'eau à la bouche :
"Vous avez des yeux, j'ai des fenêtres.
Vous avez des paupières, j'ai des persiennes.
Vous avez des rides, j'ai des fissures.
Vous avez de l'âme, j'ai des miroirs.
Vous avez des secrets, j'ai des caves enfouies.
Vous avez des larmes, j'ai des la pluie.
Vous avez le sang, j'ai l'eau.
Vous avez la fièvre, j'ai la flamme.
Vous respirez, je m'aère.
Vous naissez, je m'élève.
Vous mourrez, je tombe.
Vous êtes un cadavre, je suis une ruine.
Vous avez des chagrins, j'ai les vôtres."
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