La mortalité est montée en flèche. Les Kommandos extérieurs lui paient un lourd tribut. Sans relâche, le Comité international agit avec ses faibles ressources pour cacher des déportés promis aux transports, après avoir échangé leurs matricules avec ceux de prisonniers décédés. Les SS réclament inlassablement de nouveaux bras pour les travaux les plus terribles, puisant dans les Blocks comme dans un réservoir sans fond.
Que peut-il y avoir de pire que cet enchevêtrement de corps transformés en loques ou en pelotes de nerfs à vif, où un genou osseux sous votre omoplate est un poignard effilé, où des ongles noirs et battants se transforment en autant de lames de rasoir, où la chaleur des tôles le jour carbonise, l'air glacé de la nuit tétanise, où une effroyable puanteur de pisse et de merde imprègne chaque centimètre de la peau ?
La France manquait d'hommes et de bras, on recasait assez facilement les Gueules cassées encore en état de fournir un travail et dont le physique ne risquait pas de terrifier les collègues ni les clients. L'activité portuaire d'après-guerre étant intense, on l'avait placé dans un bureau d'une des principales compagnies maritimes du Havre.
On ne peut dire l’indicible. On ne peut décrire l’indescriptible. On n’a pas encore trouvé les mots pour traduire l’horreur de la barbarie et du massacre de masse.
Pourtant, les prisonniers ne cessent d'affluer, et le 21 août le service des Lagerschutz est informé d'avoir à préparer l'accueil pour le lendemain d'un nouveau convoi venu de Compiègne.