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Critique de Cancie


Un roman noir sur l'épuration, où Histoire et fiction sont intimement mêlées, tel peut être défini La sacrifiée du Vercors de François Médéline.
L'idée est originale de situer ce polar dans le Vercors, haut-lieu de la résistance française, juste à la fin de la guerre, après cet été 44 qui a ensanglanté le massif et ce, pendant la période de l'épuration.
L'histoire se déroule sur la seule journée du 10 septembre 1944 et commence par une découverte macabre dans une clairière, celle d'une jeune femme sauvagement tondue et violée. Il s'agit de Marie Valette, 24 ans, institutrice à Grenoble, fille et soeur de résistants, son frère André ayant été tué d'une balle dans la nuque par la milice.
Le commissaire Duroy, délégué général à l'épuration vient d'arriver à St Martin-en-Vercors. Il est là pour rencontrer Choranche, lieutenant-colonel FFI pour une signature car il doit récupérer une prisonnière, Sarah Ehrlich et la transférer à Lyon. Il remet sa mission en question à l'annonce de cette nouvelle et se rend sur les lieux de l'assassinat aussitôt. Sur les lieux du crime se trouve Judith Ashton, jeune photographe et correspondante de guerre américaine pour Life qui elle, a suivi les gendarmes.
La question va être de savoir qui a pu s'en prendre d'une façon aussi violente à la fille d'une famille de résistants ?
Sur le plateau, à cette date, les maquisards ne sont plus là, ne restent que des villageois endeuillés et quelques FFI très jeunes qui, rapidement vont trouver un coupable idéal en la personne d'un Italien Simeone Fucilla.
Sous une chaleur accablante Georges Duroy et Judith Ashton vont tenter d'y voir clair, mais il est difficile, au sortir de cinq années de guerre, et après cet été au cours duquel plus de 600 combattants pour la libération du Vercors et plus de 200 civils sont morts de soupçonner des résistants, véritables héros.
Il faut à la fois enquêter sur la vie de cette jeune femme, sur celle de cet Italien soupçonné, mais aussi sur ces jeunes qui semblent intouchables et qu'il est très difficile de mettre en cause.
On sent que Duroy n'apprécie guère ce droit que se donnent ces justiciers en tondant les femmes et cela renforce son désir de trouver qui a commis ce crime.
Ce roman pose aussi la question de savoir comment, dans cette période spéciale, la justice, peut faire son travail correctement ?
François Médéline réussit à dresser un portrait réaliste de ces hommes et de ces femmes avec leurs contradictions, leurs traumatismes, leur complexité, leurs motivations pas toujours nobles, de ces êtres pris dans la tourmente à une période où les cicatrices sont loin d'être refermées et où c'est l'heure des règlements de compte, de la chasse aux collabos et le temps de la rancoeur.
J'ai particulièrement été marquée par cette haine vis-à-vis de l'Autre, en l'occurrence, ce réfugié Italien et tétanisée par cette chasse à l'homme puis ce lynchage initiés par les jeunes FFI soutenus par les villageois. La haine vis-à-vis des communistes est également présente même si elle l'est à moindre mesure.
La vision de mêmes événements racontée par des témoins différents est, je trouve, une initiative intéressante.
C'est un récit qui soulève beaucoup d'émotions et qui ne peut laisser impassible. J'ai aimé la rencontre entre ces deux êtres qui ont peu de temps pour se connaître et l'évolution de leur relation.
Impossible de reposer le bouquin avant de l'avoir fini tant j'ai été tenue en haleine par ce polar historique, un récit fictif certes, mais dont l'intrigue se situe dans un cadre historique bien réel et qui en restitue particulièrement bien l'atmosphère.
À noter que les titres de chapitre sont empruntés à des poèmes célèbres de résistants, pour exemple, le premier « Alors commença l'épreuve », à Fragments 128 de René Char.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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