Citations sur La fin des océans (Bleue) (34)
Rien de tout ce que j'ai pu faire ou construire n'a servi - j'ai vraiment essayé, je me suis battue toute ma vie, mais quasiment seule, nous étions si peu, nous sommes si peu, tout ce que nous redoutions est arrivé, la chaleur avait beau s'installer, personne ne nous a écoutés. (p.64)
Les hommes s'étaient mis eux-mêmes dans le pétrin, constatait Thomas, amusé. Alors que la production d'électricité issue des centrales à charbon avait participé au réchauffement climatique et à la pénurie d'eau, nous avions maintenant besoin de plus de courant encore pour produire de l'eau potable.
On ne doit pas se fier à ses souvenirs, je le sais, ils sont aussi fluctuants qu'une fable.
je n'avais pas vécu cela depuis des années, mais j'ai toujours été furieuse de constater qu'une femme, le deuxième sexe, ne pouvait s'asseoir seule au restaurant, savourer tranquillement son repas, sans qu'un homme débarque avec l'idée vague et saugrenue de la protéger d'elle-même, peut-être aussi des autres mâles, dans l'espoir que cet acte héroïque puisse déboucher sur des tendresses, dans un lieu plus intime, de préférence un lit.
Pourtant, ce n'était pas notre maison. Mais un vieil entrepôt rempli de lits de camp.
Et nous étions des réfugiés. Par définition, un réfugié n'a pas de chez soi. Nous avion perdu notre chez-nous.
Anna n'était pas pudique. Il lui arrivait de s'énerver en tenue d'Ève. Nous nous disputions souvent, certainement plus que la moyenne. Nous criions, hurlions l'un sur l'autre. Mais ses seins nus qui pointaient sur son buste me distrayaient. Une poitrine jeune et légère.
Parfois, au milieu de la dispute, elle éclatait de rire, remarquant les allées et venues de mon regard entre sa bouche qui m'engueulait et ses seins qui me souriaient. On eût dit deux grands yeux au milieu de son corps.
L'eau avait une force, un pouvoir, que j'avais toujours considéré comme absolu. Mais plus maintenant, entre les mains des hommes, avec leurs pelleteuses, leurs tunnels et leurs tuyaux d'acier, plus maintenant à l'heure de l'industrialisation, du profit et de l'État providence.
Le ciel est à la terre ce que la surface de l'eau est au monde d'en dessous : elle surplombe de hauts sommets, des vallées profondes et des millions d'espèces que l'on n'a jamais vues.
Je suis cernée par l'océan, la seule chose sur laquelle fixer mon regard est une plateforme pétrolière,son squelette brille contre le ciel de plus en plus noir. Chaque jour, on extrait deux millions de barils de pétrole, deux millions, sachant qu'un baril contient cent cinquante-neuf litres... Je n'ai pas la force de calculer combien de litres ça représente en tout par jour. Ils sont là, les gens qui bâtissent la Norvège tout en détruisant le monde. Et s'ils disaient non, tous ensemble, s'ils refusaient de travailler, s'ils faisaient grève ? Rien qu'une semaine, rien qu'un jour, ça ferait toujours deux millions de barils en moins dans la nature.
Le sentiment d'être en route, voilà ce qu'il y a de mieux sur un bateau, savoir que l'on se rend quelque part, sans savoir quand on arrivera, avoir un but à atteindre.