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Citations sur Few of us (6)

Le dernier soir, il y avait un bal. C’était une anomalie. On ne faisait plus de bal, à l’époque.
Elle est venue, vêtue de blanc, et il l’a reconnue.
Le blanc l’a frappé avant le visage. On ne faisait plus de blanc non plus.
Des plombes que les fringues étaient grises.
Il l’a vue et il s’est rappelé le blanc.
Le temps des redditions était révolu. Mais aussi celui des lessives. De la paix. Des lits.
Et donc celui des deuils.
On ne s’autorisait plus ni le noir ni le blanc.
Le gris s’était installé comme un paysage irrémédiable.
Cette femme vêtue de blanc était plus qu’un symbole. C’était une aberration. Il reconnut en elle l’aberration prophétisée.
Avant de mourir, la colonelle Veressov lui avait appris tout ce qu’il devait savoir sur les colonels. Ensuite, elle lui avait confié sa mission et elle était morte à la façon des colonels : sans rendre l’âme. « Ne jamais se rendre » était la devise des colonels. Ils sont prévoyants et vendent leur âme avant de la rendre. (« Rien »)
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Je sens mes membres car leurs os vibrent. Pas comme au réveil. Toujours pas. Quand le corps se déroule et lèche un peu de quotidien (l'eau sur le visage, l'herbe sous les pieds)... Non. Mais comme une cloche. Je suis vide. Mes membres me font exister par résonance. Je suis, en hauteur et en largeur, cette périphérie et ce périmètre, qui sonnent et grincent.
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L’expérience de la plongée en haute mer, pour les mal voyants, revient à toucher ce qu’on ne voit pas. Baigner dans le flou qu’on sait le réel. Synesthésie ultime : la peau prend le relais des yeux et tout fait sens. Antigone connaît mieux son corps que les rues, où ombres et gens se confondent, le long des murs. Vitrines et fresques. Quand on la touche, son corps sait la joie de la communication. Elle devient l’alphabet. Par contamination digitale, elle devient l’interlocutrice. L’expérience du dialogue, pour les mal voyants, c’est palper une main et la concevoir comme la note d’un pianiste prodige. Perception exacte.
Elle glisse dans l’eau. Archipel indistinct de bulles, nuage-mélasse d’algues ou peut-être l’ombre d’une coque de barcasse voilant la lune pleine, duveteuse de flou, qui rend le ciel marine. (« Le rugueux, le lisse »)
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Dehors, le vent me calme un temps, vite supplanté par les nuages de mouches qui se collent à mon visage baigné de sueur. Elles font toujours ça, le matin. Elles débarquent par salves, juste après le lever du soleil. Comme si les ténèbres, en se fragmentant, s'émiettaient en mouches. Ensuite, elles se dispersent ou meurent.
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Nous arrivons au village dans un nuage de poussière. Nous sommes tous de la même famille, car recouverts de la même couche sableuse. Nos voitures, nos peaux, nos vêtements sont rouges. La terre ferrugineuse que nous creusons chaque jour nous imprègne et nous teinte. Trempée de sueur, elle ressemble au sang. La terre saigne, m’a dit un des ouvriers, Taim.
Nous nous garons devant le premier obus. Ici, les douilles surmontées d’une chope en métal balisent les bars improvisés. Derrière ce totem extravagant, un homme accroupi à l’ombre d’une baraque en tôle ondulée. L’homme nous sourit. Il nous connaît : nous sommes les rouges.
L’homme accroupi a déjà fait tiédir la talla. C’est Idriss. Homme noir. Femme rouge. Nous nous saluons d’un serrement de main. L’équipe s’assoit en cercle sur les nattes. À l’ombre. Mais le soleil est bas, déjà, et l’ombre vite gigantesque. Bientôt, elle s’allongera et engloutira les nôtres, maigres comme des bâtons. Et le soleil disparaîtra en quelques secondes. La vitesse à laquelle le soleil disparaît, si près de l’équateur, ne cessera jamais de m’engourdir d’émerveillement. Il tombe à pic, s’écrase contre l’horizon, s’aplatit, et sombre. Comme si la terre était une mer. Ou la bouche d’une démone goinfre. Chaque soir, depuis trois mois, au crépuscule, mon soulagement de voir le soleil se coucher se teinte de peur, blanche, primitive, devant le spectacle d’une telle dévoration. (« Mahrem »)
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Elle lui écrivait que tout s'apprend, même ne pas déguerpir.
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