Citations sur Les amants de Baker Street, tome 3 : Les années Sussex (4)
“— Il ne fallait pas vous arrêter, bon sang !
— Oui, bien sûr, j’aurais dû ignorer mon mari effondré sur le sol après une échauffourée avec un bandit qui aurait très bien pu le blesser, répliqua froidement Holmes. Exactement ce que vous auriez fait dans la même situation.
Le docteur croisa les bras sur la poitrine, rejeta la tête en arrière et lâcha un profond soupir.
— Je suis désolé, s’excusa-t-il au bout de quelques instants. Ça me met en rage de vous ralentir au lieu de vous aider. Je ne suis plus qu’un stupide invalide, apparemment.
— Je vous saurais gré de ne pas dire du mal de l’homme que j’aime, rétorqua Holmes. Il est loin d’être stupide et une blessure à la jambe n’en fait pas un invalide. Le suspect aurait pu nous échapper de cent manières différentes. Ça fait partie du jeu.”
Les choses changent, c’est tout. Ce n’est pas forcément triste. Et ce n’est pas toujours bien d’essayer de les retenir.
“Holmes eut soudain une idée très claire du bonheur.
Il n’avait jamais vraiment cru en Dieu. Pourtant, il lui vint soudain l’envie de remercier quelqu’un, n’importe qui, de lui avoir accordé cette vie. Dieu, le Destin, la Providence ou le Hasard… Peu importait. Tout ce qui l’avait amené à cet instant précis était sacré.
Et dire qu’à une période de son existence, il s’était cru incapable d’être heureux, incapable d’aimer et indigne de l’être. Il avait cru qu’il mourrait seul, anonyme, au cours d’une enquête ou d’une overdose de cocaïne.
Comme la vie était étrange. Et comme elle était belle.”
“— Je n’ai jamais pensé que nous étions de vieux croulants, lâcha le docteur en se laissant tomber sur le sofa. Mais j’ai quelques fois l’impression d’appartenir à un univers en train de disparaître. Pas vous ?
Holmes lui tendit son verre et s’assit à côté de lui.
— Mon pauvre Watson, répondit-il affectueusement. Ne vous en faites pas, je suis certain que tous les hommes de votre âge depuis le début de la civilisation ont réagi de la même façon.
— Voilà qu’on me traite de sénile, à présent…
Holmes lui adressa un sourire amusé, mais il n’eut pas le cœur d’y répondre. Avec un soupir, il prit une gorgée. L’alcool lui réchauffa agréablement la gorge.
Son mari se pencha pour l’embrasser doucement.
— Ne vous en faites pas, murmura-t-il contre ses lèvres. Vous serez toujours mon sénile préféré.
Cette fois, Watson sourit. Ils pressèrent leur front ensemble, communiquant silencieusement tout ce qui, après deux décennies de vie partagée, n’avait plus besoin d’être prononcé. Je vous aime. Je vous comprends. Je serai toujours à vos côtés.”