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Citations sur Sommes-nous prêts pour la guerre ? (7)

Comme je l’écrivais dans mon journal, L’Opinion, «si l'armée française était, demain, déployée dans un "engagement majeur" de "haute intensité", comme en Ukraine, elle pourrait tenir un front de 80 kilomètres. Pas plus !

Quatre-vingts kilomètres, c'est la distance séparant Dunkerque de Lille ou Strasbourg de Mulhouse.»

Le front ukrainien s'étend, lui, sur près de 1000 kilomètres.
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Au cours des quarante dernières années, sur treize chefs d'état-major de l’armée de terre, il n’y a eu que deux artilleurs (mais neuf fantassins) et pas un depuis plus de vingt ans. Pas un chef d'état-major des armées n'est issu de l’artillerie. Rappelons que le maréchal Foch, principal penseur militaire français et vainqueur de la guerre en 1918, était un artilleur. ..

La même difficulté se retrouve dans l’armée de l’air qui met en œuvre un autre volet de la défense sol-air. C’est une armée commandée par des pilotes (de chasse) et tournée vers les avions, dans laquelle les escadrons de défense sol-air (EDSA) n'ont pas toujours eu les honneurs - et les postes - que leur importance méritait.
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Onze mille blessés en dix jours, soit plus de 1000 par jour... Ces chiffres semblent élevés, mais le général Pierre-Joseph Givre, l’un des penseurs de l’armée de terre, explique de son côté que «dans un conflit de haute intensité, les pertes se montent en moyenne à 1 % de morts et 4% de blessés par jour parmi les troupes». À ce rythme, au terme d'une semaine de combat, une unité constituée aurait perdu un tiers de son effectif...

Comment gérer un tel flux de morts et de blessés ? Comment les évacuer du champ de bataille ? Les acheminer vers les hôpitaux ? Les soigner ? Avec quels personnels ? Quels moyens ? C'est totalement hors de portée du service de santé des armées, du régiment médical (RMED) de l’armée de terre ou des avions d'évacuation sanitaire (Evasan) de l’armée de l’air.

On se souvient qu'au moment de la crise du Covid, une dizaine de jours avait été nécessaire pour déployer 30 lits d’un hôpital militaire de campagne à Mulhouse. Trente lits... Et pourtant, nous étions déjà «en guerre», comme le martelait alors le président Macron. Ce n'est pas forcément rassurant.
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La débâcle en Afghanistan avec le retour des talibans à Kaboul en 2021, l’enlisement américain en Irak, le retrait contraint de la France du Sahel, l’échec de l’Élysée à changer la donne au Liban, la victoire de Bachar el-Assad en Syrie, l’anarchie libyenne : il ny a pas de quoi être fier. Mais qui, parmi les responsables politiques français, se risque à en tirer les conséquences ?

À partir de l’élection de Barack Obama, les Etats-Unis ont entrepris de mettre fin à la «longue saison de guerre» - le mot est du président démocrate - dans laquelle leur pays était englué. Cela n'a pas empêché les Etats-Unis de mener une campagne (2014-2019) pour détruire le califat territorial de Daech en Irak et en Syrie. Ou, à partir de février 2022, d'être le prindpal soutien militaire de l’Ukraine. Mais Washington le fait avec prudence, réticence même.
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Peut-on imaginer un «engagement majeur» de «haute intensité» de l’armée française ailleurs qu'en Europe et dans le cadre de la défense collective de l’Alliance atlantique ?

Impossible de répondre avec certitude. Rappelons seulement quelques «surprises stratégiques» récentes. En 1983-1985, la France était alliée de l'Irak, au point de lui prêter cinq avions de combat Super-Etendard de l’aéronavale pour soutenir Saddam Hussein contre l’Iran. Six ans plus tard, L’armée française participait à l’attaque contre l'Irak, lors de la guerre du Golfe (1990-1991).

Qui, à Londres en 1981, aurait imaginé devoir, l’année suivante, reconquérir de vive force les îles Falkland (Malouines) envahies par l’Argentine ?

Quel état-major français envisageait, à la fin des années 1980, d'engager des milliers d’hommes en Yougoslavie pendant plus d’une décennie et d'y mener deux campagnes de frappes aériennes ?
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Au moment où ces lignes sont écrites, à l’automne 2023, le canon tonne toujours en Ukraine et la guerre vient de resurgir en Israël et à Gaza.
Stupéfaits, nous avons d’abord assisté à l’invasion d’un pays européen par son puissant voisin et admirons la résistance héroïque d’une nation qui n’entend pas céder. Par notre proximité géographique et culturelle avec l’Ukraine, ce conflit vient nous troubler, sans doute plus que d’autres. De même, les tueries commises par le Hamas et la réponse militaire israélienne, avec la mobilisation générale de tout un pays contre ses ennemis, nous font nous interroger.
Consciemment ou non, chacun d’entre nous est amené à se poser la question : et si cela nous arrivait à nous aussi, que ferions-nous ?
Nous, Français, qui n’avons plus connu de guerre sur notre territoire national depuis 1945 ? Nous, Français, qui vivons à l’abri de notre dissuasion nucléaire, de nos alliances, de notre armée professionnelle ? Nous, Français, qui avons fait le choix, depuis plus de deux décennies, de ne plus contraindre quiconque à porter les armes pour la défense de son pays ? Nous, Français, serions-nous prêts à affronter une nouvelle guerre ? Soulever ces questionnements, tel est l’objet de ce livre.
La guerre, oui, mais quelle guerre ? Contre qui ? Aux côtés de qui ? Sur quel champ de bataille ? Avec quelles troupes et quelles armes ? Nous ne ferons pas de politique-fiction, avec des scénarios imaginaires qui n’ont souvent pour seule vertu que de décrire ce qui, justement, n’arrivera pas. Il est d’excellents romans pour cela. Pas plus ne sonnerons-nous le tocsin, tel Philippulus le Prophète, célèbre personnage d’Hergé, annonçant à Tintin dans L’Étoile mystérieuse que « des jours de terreur vont venir ». Tenons-nous en plutôt à la sagesse de l’humoriste Pierre Dac, quand il rappelait que « les prévisions sont difficiles surtout lorsqu’elles concernent l’avenir ». L’examen du présent, au cœur de mon métier de journaliste, et la connaissance du passé, nourrie d’une passion de longue date pour l’histoire, devraient nous suffire. La guerre, donc, mais laquelle ?
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La facilité aurait été de ne pas conclure, en laissant à chacun le soin de se faire son propre avis à la lecture des neuf chapitres de ce livre, si imparfaits soient-ils. Refuser l’obstacle n’était toutefois pas dans mes intentions.
Si, par malheur, la France se retrouvait demain impliquée dans une guerre majeure, non, nous ne serions pas prêts. C’est l’évidence même.
Pas par inconséquence ou irresponsabilité des uns ou des autres, mais seulement parce qu’il est impossible de prévoir quelle forme prendrait cette guerre. Nous serions surpris lors de son surgissement.
L’histoire militaire nous le montre : aucune guerre ne ressemble à une autre et celles que l’on prépare sont rarement celles que l’on mène jusqu’au bout.
Si une guerre se déclenchait demain, nous n’aurions pas de meilleur choix que de nous y adapter le plus vite et le mieux possible, sauf à accepter la défaite. En 1941, les États-Unis n’étaient, par exemple, pas du tout préparés à la guerre qu’ils allaient devoir mener ; toutefois, quatre ans plus tard, ils en étaient les vainqueurs. En cette même année 1941, l’Union soviétique était au bord du gouffre sous les coups de l’opération nazie Barbarossa ; mais elle aussi a su trouver les moyens de se relever puis d’écraser l’armée allemande. Durant la Première Guerre mondiale, la France avait d’abord encaissé le choc, au prix d’une terrible saignée, avant de trouver, tardivement, les conditions de la victoire : une direction politique déterminée (Clemenceau), les technologies modernes (chars) et l’engagement des Alliés (Américains).
D’abord, ne pas s’effondrer sous le choc, puis s’adapter pour tenir et vaincre : c’est la seule réponse réaliste.
Dans la France d’aujourd’hui, nous devons donc cultiver nos facultés de résilience, mais surtout d’adaptation, de souplesse et d’élasticité, en tout premier lieu sur le plan intellectuel. Pour cela, il faut en permanence encourager le débat stratégique et écouter ceux qui pensent « en dehors de la boîte » – cette « boîte » confortable qui assure les belles carrières et le financement des contrats de recherche. Par penchant personnel et conviction politique, je me suis toujours efforcé de penser out of the box, au prix, parfois de quelques grincements de dents. Ce livre ne déroge pas à cette règle.
Ce n’est donc pas pour la guerre que nous devons être prêts – c’est impossible. Ce pour quoi nous devons l’être, c’est la possibilité de devoir nous adapter, vite et bien, à une situation radicalement nouvelle. Ce pourrait être une guerre, mais cela vaut aussi pour toutes les autres menaces majeures, telles que les pandémies, les catastrophes naturelles ou technologiques, les krachs économiques.
Sur le plan militaire, cela suppose que les armées deviennent des « organisations apprenantes de combat », comme le propose le professeur de war studies Olivier Schmitt, dans un livre à paraître. Ce n’est pas gagné d’avance, à cause de leur structure très hiérarchisée et du poids des traditions en leur sein. L’impulsion doit donc venir du politique et de la société civile : comme toute institution, les armées ont tendance à vivre en vase clos et à poursuivre leurs propres objectifs.
Sommes-nous prêts collectivement à faire face aux exigences d’une guerre ? La réponse n’appartient qu’à moi et elle est positive. Je ne peux pas le démontrer : c’est en quelque sorte un acte de foi. J’ai confiance dans les ressources de mon pays et de ses habitants, et dans leur capacité à surmonter les épreuves. Nous l’avons vu avec le terrorisme et la pandémie.
Veillons cependant à ne pas lui imposer d’inutiles épreuves au nom des chimères de la grandeur et des illusions de la puissance. Face à la guerre, être fort suffit. À cela, j’ai la faiblesse de croire que les Français sont prêts.
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