Les choses durent ce qu'elles doivent durer.
Le vieux chien de berger était né bien des années avant elle et, quand Maria Caterina rentrait de l’école, il lui sautait toujours dessus, lui léchait le visage et le cou. Mais ce jour-là il n’était pas venu à la grille. Elle avait couru tout au long de l’allée en terre battue en l’appelant et en sifflant jusqu’à ce qu’elle le vît. Il était immobile devant la porte de la maison, les pattes postérieures inertes sous son derrière maigre aux poils emmêlés. La pointe de sa queue battait faiblement par terre - un sourire triste version canine. Et ses yeux fixés sur elle ne demandaient pas d’aide, ce qui aurait peut-être été plus supportable, mais seulement pardon.
La première fois que Paolo était venu voir son fils sur l'île, ce dernier lui avait fait un aveu. Ce qu'il y avait de plus moche en prison, lui confia-t-il, la privation la plus dure, ce qui était le plus difficile à supporter, ce n'était pas la promiscuité avec d'autres corps étiolés et étrangers. Ce n'étaient pas non plus les brimades des matons. Ni les violences, les stratégies et les complots entre détenus. Ni la nourriture insipide. Ni l'absence de femmes. Ni les sentiments dégradés.
« La nuit, lui avait dit son fils. C'est surtout la nuit qui me manque. »
- J'étais professeur d'histoire et de philosophie au lycée.
- Philosophie... C'est difficile! »
Il avança sa lèvre inférieure.
« Bah... Ça dépend. De toute façon, je la préfère à l'histoire.
- Pourquoi ?
- L'histoire se fait avec les armes. La philosophie avec des idées.
C'est pour ça qu'on avait mis le mari de Luisa sur une île. Car si l'on veut garder quelqu'un vraiment à l'écart du monde, il n'y a pas de mur plus haut que la mer.
L’histoire se fait avec des armes. La philosophie avec des idées.
[I]l n'est pas moins réel, moins profond que les amours solidement ancrés au rivage.
Un amour en haute mer.
(p. 183)
La nuit, lui avait dit son fils. C'est surtout la nuit qui me manque.
(p. 151)
[Il] regarda le détenu dans les yeux, comme s'il espérait trouver un lien entre ce visage et cette voix. Il n'en trouva pas et ressentit le trouble que l'on éprouve devant un mystère.
(p. 78)
[S]i l'on veut garder quelqu'un vraiment à l'écart du monde, il n'y a pas de mur plus haut que la mer.
(p. 33)