On peut lire dans les anciennes chroniques de Florence une histoire qui a déjà couru sur toutes les lèvres : un saint homme, dont la vie, à cette époque, était louée de tous, se retirait souvent du monde pour se plonger dans ses prières. À la faveur de ses méditations, il lui apparut un jour que les âmes des malheureux mortels qui mourraient dans la disgrâce de Dieu, et finissaient donc en Enfer, se désolaient, presque toujours, de ne subir un tel sort que pour avoir pris femme.
À ce tapage Roderigo ouvrit de grandes oreilles ; et ne sachant ce que cela voulait dire, dans son étonnement il demanda, plein de trouble, à Giov. Matteo, ce que tout ce tumulte signifiait. Giov. Matteo, feignant une grande frayeur, lui répondit aussitôt : « Hélas ! mon cher Boderigo, Dieu me pardonne, c'est ta femme qui vient te trouver. » C'est vraiment merveille de voir à quel point l'esprit de Roderigo fut épouvanté en entendant prononcer le nom seul de sa femme : sa frayeur fut si grande, que, sans réfléchir s'il était possible ou raisonnable que ce fût elle, sans répondre un seul mot, il s'enfuit tout tremblant, délivrant ainsi la jeune fille, et aimant mieux retourner en enfer rendre compte de ses actions, que de se soumettre de nouveau aux ennuis, aux désagréments et aux dangers qui accompagnent le joug matrimonial.
Les diables mêmes qu'il avait amenés avec lui, et qui faisaient partie de sa maison, imitèrent les autres, et aimèrent mieux revenir briller en enfer que de vivre dans ce monde sous les ordres d'une pareille femme.