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Critique de Eve-Yeshe


A la suite du long réquisitoire de l'avocat général qui se termine, après un long silence savamment entretenu (une aposiopèse) sur une demande de vingt ans de prison. L'accusée, Mathilde Collignon, se rend compte qu'elle avait sous-estimé son acte. On ne sait pas de quoi, il s'agit, car le livre commence sur ce réquisitoire.

Ensuite, le jury est appelé à se retirer pour délibérer sous la houlette du juge Largeron qui, entre parenthèses s'est rué sur le dossier pour faire un coup d'éclat. Nous aurons accès aux délibérations et en apprendre plus sur ce qu'a fait Mathilde.

Elle est gynécologue en milieu hospitalier, divorcée, mère de deux enfants et, ô scandale, elle aime le sexe via un site de rencontre sur une application. Un jour, elle se rend chez l'un des hommes avec lequel elle a pris rendez-vous, et va se faire violer par lui et son copain avec toute la violence qu'on peut imaginer, viol sodomie coups…

Elle a le courage de s'enfuir et sous l'effet du traumatisme, décide de ne pas aller raconter ce viol à la police, car elle n'a pas envie d'entrer dans certains détails, et sait par expérience (des patientes lui en ont parlé) que la bienveillance n'est pas toujours au rendez-vous et qu'au procès, si procès il y a les violeurs disent toujours que la victime était consentante. Elle va mûrir sa vengeance…

Mathieu Menegaux explore tous les tenants et aboutissants, les violeurs qui se présentent en victimes, les juges ou jurés qui pensent qu'elle a inventé le viol, pour s'en prendre aux hommes (me-too à l'envers), la notion de consentements, le fait de ne pas se faire justice soi-même. En tout cas, je vous laisse découvrir la manière dont Mathilde s'est vengée et ce qui en a découlé, avec une mise en accusation pour « torture et acte de barbarie ». c'est étrange, quand même de constater que le viol n'est pas considéré comme un acte de barbarie, alors qu'il a été largement utilisé pendant la guerre dans l'Ex-Yougoslavie par exemple pour réduire les femmes au silence et les briser à jamais…

Les échanges entre les jurées femmes et les hommes sont à la limite du supportable, tout comme le fait que ce sont des hommes qui ont mené l'enquête, mis en examen, emprisonné… Sans oublier que nous sommes à l'heure et l'ère des réseaux sociaux avec des échanges musclés des me-too balance ton porc d'un côté et les intégristes de la condition masculine de l'autre. Et cela a forcément des répercussions sur la réflexion du jury.

Ce roman fait donc réfléchir, on ne sait pas ce qu'on aurait pu faire, à la place de Mathilde, les trucider ou faire confiance à la justice ? Je suis passée par différents stades, la colère, l'empathie limitée à l'égard de Mathilde qui ne montre aucun regret ou remords, l'envie de frapper les deux hommes du jury : une femme dit aimer le sexe est forcément une folle dépravée, qui a bien mérité ce qui lui est arrivé (on est en 2021, il me semble, ou alors c'est ma mémoire qui me joue des tours ?) alors que dix minutes avant, les mêmes affirmaient qu'elle avait inventé le viol…

Moralité de l'histoire : comment gérer l'intime conviction ? Et juger en toute impartialité ?

C'est ma deuxième incursion dans l'univers de Mathieu Menegaux dont j'avais plutôt apprécié « Disparaître » et j'ai beaucoup aimé ce livre avec des rebondissements, une évolution des jurés (certains du moins !) au cours des délibérés avec un juge dont les certitudes vont être chahutées.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m'ont permis de découvrir ce livre et de retrouver son auteur.

#Femmesencolère #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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