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Critique de motspourmots


Comment résister à cette magnifique couverture ? Comment résister à Catherine Meurisse qui peut se vanter de m'avoir charmée pour la troisième fois en très peu de temps. Je n'ai oublié ni l'émotion ni la délicatesse de la légèreté ; j'ai adoré l'escapade bucolique et le supplément d'âme offerts par Les grands espaces (dont bizarrement je n'ai pas parlé ici). Je me suis laissé éblouir par cet hommage flamboyant à Delacroix et, par la même occasion à Alexandre Dumas dont le texte sert de support au magnifique travail de Catherine Meurisse.

La dessinatrice s'empare en effet de la "causerie" d'Alexandre Dumas, ami d'Eugène Delacroix et sollicité pour raconter son histoire, en 1864, un an après la mort du peintre, seul et éloigné de tous. Un texte qui revient brièvement sur la naissance et l'enfance du peintre (où l'on apprend ainsi que c'est un miraculé ayant échappé plusieurs fois à la mort) avant de se concentrer sur son oeuvre et la façon dont elle sera perçue de son vivant, et dressant par-là même un tableau du contexte artistique de l'époque où l'on glorifie la qualité du dessin, comme l'illustre le succès d'Ingres. Delacroix, lui, est un coloriste génial qui divise le monde de l'art toujours prompt à moquer les erreurs de perspective ou pointer l'imprécision d'un dessin. La polémique, en général, c'est plutôt bon signe pour la postérité, un peu plus compliqué de son vivant.

Catherine Meurisse investit le texte de Dumas, le bouscule en y introduisant des scénettes parfois amusées qui cassent le côté un peu solennel de l'hommage et permettent de souligner certains traits, de mettre en avant des éléments qui éclairent la personnalité de Delacroix. J'ai beaucoup aimé suivre le parcours du peintre, ses réflexions autour de la couleur, découvrir le diagramme qu'il traça bien avant Chevreul sur la loi du contraste spontané entre les couleurs, petit clin d'oeil à ma récente visite de l'exposition Félix Fénéon au Musée de l'Orangerie, ce dernier, collectionneur avisé et très porté sur la couleur ayant, bien plus tard, contribué à faire connaître d'autres talentueux artistes coloristes.

Mais la dessinatrice s'empare également des oeuvres de Delacroix pour en livrer son interprétation, à la fois fidèle et...personnelle. Dans une flamboyante et joyeuse mise en couleurs, c'est tout simplement un régal pour les yeux.
L'oeuvre du peintre défile ainsi, et c'est un peu comme si on la redécouvrait, à la fois sublimée par le regard admiratif de Catherine Meurisse et expliquée à l'aune de son époque. La façon dont il s'inspire des autres, dont il explore les salles du Louvre alors musée tout récent et abritant des oeuvres contemporaines semble résonner particulièrement chez la dessinatrice qui parle très souvent de l'importance de l'art dans sa vie, particulièrement lors des périodes dramatiques qu'elle a vécues (cf. La légèreté). Il y a quelque chose de très touchant dans cette osmose qui naît de l'union de trois artistes autour du berceau de cet album : Delacroix - Dumas - Meurisse, trinité magique dévolue aux sensations que procure le beau. Quelque chose de très touchant également dans la question qui sous-tend le texte de Dumas, la fragilité de l'artiste liée à cette dichotomie entre les sensations, la passion qui le guident et la façon dont on perçoit ses oeuvres, un décalage qui peut être si violent.
Je n'ai qu'un conseil à donner à ceux qui passent par-ici : lisez cet album, offrez-le (c'est Noël dans 10 jours), prenez-en un petit échantillon chaque jour avant d'affronter la complexité des journées trop remplies... et puis filez au musée, voir du Delacroix, du van Gogh ou du Seurat, et bien d'autres encore, savourer l'éclat des couleurs et se laisser éblouir, remplir, soigner par la beauté qui naît de ce que chaque peintre a mis de lui dans chacune de ses oeuvres.

Quel sublime album !
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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