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J'ai déjà lu et apprécié les deux premiers romans de cette écrivaine italienne que Dominique m'avait amenée à lire . Eva dort (mon préféré) et Plus haut que la mer . Je me souviens bien de ces deux romans ce qui est un gage de qualité pour moi. Comme dans ses précédents romans Francesca Melandri, mêle l'histoire de l'Italie à une histoire d'une famille fictive pour nous la rendre plus humaine. le reproche que je fais à ce dernier roman, c'est qu'elle a voulu cette fois couvrir une très large période de l'histoire italienne et que son roman est donc très dense voire un peu touffu.

La famille d'Iliaria Profeti est compliqué car son père, Attilio Profetti a eu deux épouses , trois enfants d'un premier mariage et un fils avec sa maîtresse qu'il a fini par épouser. de son passé, éthiopien, sa fille Iliaria n'aurait rien su si un jeune éthiopien du nom de son père n'était venu un jour frapper à sa porte lui apprenant de cette façon que son père était le grand père d'un jeune immigré en situation irrégulière. Ce sera un autre aspect du roman le parcours semé de souffrances à peine inimaginables, d'un jeune éthiopien, qui sans le recours à un ressort romanesque aurait été renvoyé en Ethiopie et à une mort certaine. L'inventaire de tous les thèmes abordés vous donnerait sans doute une impression de « trop », mais l'auteur s'en sort bien même si, parfois, j'ai eu besoin de faire des pauses dans ma lecture.

L'interdiction du divorce en Italie et les doubles vies que cela entrainait.
L'engagement dans le mouvement fasciste d'un jeune diplômé.
Le parcours d'un prisonnier italien aux USA pendant la guerre 39/45
L'injustice d'une mère qui dévalorise un enfant au profit d'un autre.
Le parcours des immigrés arrivés clandestinement en Italie.
Les théories racistes reprises par le mouvement fascistes.
La corruption en politique.
La construction à Rome.
Les marchands de sommeil.
Les malversations de Berlusconi.
Et le plus important la guerre en Éthiopie menée par les fascistes Italiens avec son lot d'horreurs absolument insupportables.
Et peut-être que j'en oublie, mais on comprend sans doute mieux quand je dis que ce roman est touffu, car L'écrivaine veut aussi montrer que tout se tient . En particulier, que de ne pas avoir voulu regarder en face le passé fasciste entraîne de graves conséquences sur les choix politiques actuels en Italie. Elle a pour cela créé le personnage d'Attilio Profetti, un homme à qui tout sourit dans la vie. « Tous, sauf moi » c'est lui. Il sait se sortir de toutes les situations car il a de la chance. Sa première chance : avoir été l'enfant préféré de sa mère, Viola qui en sous main oeuvre pour la réussite de son fils adoré jusqu'à dénoncer anonymement un supérieur dont une grand-mère est juive ! Ensuite, il sait grâce un charisme indéniable aider les supérieurs militaires à gagner du terrain dans la guerre coloniale en se faisant aider par une partie de la population éthiopienne. Cela ne l'empêchera pas de participer aux actions les plus horribles de la conquête comme le gazage des derniers combattants avec le gaz moutarde et ensuite de les brûler au lance flamme. Il a su partir à temps du parti Fasciste et se refaire une dignité dans la politique d'après guerre. Et finalement, comme tous les politiciens de cette époque, il a vécu et bien vécu de la corruption.

Sa fille, Ilaria, se sent loin de tout cela sauf quand elle comprend que l'appartement qu'elle occupe, cadeau de son père, est certainement le fruit de la corruption.

Le personnage le plus intègre, c'est le frère aîné d'Attilio, Othello, qui a été prisonnier pendant la guerre . On voit alors un fait que je n'ignorais complètement. Les Américains ont demandé à partir de 1943 aux Italiens, de combattre pour eux. La situation était complexe puisque l'Italie était alors en partie occupée par les Allemands, donc l'autre partie s'est déclarée alliée des États Unis. Les prisonniers italiens qui ont accepté ont eu une vie très agréable et ont retrouvé leur liberté. Othello qui n'était pas fasciste n'a pas réussi à comprendre comment il pouvait après avoir combattu pendant deux ans les Américains et les Anglais devenir leur allié. Il paiera cette décision au prix fort, d'abord le camps de prisonniers devient très dur et ensuite en revenant il aura l'étiquette fasciste, ce qu'il n'avait jamais été, contrairement à son frère qui lui a réussi à faire oublier son passé. Et il ne pourra pas faire carrière comme ingénieur alors que lui avait eu tous ses diplômes (son frère non !)

Voilà un roman dans lequel vous apprendrez forcément quelque chose sur le passé italien. Quant à moi je n'oublierai jamais les pages sur la guerre en Éthiopie (même si je n'ai pas noté de passages sur cette guerre tout est trop horrible !).


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Il recommande de lire le livre plus comme une invitation à explorer l'histoire sombre de l'Italie fasciste et coloniale que comme un roman...Car il y a les 2 niveaux et j'ai ressenti l'histoire de la famille italienne et le doyen qui en fait la colonne vertébrale du roman plus comme un prétexte à plonger dans ce monde violent et sombre. Les allers retours dans le passé , dans des époques différentes, avec des personnages différents sont , j'ai trouvé, longs et parfois fastidieux. J'en sors pour autant ravi d'avoir tant appris car , si les personnages sont fictifs, l'histoire est hélas réelle
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Par un tissage subtil, documenté et superbement écrit, Francesca Melandri rapproche l'Histoire Italienne de celle du patriarche Attilio Profeti. A 95 ans, Attilio se souvient d'une vieille promesse. Tous mourront, sauf lui… Et effectivement, même avec sa mémoire et sa raison en berne, il est là, porteur d'un passé foisonnant. Bigame, trigame, intelligent, attachant, mais aussi fasciste et raciste patenté, cet homme hors norme a traversé le 20è siècle avec nonchalance et intelligence. Librement inspiré de son propre père (qui n'était pas fasciste dans les années 30 en Italie?), l'auteure réveille un passé totalement enfoui, bien que très documenté historiquement.
Il était une fois l'Abyssinie, une terre éloignée, que le Duce voulut dompter. Aujourd'hui Éthiopie, cette terre se souvient encore des exactions terribles qui ont décimé une grande partie de sa population. Mais quand le racisme se fonde sur des mesures anthropomorphiques et scientifiques, est-il nécessaire de parler de population ? Ces sauvages ne sont pas tout à fait hommes, surtout les mâles. L'histoire montrera que les femelles ont eu un sort particulier.
Ainsi, Ilaria, enseignante engagée dans des combats humanistes, voit-elle un jour débarquer sur son palier Shimeta Ietmgeta Attilaprofeti, qui dit être son neveu.
Patiemment, intégrant courageusement les découvertes nauséabondes qui auréolent son père, elle va détricoter tous les fils qui remontent à ce passé colonial. La situation des réfugiés à Lampedusa en sera le triste pendant.
Un livre fort, courageux, intelligent et humain. Accompagner Ilaria est une tâche difficile, parfois à la limite du supportable, qu'il est important de mener à son terme. Pour, face à tous ces visages échoués sur nos plages européennes, ne jamais pouvoir dire : « je ne savais pas. »
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Ça, c'est un roman dense, passionnant, instructif et dépaysant. J'ai appris plein de choses sur les relations entre l'Ethiopie et l'Italie, sur la société italienne et ses dirigeants, du début du vingtième siècle à nos jours. Quel roman !

Extrêmement bien documenté, c'est une mine d'informations, notamment sur la colonisation de l'Ethiopie, on apprend tellement de choses qu'on a peur d'en oublier la moitié. Ceci dit, des images vont rester imprimées dans un coin de mon cerveau, des images horribles, fruits d'un racisme innommable. Et la race humaine n'en ressort pas grandie, loin de là.

On perd le fil de l'histoire pendant plusieurs chapitres pour mieux comprendre la situation historique et ceci à plusieurs reprises mais cela ne nuit aucunement à la lecture parce qu'on lit autant pour s'informer que pour s'immerger dans cette histoire familiale atypique. D'ailleurs, l'auteure combine adroitement l'Histoire avec celle de ses personnages. du grand art !

On va et vient entre plusieurs époques au gré des recherches sur ce père qui a menti toute sa vie à sa famille en lui cachant l'existence d'un enfant métis. Jamais l'auteure ne perd son lecteur, elle l'embarque avec elle, avec une assurance à toute épreuve, rien ne l'arrête.

Le personnage du père est particulièrement ambigu, fasciste un jour, à l'écoute de son fils caché un autre, détestable et parfois émouvant. Qui est-il vraiment sous cette carapace ?

Les personnages sont tous, profonds, denses, ils ne sont pas des êtres de papier mais bien des individus de sang et d'âme. du plus petit rôle au plus important, Francesca Melandri offre à ses personnages une incarnation.

Elle a privilégié dans ce roman l'aspect historique au détriment de l'aspect romanesque, ce qui rend la lecture de ce petit pavé, assez ardu par moment. Et en même temps elle maîtrise parfaitement la construction de son oeuvre, elle met en place les pièces du puzzle avec art. Je suis admirative.

Ce n'est pas un roman qu'on dévore à pleines dents, c'est plutôt un roman qu'on déguste à petites bouchées pour en garder des odeurs, des images, des faits, pour ne pas oublier.

Un grand roman ambitieux, édifiant et engagé qui suscite une réflexion sur les méfaits de la colonisation, ou sur la place que l'Europe accorde ou pas aux réfugiés.
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C'est la confrontation entre deux mondes qui ont bien plus d'imbrications que beaucoup ne voudraient l'admettre. Nous découvrons les liens qui les unissent en même temps qu'Ilaria, que l'apparition soudaine sur son palier d'un jeune homme noir prétendant être son neveu amène à se plonger dans un pan tabou du passé italien, ainsi que celui de son père, Attilio Profeti. Ce dernier aura quelques difficultés à confirmer ou expliciter sa filiation avec ce jeune éthiopien (dont il serait le grand-père) : si, conformément à la promesse qu'il s'est fait à ses 9 ans face au cadavre de sa grand-mère il s'obstine, presque centenaire, à ne pas mourir, son esprit quant à lui divague.
C'est donc par un autre biais qu'Ilaria s'instruit sur la sombre Histoire de son pays, d'abord en écoutant le jeune homme lui raconter son histoire, celle d'un exil clandestin, motivé par sa volonté de survivre en fuyant un pays où la corruption et la dictature, après lui avoir valu un long séjour en prison, le promettaient à une mort quasi-certaine. Celle, aussi, d'un passé marqué par l'occupation italienne en Ethiopie (1936-1941), qu'occultent les manuels scolaires, et à propos de laquelle la société italienne entretient une insistante cécité. L'ampleur des atrocités alors commises (déportations de populations, viols, prostitution forcée de fillettes au profit d'officiers supérieurs, assassinats de masse) s'accompagna d'une politique de ségrégation visant entre autres à interdire le métissage, que la cohabitation entre colons ou militaires italiens et population locale faisait craindre aux autorités soucieuses de défendre la pureté de la race italienne.

Au-delà de la découverte de l'histoire nationale, c'est aussi le passé paternel que creuse Ilaria, consultant des archives, lisant de vieilles correspondances. Des incursions dans le passé nous révèle toute l'ambiguïté du charismatique Attilio Profeti, engagé volontaire dans les chemises noires à la fin des années 30, alors auteur d'un manifeste raciste, ce dont il s'est bien gardé de se vanter auprès de sa famille. Au contraire, il s'est toujours fait vaguement passer pour un résistant, mais cet homme qui a de longues années durant mené une double vie, entretenant parallèlement deux familles -sans compter celle qu'il avait laissé en Ethiopie- n'en était pas à un mensonge près. Il faut dire qu'Attilio a toujours bénéficié d'une chance surnaturelle, presque scandaleuse, s'accompagnant d'un puissant charisme, d'une élégance et d'une nonchalance naturelles lui attirant une bienveillante admiration et une confiance qu'il était inconsciemment persuadé de mériter. Il a par ailleurs toujours refusé l'utilisation de la force ou de la violence, ceci dit plus par élégance que par véritable éthique. Mais cela lui a permis de n'être jamais vraiment mouillé dans le pire, de survoler, en quelque sorte, l'immonde tout en gardant une certaine distance. Tout comme, bien que faisant officiellement partie d'une classe dirigeante corrompue qui n'échappera pas à la broyeuse de la magistrature, il n'a finalement eu à son actif, en tant que pion de moyenne envergure, qu'une condamnation avec sursis.

En prenant peu à peu conscience de ce qui s'est joué lors de l'occupation italienne en Ethiopie, et de la possible participation de son père à cette ignominie, Ilaria en vient à s'interroger sur la responsabilité de chacun -et donc la sienne- sur la manière dont les atrocités commises par les nations sont occultées, mais aussi sur ce que la richesse des nations occidentales doit à l'exploitation -passée ou présente- des pays pauvres. Elle-même se sent viscéralement de gauche et mène sa vie en équilibre précaire sur une corde tendue entre ses origines et sa détermination à ne pas se laisser conditionner par elle. Elle a pour amant un ami d'enfance proche de Berlusconi, avec lequel elle sait n'avoir aucun avenir commun. Elle vit dans un quartier populaire et cosmopolite, mais dans un appartement acheté par son père, et ses préoccupations sont finalement bien éloignées de celles de ce jeune homme apparu à sa porte ou de ses semblables, dont les malheurs émeuvent le monde, avant qu'il s'indigne pour d'autres causes, le temps d'un reportage.

"Le parfum du privilège est comme la salle odeur de pauvreté : on a beau se laver les mains, il ne partira jamais."

La posture des citoyens des pays riches revient ainsi à un tacite assentiment au cynisme dont font preuve leurs états. L'Italie, gouvernée par un réseau d'intérêts et de privilèges, n'en a d'ailleurs pas fini de s'enrichir sur le dos de ceux qu'elle refoule avec d'autant plus de sévérité depuis l'accès au pouvoir de Berlusconi, et l'absurde inhumanité de sa politique migratoire.

Le roman de Francesca Melandri, dense, au rythme lent, navigue ainsi entre divers lieux et diverses époques, tourne autour de plusieurs personnages, le tout cimenté par une impeccable maitrise narrative, et porté par une écriture au grand pouvoir immersif.

La multiplicité des points de vue lui permet d'illustrer les connexions d'une part entre passé et présent, et d'autre part entre ces zones géographiques du monde a priori éloignées mais qu'un épisode d'histoire commune relie, avec des répercussions sur du long terme.

Brillant.

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L'autre dans toute son incompréhension devient ici le vecteur d'un récit admirablement construit de l'Histoire italienne, du fascisme aux désastres de sa colonisation éthiopienne. Un père, dissimulateur et séduisant, perd la tête, sa fille tente de reconstituer son passé et ses effarants agencements. Dans Tous, sauf moi, Francesca Melandri tisse une image complexe, accusatrice mais sans être moralisatrice, de son pays et de son rapport à l'étranger, à lui-même donc.
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L'histoire contemporaine de l'Italie revistée à la lumière de son passé fasciste. Grandiose et terrifiant. Un jour sur son pallier Ilaria, professeure, fille d'Attilio 93 ans, soeur d'Attilio (aussi), d'Emilio et de Frédérico dont j'ai oublié le nom, découvre sur son pallier un migrant Éthiopien qui lui dit être son neveu.
C'est l'époque où Berlusconi est au pouvoir, Khadafi vient lui rendre visite leurs frasques sont indécents, leurs abus de pouvoir sans limite... en contrepoint à cette visite le long chemin des migrants africains qui finissent dans les prisons Libyennes violés, torturés, affamés sans raison aucune. Shimeta fait parti de ces hommes qui mettront des années de misère à arriver jusqu'à une destination où personne ne les accueillera. En repartant sur les traces de Shimeta, Ilaria va découvrir le passé fasciste de son père, le colonialisme italien qui exploite met à feu et à sang l'Ethiopie, un Mussolini complètement fou, l'arrogance Berlusconienne qui envoie ses entreprises dévorer un morceau du gâteau d'un pays brisé par la guerre civile. Son père qui comme tout les colons va se servir du corps d'autrui comme s'il en était le propriétaire, l'indifférence, l'amour un peu, par touche mais toujours le mépris de l'autre, l'abandon, la voracité capitaliste, le toujours plus de pouvoir, d'argent, de corps à soumettre, de ressources à épuiser.
Un long roman (trop long à mon goût) qui fouille dans le détail le passé colonial italien et le relie à la crise des migrants. Comment l'occident a inoculé le virus des guerres et des famines dans des pays pauvres mais en lien avec leur écosystème. Pour un Shimeta qui va retrouver une famille, combien vont être mis dans un vol retour et finir dans des prisons cauchemardesques. Où l'on constate que les stigmates mussolinien sont encore présents dans les rouages du pouvoir italien, les monstruosités toujours là;
Un livre qui secoue
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Ma première rencontre avec Francesca Melandri date déjà de quelques années, pourtant je me souviens bien de Plus haut que la mer, roman dans lequel elle abordait avec subtilité une période sombre de l'histoire de son pays. Elle s'attaque à nouveau à ce sujet épineux avec Tous, sauf moi, à la fois fresque familiale et historique de l'Italie du XXème siècle.

Tous, sauf moi est le mantra d'Attilio Profeti. Père de quatre enfants, auréolé du prestige de sa réussite professionnelle, il est désormais un vieil homme dont ses proches croient connaitre tous les secrets. Jusqu'au jour où sa fille Ilaria découvre devant sa porte un jeune africain qui prétend être le petit-fils d'Attilio. Intriguée, Ilaria cherche à en savoir plus et peu à peu, découvre le passé méconnu de son père et de son pays.

Il y a dans cette histoire deux niveaux de lecture, le romanesque et l'historique, que Francesca Melandri mêle habilement. Sur le plan strictement romanesque, Francesca nous raconte l'histoire de la famille Profeti partant de la mort d'Attilio Profeti jusqu'aux premières années de mariage de ses parents. Ce faisant elle nous offre une saga familiale riche et passionnante, des personnages marquants même lorsqu'ils n'ont qu'un rôle secondaire dans l'intrigue (je pense notamment à Ottelo, le frère aîné mais éternel second). Je suis loin d'être une romantique, pourtant j'ai accroché à l'histoire d'amour complexe entre Ilaria, enseignante et socialiste, avec son ami d'enfance Piero, député de Silvio Berlusconi. Ce n'est que l'un des points d'accroche entre l'histoire de la famille et l'histoire de l'Italie, car toute l'intrigue imaginée par Francesca Melandri est indissociable de l'histoire contemporaine de son pays.

A travers les destins de ses personnages, Francesca Melandri nous parle de l'Italie. Elle nous raconte les guerres, le fascisme, l'Ethiopie. Elle raconte les violences, la propagande, les théories racistes. Elle ancre également ses personnages dans l'Italie actuelle, parlant d'une classe politique gangrénée par la corruption ou d'immigration. Elle nous livre là un travail ambitieux, basé sur un solide travail de recherche, mais qui, dans le cadre d'un roman pourrait dérouter, voire rebuter, certains lecteurs. J'avoue avoir par moments été perdue, car mes connaissances sur l'histoire italienne sont pour le moins superficielles. Pourtant, raconter ces événements en les mêlant à un roman, permet de les faire connaître à un plus large public. On sent en effet la révolte de l'autrice face aux événements passés mais également devant les événements actuels. C'est un cri d'indignation face à l'hypocrisie et à l'aveuglement généralisés.

A découvrir absolument !
Lien : https://tantquilyauradeslivr..
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Lorsque Babélio a proposé une rencontre avec Francesca Melandri, je me suis précipitée. J'ai découvert cette auteure avec Plus haut que la mer qui évoque les années de Plomb et se déroule en partie en Sardaigne, que j'ai beaucoup aimé. Eva Dort qui raconte un autre épisode de l'histoire de l'Italie : celle des villages germanophones du Haut Adige italianisés au cours de la période fasciste et après la Seconde Guerre mondiale. Francesca Melandri m'a fait découvrir une Italie que je ne soupçonnais pas dans des romans denses et puissants. Gallimard m'a fait parvenir un exemplaire de Tous sauf moi et l'invitation à rencontrer l'écrivaine. 

Le seul défaut de Tous sauf moi est son poids : 568 pages d'un grand format, un pavé pour la lectrice qui a le poignet cassé! Au dessus de 400 pages, je préfère le numérique. C'est un détail . Il ne faut surtout pas s'effrayer de ce pavé parce qu'une fois qu'on est entré dans l'histoire on se laisse entraîner dans une histoire passionnante.

Tous sauf moi est le dernier opus de la trilogie historique. Il retrace l'histoire du fascisme et particulièrement celle de l'aventure coloniale mussolinienne en Ethiopie. Comme dans ses précédents romans, le présent et le passé se télescopent et la saga familiale ne sera pas racontée de façon linéaire. C'est d'ailleurs le présent qui déclenche l'enquête qu'Ilaria mène pour découvrir l'histoire de son père. Un migrant africain débarque sur son palier, à Rome avec une carte d'identité qui prouve qu'il est son neveu : il porte le même nom que son père Attilio Profeti.  Ce dernier, à 95 ans, n'a plus toute sa tête ; sa seule préoccupation "gagner le concours" consiste à survivre plus vieux que tous.

Tous sauf moi est la devise, le refrain, répété comme un mantra depuis son enfance, tous mourront "sauf moi". En effet, la chance est du côté d'Attilio Profetti : il va survivre à une guerre meurtrière. Il réussira, sans même le chercher, à être planqué. Il va s'enrichir et s'élever dans l'échelle sociale par des relations louches. Il va aussi passer à travers les enquêtes des juges dans l'opération mains propres, compromis mais pas assez important pour être condamné. Dans sa vie familiale, il a aussi une chance folle...mais ne spoilons pas le récit.

C'est en fouillant dans la vie de son père qu'Ilaria va découvrir presque un siècle d'histoire. Attilio, chemise noire, est envoyé en Ethiopie, se compromet aussi dans les théories raciales les plus abjectes,  est témoin des massacres.  Plus tard, on découvre  corruption et affaires de Berlusconi. Et finalement, les camps de rétention des migrants. Une histoire peu reluisante !

La romancière a construit un puzzle riche et foisonnant. Les personnalités sont complexes. Rien n'est simple. Au détour d'un chapitre, Francesca Melandri évoque deux personnages historiques qui n'ont rien à voir avec les héros inventés pour le roman : Badoglio et Graziani, figures importantes de l'histoire la plus trouble de l'Italie. Au cours de la rencontre, elle a évoqué le monument à Graziani qui a fait polémique : on célèbre encore les héros du fascisme, même si on sait qu'ils sont responsable de massacres.

Tous sauf moi peut être lu comme un roman historique. Il peut aussi être envisagé sous le prisme des relations familiales. On croit connaître ses parents, son mari. Qu'en sait-on vraiment?

C'est en tout cas un très beau roman!


Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Magistral. Histoire de la colonisation de l'Ethiopie par Mussolini (1935-1940) à travers la vie d'un protagoniste , Attilio Profeti, (1915-2012), chemise noire, homme chanceux, qui parie que tous ceux qu'il a croisé, mourront avant lui, « Tous, sauf moi ».L'arrivée à Rome, d'un jeune migrant éthiopien, qui se dit être lui aussi un petit-fils,vont emmener les autres dans une recherche d'un pan de l'histoire italienne totalement occultée dans les livres scolaires.L'auteure, avec une belle écriture, accessible , nous enchante en nous racontant des pages atroces de cette colonisation portée par une idéologie raciste, et en même temps nous décrit avec humour l'actualité de l'Italie de Berlusconi,, les inégalités, la crise immobilière, les embouteillages à Rome.Et des passages édifiants sur les tracasseries administratives des migrants, les accords passés avec Khadafi . J'ai tellement appris dans ce texte si accessible, si enchanteur..
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