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Critique de MarianneL


Les tribulations des moldaves cherchant la terre promise.

«Si j'avais été François Villon, j'aurais composé La Ballade des pendus.
Comme je suis Vladimir Lortchenkov, j'ai écrit ce roman. Des mille et une façons de quitter la Moldavie

Les tentatives réitérées et désespérées des habitants de Moldavie qui cherchent à quitter ce pays frappé par la misère pour émigrer vers l'Italie, un paradis sur terre dont la représentation de prospérité est si idyllique en Moldavie que la rumeur circule qu'en réalité l'Italie n'existe pas : C'est le propos de cette satire pamphlétaire de Vladimir Lortchenkov, marquée par un enchaînement de situations à la fois cocasses et désespérantes, évoquant «L'homme qui savait la langue des serpents» d'Andrus Kivirähk, en particulier par ce sens aigu de l'autodérision.

Dans le village de Larga, tous les habitants sont des candidats à l'émigration.

«-Alors, qui souhaite partir travailler en Italie ?
À Larga où vivaient cinq cent vingt-trois âmes, mille quarante-cinq mains se levèrent. Par précaution, tous les adultes de l'assistance avaient levé les deux mains, le nombre impair résultant de la présence parmi eux du garde Sergueï Mocanu, qui avait perdu un bras à la guerre.»

Pour partir, certains forment une équipe du sport qui semble être le plus approprié pour être sélectionnés dans les compétitions internationales : ce sera le curling. Un mécanicien de génie transforme son tracteur en engin volant puis en sous-marin. le prêtre du village lance une croisade pour gagner et conquérir l'Italie impie : L'imagination de ces villageois, qui déploient des moyens aussi irrationnels et absurdes que le monde auquel ils tentent d'échapper, ne les empêche pas de se heurter constamment à la réalité des frontières de l'Union européenne, et d'être ramenés sur les «rives» de la Moldavie et de ce village qu'ils tentent éperdument de fuir.

Maniant un humour bondissant et grotesque pour représenter ce monde sorti du passé soviétique et pris d'assaut aux entournures par le plus sauvage des capitalismes, Vladimir Lortchenkov dépeint une réalité économique et politique cruelle, de dénuement en Moldavie et de fermeture des frontières européennes à ses habitants qui n'ont rien à offrir, si ce n'est de vendre leur corps ou leurs organes, sous les yeux des médias occidentaux qui se repaissent benoîtement de leur sort tragique ; un pays où tout va si mal qu'ils préfèrent s'enfuir, «quand bien même leur destination serait un trou noir du cosmos, un camp de concentration ou une mer des Sargasses grouillant de criminels internationaux sans scrupules.»

Publié en 2008 en russe, et traduit en 2014 en français par Raphaëlle Pache pour Mirobole éditions, cette fable tragicomique, dépeignant les tribulations de ces villageois crédules, soumis à l'avidité des politiciens corrompus, des passeurs ou d'escrocs de tous acabits, réussit le tour de force de provoquer simultanément une tristesse abyssale et de très nombreux éclats de rire, du plus franc au plus jaune.

Retrouvez cette note de lecture sur mon blog ici :
https://charybde2.wordpress.com/2015/11/16/note-de-lecture-bis-des-mille-et-une-facons-de-quitter-la-moldavie-vladimir-lortchenkov/

Nous nous réjouissons d'accueillir Vladimir Lortchenkov le 18 novembre 2015 en soirée à la librairie Charybde, pour fêter la parution de son deuxième roman traduit en français, «Camp de gitans».

Pour acheter ce roman chez Charybde, sur place ou par correspondance, c'est ici :
http://www.charybde.fr/vladimir-lortchenkov/des-mille-et-une-facon-de-quitter-la-moldavie
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