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Citations sur Faites mieux ! Vers la Révolution citoyenne (11)

La rétention des savoirs est un crime contre l'humanité
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10. « Du point de vue politique, elle [la créolisation] est le chaînon manquant entre l'universalisme désiré et la revendication de droit à la différence. Ce n'est pas un entre-deux mais une voie de passage. La créolisation majoritaire de nos jours s'opère par les modes d'emploi des objets, la musique et les séries télévisées. Toutes choses permettant d'opérer une symbiose des comportements et des normes de ceux-ci. La créolisation invalide le racisme. Aucune distance ne sera jamais assez grande entre les êtres humains pour les empêcher de produire quelque chose de commun et de neuf, ensemble. La créolisation dépasse concrètement le concept étriqué de l'exigence d' "intégration" dans un monde fantasmé préalable, pour former la communauté humaine dans chaque pays. La créolisation est inclusive. Certes elle se réalise à coup sûr à partir de la culture dominante d'une époque et d'un lieu. Mais elle n'est pas pour autant un nivellement ! Elle fait jaillir de l'imprévu et de l'original. Et elle accueille et reformate tout ce qui l'approche. Cette tendance est d'autant plus forte quand la pression du nombre augmente les échanges et multiplie les connexions. Dès lors, elle peut être considérée comme le nouvel âge en préparation d'une matrice commune. Ou bien encore comme la base d'une future culture cumulative. » (p. 316)
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9. « La globalisation est le nom de ce moment où la finance a le moyen numérique direct et physique d'articuler tous les réseaux par où la collecte du profit s'opère. La globalisation numérique permet alors une mutation du processus de l'accumulation du capital. L'extraction de la plus-value n'est plus centrée pour l'essentiel sur la production brute mais sur la circulation entre les moments de sa réalisation. Et par conséquent les accès aux moyens de cette circulation deviennent cruciaux. On comprend alors comment le capitalisme des réseaux peut reposer sur une nouvelle source d'accumulation : le tribut prélevé sur ce droit d'accès. Un appétit nourri et accru par la tendance lourde à la monopolisation croissante des réseaux matériels et immatériels. » (pp. 245-246)
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8. « La révolution citoyenne se présente donc sous deux formes. D'abord comme une action collective spontanée. Ensuite comme le programme et la stratégie délibérée d'une organisation politique quand elle fait sienne ce projet, comme nous le faisons en France. Mais d'abord c'est une révolution de fait. Partout où elle a lieu, elle présente un épisode insurrectionnel plus ou moins frontal avec le gouvernement et le pouvoir en place. Dans son déroulement, elle passe par des formes et des phases à ce sujet, souvent identiques dans le monde entier. C'est là un signal de l'homogénéité des conditions dont elles sont issues. L'expérience en désigne au moins deux. D'une part les politiques néolibérales de rabougrissement de l’État et des services publics. Car le passage de secteurs essentiels au profit du secteur privé est toujours socialement discriminant et vécu alors comme une injustice. D'autre part, il s'agit des catastrophes liées au changement climatique. Ou bien des conséquences de la dégradation de l'écosystème sous les coups du système productif. Elles désorganisent et mettent à nu l'impuissance du marché à régler les problèmes. » (p. 193)
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7. « La dépendance aux réseaux engendre alors de cette façon l'acteur social qui en est l'objet. C'est le peuple. C'est nous. C'est-à-dire la masse de ceux qui ne peuvent reproduire leur existence matérielle sans cet accès. Le contexte polarise la lutte qui s'en déduit entre "eux" et "nous". D'un côté l'oligarchie. C'est "eux". Elle a son intérêt dans la levée de tous les contrôles citoyens qui pourraient s'opposer à sa maîtrise sur la géographie des déserts et des oasis de services rendus par les réseaux qu'elle possède. Il lui faut étendre cette géographie en abolissant tous les régulateurs tels que services publics, normes et rapports de force sociaux qui limiteraient son pouvoir ou l'expansion de son projet. De l'autre côté c'est le peuple. Il dépend en tout et pour tout de son accès aux réseaux collectifs. Ils assurent sa survie et la reproduction de son existence matérielle et sociale dans tous ses aspects. Lui doit à l'inverse garantir sa propre sécurité en se donnant les moyens d'accéder sans entrave à ces réseaux. La relation du peuple et de l'oligarchie a pour enjeu ce contrôle des réseaux. Et cela aussi bien pour y accéder, pour la garantie de leur bon fonctionnement, pour le contenu et la qualité de leurs services. Dans ce conflit d'intérêts et de pouvoir, on voit en effet un conflit pour la répartition des fruits de l'activité des réseaux entre services à rendre et profits financiers à prélever. Mais ce n'est pas tout. Pour les uns c'est une lutte pour l'appropriation de la richesse réalisable. Pour les autres c'est la lutte pour la réappropriation de soi en contrôlant le moyen de satisfaire ses besoins vitaux. […] Les uns portent une logique de classe, les autres, un projet de condition humaine. Les uns, une appropriation privée, les autres, une mise en commun des moyens. Les uns, un privilège individuel, les autres, un pouvoir collectif dans la cité que résume le mot "citoyen". Les uns, un intérêt particulier, les autres, un intérêt général humain. » (pp. 173-174)
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6. « Les villes accompagnent la mutation mais cette fois sans planification de la croissance urbaine. Les mégalopoles creusent spontanément les inégalités. D'un côté un processus de sécession des quartiers riches et de l'autre le développement de tentaculaires bidonvilles au Sud, le retour du sans-abrisme au Nord. L'espace urbain est marchandisé et fragmenté à l'extrême. La publicité commerciale prend une place dans le paysage urbain jamais atteinte auparavant par n'importe quel appareil de propagande dans l'histoire de l'humanité. Dans ce nouvel archipel urbain mondial, les grandes métropoles deviennent des hubs aéroportuaires. Le réseau numérique permet un boom dans la communication. Le réseau logistique connaît un essor sans précédent dû à l'éloignement radical des centres de consommation et de production. L'urbanisation réorganise tout le "Sud" global. » (p. 143)
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5. « En 2008, un changement spectaculaire s'est produit. Pour la première fois de l'histoire de l'humanité, la population vivant en ville a dépassé en nombre celle vivant à la campagne. Après des dizaines de millénaires à l'inverse ! Un mode de vie longtemps minoritaire est devenu hégémonique sous toutes les latitudes. Au monde d'hier fait de cités, surnageant comme des îlots dans un univers rural, succède celui de la ville sans fin. Il s'agit donc d'une bifurcation majeure dans l'histoire longue. Mais nous ne pouvons plus nous en rendre compte. La ville nous a absorbés sans bruit. Elle est devenue notre milieu de vie évident. Nous pourrions la croire aussi neutre qu'un simple paysage. Nous passerions à côté de l'essentiel. La ville est une matrice. Elle formate toutes nos activités, nos manières d'être, nos désirs, nos besoins. Et sans doute la politique elle-même si l'on veut rappeler une fois de plus la racine du mot grec ancien. La polis désigne la cité elle-même comme lieu de la discussion politique. » (p. 133)
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4. « Dans une consommation s'accomplit en quelque sorte la production sociale de la réalité vécue. Les objets autour de nous ne se limitent pas à leur valeur d'usage et à leur valeur d'échange. L'univers mental les prend en compte comme objets de pensée. Il leur donne un sens relationnel par l'affichage du désir à leur sujet. Et on ne consomme jamais non plus sans conséquences pour l'idée que l'on a de soi. La marchandise envoûte son acquéreur. C'est alors vraiment tout un symbole de voir comment le premier milliardaire du monde est un Français établi sur un empire du luxe. Le prix de ses productions délimite une clientèle vouée à l'achat de signaux d'ostentation. Alors il n'est pas possible, sans un réductionnisme aberrant, de sous-estimer un paramètre comme la valeur inclusive de la marchandise. Autant croire qu'une assiette peinte par Picasso trouve sa valeur d'usage à la cuisine. » (p. 102)
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3. « On comprend comment l'industrie pétrolière [ainsi que les autres industries à fort impact environnemental] agit souverainement au nom des droits de la propriété privée et de la liberté d'entreprendre dans la conception issue de la fin de la société féodale et de l'entrée dans l'ère capitaliste. Tous les autres interviennent au nom de l'intérêt général humain confondu avec celui de la protection de son écosystème. Ils ne peuvent délibérer comme ils le font sans poser une nouvelle hiérarchie politique des normes. Au sommet d'entre elles, ils installent ces intérêt général humain. Mais ils introduisent aussi même sans le dire la définition d'un nouveau type de propriété : le bien commun de l'humanité. La confrontation est inéluctable. Elle présente des traits communs avec celle du capital et du travail aux deux siècles précédents. Mais elle en renouvelle et en élargit le sens et les enjeux. À sa façon elle instaure un peuple humain concret : celui, empoisonné, asphyxié, dénaturé par un mode de production individuellement profitable et collectivement suicidaire. » (pp. 96-97)
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2. « Donc aujourd'hui, aucune information numérisée n'est définitivement stockée. Elle occupe de la place et sa conservation consomme de l'énergie. Petit à petit une information peut reculer dans les profondeurs du stockage du cyberespace. Pour finir, elle se démembre et disparaît.
[…]
Quelles sont nos priorités dans l'utilisation de l'énergie si on doit en limiter la production et l'usage ? Ce n'est pas une question de logique : une information aujourd'hui inutile ou sans usage sera peut-être décisive demain. En matière de savoirs, détruire tout l'inutilisé n'est donc pas si raisonnable dans la durée ! Autre chose : quelles sont nos conservations prioritaires : l'écrit, le sonore, le visuel, la 3D ? La musique, la littérature, la peinture, l'art plastique, les cours de la Bourse, des horaires de bus ? Ce sont des questions politiques. La culture cumulative est intimement liée au fonctionnement de la communauté humaine. Elle ne peut pas échapper à ses règles de décision. Elle est la couche de pensée interface avec le monde. Mais sa production et sa conservation sont liées aux techniques d'une époque. Par conséquent la question politique qu'elle pose se formule différemment à chacune d'elles. » (p. 65)
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